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Foxeagle › Waves On Water
- 2020 • Last Disorder LD001 • 1 CD
cd • 5 titres • 27:17 min
- 1Constancy5:15
- 2Stendhal (Syndrom)5:18
- 3Suits5:20
- 4Haunted Land4:47
- 5How Long6:37
informations
Enregistré en post confinement au Studio Triphon en juin 2020, par Robin Mory. Mixé par Émilie Célarier et Robin Mory.
Artwork : Ed Haunted.
line up
Émilie Célarier (chant, tous les instruments sauf basse sur Suits)
Musiciens additionnels : Geoffroy Pacot (basse sur Suits)
chronique
Méfions nous des vagues, des flots qui nous balancent, dont on se dit d'abord qu'ils vont seulement nous bercer. Prenons gardes à ces surfaces presque lisses – troublées à peine de quelques ridules. Gardons l’œil sur ces ondes concentriques qui s'étendent, se répercutent vers les bords, les rivages. Vers l'horizon, aussi, le large. Ces cercles, où les gouttes tombent, dont les circonférences mobiles viennent se percuter, se contrarier, s'entrecouper.
Waves On Water engourdit, oui, nous plonge vers un état de demi-sommeil. Pas par ennui, non. Parce que son rythme lent, ses structures d'apparence minimale, font tout pour capturer, capter tout de suite l'écoute, nos sens, nos attentions flottantes – les faire flotter, précisément, au faîte de leurs remous. De leurs secousses faussement douces. Faussement, trompeusement – parce que, lentement, se dessinent les écarts, parce que bientôt s'élèvent les dissonances. Foxeagle – Émilie Célarier – sait en jouer, de celles-ci (dissonances), en user avec subtilité autant que brutalité, frontalité, de ceux-là (écarts, glissements, ruptures). On se croit parti pour un gentil voyage – du côté d'un certain post-rock. Et il y en a, oui, sans doute, là-dedans. Mais il faut se rappeler, alors, combien cette musique, au départ, chantait aussi les affres les plus proches, les plus concrets – n'étalait pas seulement de grands vols planés au-dessus de désolations lointaines. (Bonjour, matin, au capitaine, comme disaient d'autres, quelques années, décennies, avant ; celui d'un vaisseau dans la tourmente, en perdition, plutôt que le vague pilote d'un avion affrété par un quelconque Arthus-Bertrand).
Les dissonances, donc, les cassures, torsions de rythmes et d'harmonies, de mélodies bouclées. Émilie Célarié les décoche toujours à l'instant idoine – celui où ils brisent, font l'encoche irréversible dans les cycles purs qu'une seconde avant elle tenait entre deux airs. Purs mais finalement voilé – on s'en rend compte, ça aussi, à mesure que al visions s'ajuste, s'adapte çà l'étrange obscurité, voit mieux les formes qui se découpent. Le chant ne promet rien. Il décrit – les transports et les heures calées, arrêtées, bloquées. On pourrait le trouver dur, froid. On pourrait au contraire lui trouver une accueillante chaleur. Il ne vous dit pas quoi en penser – il n'indique pas qui de ceux et celles-ci, celles ou ceux-là, tenants de l'une ou l'autre hypothèse, perception, auraient raisons. Il décrit, conte de l'intérieur, le ton neutre et l'angle de vue subjectif (forcément subjectif). Il ne livre rien. Il ne cache rien. Elle parle de constance. Du syndrome de Stendhal celui où une œuvre, contemplée, happe le spectateur, la spectatrice, où l'on se retrouve piégé.e (dans l'image, dans le temps et le climat de la scène, soudain... Dans le son). Elle parle de la facilité du monde – et de l'inéluctabilité presque mathématique des empêchements, de la gêne. Elle parle aveuglements, paralysies. Elle parle des lignes rompues et de convictions enfouies – mais toujours vivantes, tenues là, sous la chair, dans les os, les corps.
Il y a de la lumière, aussi – aveuglante, parfois, vertigineuse – dans cette musique. Et qui jaillit, précisément, dans ces trouées, ces notes qui viennent – supposément, théoriquement fausses – percer la géométrie par ailleurs impeccable, implacable, des compositions. Vertigineuse parce que la radicalité de ces flashes – dans ce décor à l'indifférente, à l'imperturbable beauté – déstabilise, sors de la narcose où l'on croyait sombrer. Sans cela, d'ailleurs, on n'y prendrait sans doute pas gare – on se laisserait couler sans trouver à y redire. C'est au fond plutôt ça – plutôt que l'un ou l'autre écueil – le vrai danger. Ce Grand Calme, je veux dire – qui pourrait nous envelopper, jusqu'à escamoter toute trace de mouvement, de conscience résiduelle. S'il n'y avait ces accrocs – ces déchirements dans le voile.
Puis How Long, à la fin. Qui scande lourdement – qui soulève la poussière, la disperse en frappant le sol, inlassablement, martèle comme une machine... Mais la machine ne souffre pas – et la voix, au contraire, dit qu'elle a mal d'avoir trop attendu, que la charge est devenue... Insupportable. Plus longue sera la chute. Comme un chemin de Sisyphe renversé, sans fin roulant vers le rivage, hors ou vers les autres vivants. « Vois comme tout était fragile/Et j'ai passé tellement de temps à... Attendre ». Et nous pensions passer nos tares et tous nos doutes comme une autre cargaison. Et nous croyons encore qu'une lampe brûlera, au porche, nous indiquant enfin où nous pourrons nous déposer.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
(How Long, dedjiou, cette fin de disque...)
- Note donnée au disque :
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Il flotte depuis ce matin tôt si ce n'est depuis la nuit voire depuis des jours encore, je ne suis plus sûr... Moi je dis que c'est l'écoute répétée de ce disque qui a déclenché ça, pas l'inverse.
Message édité le 09-09-2024 à 17:47 par dioneo
- Note donnée au disque :
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Hum, c'était juste un mauvais jeu de mots sur cailloux/stones/stoner, hein !
Sinon à ma connaissance elle n'est pas dans d'autres groupes, mais c'est seulement à ma connaissance ! Elle a sorti un 7" split avec un groupe nommé Mona Kazu mais ce n'est pas une collab à priori, à proprement parler, et il semble qu'elle et les gens de L'Engeance (le collectif) soient proches, mais sans qu'elle en soit membre. (C'est pas illogique d'ailleurs vu qu'elle vient de Dijon - apparemment relocalisée à Lyon si j'en crois son bandcamp - et qu'eux et elle ont sans doute, disons des traits assez compatibles dans leurs univers respectifs). J'aimerais bien entendre ce que ça donne en concert, sa musique - je l'ai ratée un coup à Besac, au Bastion, à un moment où je n'avais encore jamais écouté le disque...
Message édité le 08-09-2024 à 16:04 par dioneo
- Note donnée au disque :
- Alfred le Pingouin › Envoyez un message privé àAlfred le Pingouin
Pas stonère, vraiment caillouteuse. J’imagine bien la guitare à plat, et les cailloux balancés sur les cordes (même si je sais que ça a pas le même son, je l’ai essayé, le faites pas c’est décevant). Je trouve ça très beau en tout cas, mais plus que la mer, ouais c’est des rochers que ça m’évoque. Elle est dans d’autres groupes/collectifs/amicale des sismographes ?
- Note donnée au disque :
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Ah... Tu la trouves stonère ?!
- Note donnée au disque :