Heaven & Hell › Radio City Music Hall live! 2007

Heaven & Hell n'est pas un nouveau groupe, il n'est pas non plus un all-star band, il est bien plus que cela. Il s'agit de l'une des incarnations de Black Sabbath, celle du début des années 80 et de 1992 avec Ronnie James Dio, Tony Iommi, Geezer Butler et Vinnie Appice (On n'oubliera pas Bill Ward sur le premier album de 1980, "Heaven and hell" justement, mais vite remplacé par Vinnie). En fait, lors de la réunion du Black Sabbath originel en 1997, il a été stipulé par contrat que pour la suite, le nom 'Black Sabbath' ne pouvait qu'être associé à Ozzy Osbourne au chant. Au milieu des années 2000, ce dernier décide de continuer sa carrière solo alors que Tony Iommi aurait bien voulu de son côté reprendre du service avec Black Sabbath. Tony décide de se rapprocher de son ancien acolyte Ronnie James Dio pour travailler à nouveau ensemble. En ajoutant Geezer Butler et Vinny Appice au line-up, on se retrouve avec l'une des nombreuses formations de Black Sabbath. Ne pouvant utiliser le nom "Black Sabbath", Tony décide d'utiliser le nom "Heaven & Hell", issu du titre le plus emblématique de cette formation. Vous pouvez bien imaginer que cette annonce a fait frémir le petit monde du heavy metal en 2006. Ils annoncent en grande pompe leur retour scénique avec une tournée débutant en mars 2007. A la fin de ce mois, ils passent par le Radio City Music Hall de New York. C'est ce concert que le groupe décide d'enregistrer pour une sortie double CD + vidéo. Durant l'été suivant, l'objet sort dans un superbe écrin avec le concert complet et quelques bonus assez sympa. Au programme de ce concert, un best of des trois albums de la période 'Ronnie James Dio' de Black Sabbath, à savoir "Heaven and hell", "Mob rules" et "Dehumanizer", avec en plus deux inédits qui se retrouvent dans la compilation de Black Sabbath, "The Dio years", sortant au pendant cette tournée. En fait, c'est avec cet album live qu'on se rend véritablement compte qu'on a affaire à un autre groupe que Black Sabbath. Vous le savez en lisant mes chroniques, je ne suis pas le fan ultime de cette incarnation de Black Sabbath. Je n'aime pas trop le son de "Heaven and hell", album que je trouve aussi inégal (bien sûr, "Neon knights", "Children of the sea" et évidemment le morceau-titre sont de très belles compositions, mais le reste fait tout juste jeu égal avec l'album "Never say die!" de Black Sabbath selon moi), ni le style moderne de "Dehumanizer". Seul "Mob rules" arrive à véritablement tirer son épingle du jeu. Et là, en visionnant ce vidéo, ce constat est encore plus criant. Heaven & Hell, c'est un peu comme si Dio, le groupe, incluait Tony Iommi à la guitare et non pas l'inverse, Black Sabbath qui accueillerait Ronnie James au chant. Je retrouve complètement l'ambiance des albums de Dio des années 80 ici. Heaven & Hell est plus massif, définitivement plus doom traditionnel mais moins flamboyant et surtout moins diversifié que Black Sabbath, moins seventies en quelque sorte. C'est en fait là que je comprends finalement pourquoi j'ai du mal avec cette incarnation de Black Sabbath. Pourtant, cette vidéo est incroyable. Le son est ample, lourd, super adapté. On "entend" que la salle est bien grande et totalement adapté au style, oui, on l'entend. La mise en scène est belle, classique avec cette atmosphère médiévale utilisant des clôtures de château de part et d'autre de la batterie. Ronnie James Dio est impérial, ultra-charismatique, avec un côté théâtral prenant. Et son chant est vraiment puissant et profond. Le lutin est au sommet de son art. Tony et Geezer sont eux aussi impeccables, Tony fidèle à lui-même à balancer ses riffs et solos avec grande classe et Geezer est plus présent que sur Black Sabbath. On le voit même prendre le lead sur l'énorme "The sign of the southern cross" avec sa pédale wah-wah. En fait, sur cette vidéo, je trouve que les morceaux prennent une toute autre dimension que sur album. Même ceux de "Dehumanizer" ou par exemple "Lonely is the word" du premier album sont plus puissants et s'intègrent parfaitement au reste des morceaux. En fait, ces trois albums sonnent mieux et sont plus adaptés à Heaven & Hell qu'à Black Sabbath. Il est indéniable qu'il s'agit de deux groupes complètement différents. C'est avec cette vidéo qu'on se rend compte que Dio prend vraiment beaucoup de place, qu'il s'affirme comme le leader de cette formation. Limite, depuis le début en 1979, ils auraient dû créer un nouveau groupe, l'Américain possédant une personnalité si marquante. Facile à dire maintenant avec le recul mais cela aurait été plus cohérent même si moins lucratif et plus risqué. Et Vinnie, aux fûts, fait des merveilles, avec un son mate approprié. Il est totalement adapté à ce style doom puissant et massif, là où son prédécesseur chez Black Sabbath, Bill Ward, alliait puissance et raffinement. Dans un groupe de doom, Vinnie est le batteur idéal, il a une frappe puissante et sèche, en véritable bûcheron, et nous gratifie, au milieu du show, à la suite de l'inédit "The devil cried", d'un excellent solo avec une superbe atmosphère inquiétante, aidé en cela par le discret Scott Warren aux claviers. Il évite l'écueil du solo en mode démonstration technique stérile et chiante. Au final, on a un objet de très grande classe, avec une production, autant sur l'aspect audio que vidéo, de qualité. Heaven & Hell montre ici qu'on a affaire à un véritable groupe à part entière et qui se démarque de Black Sabbath. Heaven & Hell se révèle totalement ici. Et comme de toute manière, Ozzy se refuse à interpréter d'autres morceaux de Black Sabbath que ceux sur lesquels il est présent, c'est une excellente opportunité d'avoir eu la création de cette formation. Dommage que le sort et la santé ne leur aient laissé que peu de temps pour continuer leur carrière qui n'aura duré au final qu'un peu plus de trois ans. Il nous reste quand même déjà ici un excellent témoignage scénique de ce groupe.