Je ne sais pas pourquoi, je l’ai acheté, mis en rayon sans l’écouter… Ça m’arrive des fois avec des groupes que je suis, je commande dès sortie mais ce n’est pas toujours le moment adéquat, mes oreilles réclament autre chose. Pas forcément un mal, quand on s’y met c’est avec un plaisir intact et j’ai replongé comme un néophyte dans la musique de ce combo. Leur post punk de haut vol a breveté sa formule mais elle fonctionne et surprend toujours. Ces arrangements à l’ancienne qui aiment à instaurer une tension durant le couplet pour la laisser éclater progressivement et exploser sur le refrain, ces guitares acérés, ce chant qui lui aussi a sa manière de se poser sur le couplet, ces rythmiques menaçantes, ce vieux goût de cendres punk dans l’haleine, le synthé tout sale, un zeste d'expérimentation… Miam à 100% en ce qui me concerne, c’est du old school au sens le plus noble. Rien que ‘Path of extinction’ avec son thème de basse évoquant celui de ‘Come to daddy’ des Virgin Prunes mais rejoint par The Fall en cours de route… Tout est dit, le post punk des Français est généreux, pas du genre sec et dépouillé mais tribal et rauque, même si le synthé joue avec des tonalités aiguës criardes. En plus, ces mecs ont décidément un sens de la mélodie irrésistible. Même les deux titres dans la langue de Molière (‘Omerta’ et ‘Consumés’) qui me laissaient circonspect de prime abord me sont juste devenus indispensables… J’ai décidément du mal à me retirer l’idée des Virgin Prunes de la tête tant nombre de rythmiques m’y font penser, cette manière sombre de faire du punk avec de l’art dans le coin du cerveau. D’autant que, mais c’est purement subjectif, j’aime beaucoup le timbre de Fabrice et sa conviction, dans les tonalités profondes comme dans un lâcher prise non feint. Après nous avoir balancé deux purs tubes dans la geule (‘Riptide’, ’Pale lights’), Frustration nous gratifient sans crier gare d’un ‘Vorbei’ plus expérimental, sans batterie, reposant sur une loop répétitive, des sonorités plus paisibles de clavier, un duo vocal tranquille avec une certaine Anne Hammershoi (dont j’ignore tout) nettement plus dans la vie des compatriotes de Clair Obscur. Dire que ce groupe totalise ses vingt ans d’existence et qu'il nous livre ce qui pourrait être son meilleur album...