Vous êtes ici › Les groupes / artistesDDunaj › Dudlay

Dunaj › Dudlay

cd • 16 titres • 54:55 min

  • 1Ouvertura III4:45
  • 2Je Čas2:52
  • 3That Is Sure2:28
  • 4Pslední Noc2:59
  • 5V Kamenií A Hlíně3:44
  • 6Jednou3:14
  • 7Tak Se Neboj2:54
  • 8The Last Day3:32
  • 9Je Mi Líto2:35
  • 10Řev3:32
  • 11Touch Me4:19
  • 12Wahoo4:07
  • 13Why Cannot3:20
  • 14Podzim2:37
  • 15The Circle Has Closed4:04
  • 16Butterfly2:53

informations

Enregistré au studio Audioline en 1992.

line up

Jiří Kolšovský (voix, basse, guitare), Josef Ostřanský (guitare), Vladimír Václavek (basse, guitare acoustique), Pavel Koudelka (batterie)

chronique

Nous revoilà plongés derrière ces horizons gris-noirs, encerclés de lignes rouges, de signaux bleu-arc-électrique. L'atmosphère est tendue, chargée, les arêtes menaçantes mais belles. Le monde est une immense et inextricable architecture – brutale, brutaliste, avec dans les déchirures, les crevasses, au fil des rues percées, des cathédrale et des écoles, des refuges, des caves, des bistrots, des anges et des démons, des ducs, duchesses, rois et vassaux, des allégories prolétaires penchés aux bords des chapiteaux.

Dudlay est un solide encore plus incassable, peut-être, au moins aussi dense que ne l'était Rosol, le précédent album. Un paquet de cris et grincements, de rythmes complexes et concrets. Encore plus cinématique – bobine expressionniste où l'intrigue, les épisodes, se muent en purs mouvements et se fixent en tableaux, intenses au point qu'on s'attend à les voir imploser. Pourtant rien ne s'effondre. Tout progresse, tout avance. Le son fauche. La batterie fait encore la machine – on est moissonné, transformé, la perception disloquée/rassemblée. Le groupe n'est déjà plus tout à fait le même – séparé après Rosol, reformé avec une partie des mêmes membres, certains partant, d'autres arrivant – mais l'intention (acharnée mais mutique) ne semble pas avoir changé.

Ce disque est tendu, oui. Bruyant, post-industriel au sens historique – pas dans celui, seulement d'une taxinomie musicale un peu vaine. Il ralenti, parfois – retourne aux tessons outre-folk, outre-classiques des tout-débuts, du disque avec Iva Bittová. Ce sont ces moments là, aussi, qui sonnent peut-être le plus... Synthétiques, science-fiction – les textures et soli tordus de guitares traitées, d'un prog étranglé, venimeux, viennent y étaler leurs taches corrosives, ronger les paysages, infiltrer l'air des foyers, des cours. C'est un drôle d'équilibre – on sent que sur une inflexion, le groupe, la musique, pourrait déraper dans un rock figé, rejoindre justement les cohortes néo-progressives de n'importe où, s'enliser dans la virtuosité, la démonstration. Mais non, pas ici. Ça reste pour ça trop compact – suffoquant. Ça reste hanté, habité d'inquiétude. Dunaj n'a pas cessé de jouer dans – et avec – ces zones escamotées, semi-dissimulées, vaguement ensevelies sous leurs formes monticules. Cette obscurité séduisante et peu rassurantes – on pourrait s'y camoufler, on pourrait y disparaître.

Comme Rosol, Dudlay est d'une netteté qui claque aux sens, à l'entendement. La définition, la focale, la photographie, ne sont pas les mêmes – mais l'image nous absorbe pareillement, autant, nous intègre encore à ses perspectives. Parfois le son se fait si épais – Je Mi Líto – qu'on craindrait d'y sombrer, de se trouver avaler sous les chutes, les montages de métal. (Le titre veut dire « je suis désolé » – mais cette musique l'est comme un terrain vague brûlé par la chimie, au moins ou presque autant qu'au sens de « nous aurions préféré qu'il en soit autrement »).

Les parties en anglais, au vrai, sonnent un peu plus histrioniques – pas parce qu'elles rendraient moins juste, plutôt comme si, usant de cette langue du dehors, y cherchant l'ouverture, la voix, en même temps, réalisait la distance à couvrir, le plus grand fracas qu'il lui faut traverser. Cette voix, cette langue, cette musique cherchent. On peut avoir l'impression, par moments, que cette liberté cette fois entièrement trouvée, en théorie – Rosol était déjà sorti « en république » mais il est probable que la musique qui s'y jouait ait été en grande partie conçue à l'époque soviétique – brûle les mains des musiciens (comme sur Podzim, explosion d'une violence quasi punk, presque hardcore). On sent que se posent de grandes et de très pragmatiques questions quant à la suite. Que faire ? Comment être certain de ne pas rentrer dans le rang – ceux des polices culturels à priori dissoutes, ceux d'un grand marché prêt à tout avaler ? Dunaj continueraient. Bittovà, justement, et Pavel Fajt, membres des premiers jours, les rejoindraient parfois. Quelques autres disques suivront. Le monde, en effet, s'empresserait d'absorber ce qui de là, de ses lieux et d'autres, pouvait désormais passer, s'écouler. D'autres, bientôt – partant d'un autre point, légèrement ou beaucoup plus jeunes – allaient faire d'autres scènes, véhiculer d'autres cauchemars, doutes, affirmations et projections.

Dudlay n'est le crépuscule ou l'aube de rien, sans doute. Il est encore un moment qui se tient, seul – où rien ne devient, en rien... Facile.

Bon
      
Publiée le samedi 10 août 2024

dernières écoutes

Connectez-vous pour signaler que vous écoutez "Dudlay" en ce moment.

tags

Connectez-vous pour ajouter un tag sur "Dudlay".

notes

Note moyenne        2 votes

Connectez-vous ajouter une note sur "Dudlay".

commentaires

Connectez-vous pour ajouter un commentaire sur "Dudlay".

Rastignac Envoyez un message privé àRastignac
avatar

très métronomique et plaisant

Note donnée au disque :