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Caesarean › Cougar
- 2019 • Autoproduction (pas de cote) • 1 Téléchargement Web
téléchargement • 5 titres • 36:27 min
- 1Cougar9:41
- 2Space 12:31
- 3Untethered11:42
- 4Space 22:45
- 5It Was Cold9:48
informations
Enregistré, mixé et masterisé par Nicholas Wilbur au studio The Unknown, Anacotes, Washington.
line up
Jim Angell (basse), Pat Donaghy (guitare), Dan Fiordalis (synthétiseur), Chip Rountree (guitare, voix), James Smith (batterie)
chronique
L'air, en si grand volume, au-dessus de nous – loin là-haut oui mais en contact immédiat, aussi, quand on y pense, avec nos bitumes, nos murs, nos toits, nos occiputs... Ça doit finir par chiffrer, question masse – ça se dénombre en unités dont je n'ai même pas idée (ni du nom ni de l'ordre de grandeur que ça peut représenter, même – trop immense, trop démesuré pour mon pauvre entendement terrestre).
Caesarean jouent une musique lourde et planante – au sens de l'effet qu'elle produit comme dans celui de l'allure qu'elle adopte (« planante » comme adjectif ET comme participe-présent, en somme). Des riffs metal, doomy, stoner, des synthés liquides, gazeux, atmosphériques – et pour cette fois on prendra le mot dans son sens le plus littéral, « l'atmosphère comme mélange où se tient la matière ». Rêche, la matière – blocs bruts et textures bien en reliefs, cristallisées, parfois friables, parfois dures, que rien ne semble pouvoir entamer. Une musique cosmique, oui, et sans doute marquée par une certaine idée, pris dans un certain flux du « post » - post-core, post-metal, post-rock. Seulement, ici, on ne s'attendra pas, pour autant, à tomber sur un énième clone de Neurosis, d'Isis, de Pelican. En vertu de ce riffing, précisément – metal, doom, au fond très ancré rock. Rock américain. Rock du nord-ouest américain – les types sont basés à Seattle. Rock très porté sur les grands espaces – désolés si on n'y voit que l'absence humaine, foisonnants si on sait, même à cette distance, voire la faune qui se meut et se cache, la flore qui pousse et fane, les bouffées de pollens et les détails des minéraux, aussi, les figures et variations, les ruptures et transitions dans les ensembles. Cette musique – à mon oreille – n'a rien d'une bande-son d'apocalypse, prophétie avant ou tableau d'après, peinture d'un enfer. Elle est détachée de ça – ou bien trop immergée dans les structures temporaires (qui à notre échelles paraissent éternelles, immémoriales) des secteurs du chaos qu'elle explore, survole, traverse, par où passent ces cinq plages. Riffing solide, donc. Et du côté de l'électronique, des synthés, précisons : du planant, certes, de l'enveloppement. Mais du construit – des mélodies, aussi, des nuages harmoniques qui n'ont jamais rien de flou. Curieusement, on dirait que ces Américains ci on dû écouter mieux – plus en profondeur, disons – les anciens des musique européennes électroniques que nombre de groupes post-black, par exemple – ou black-gaze, space-black etc. – du continent d'en face. Car ces nappes, là, ces progressions, sont intégrées comme des éléments tout aussi concrets – structures et ouvertures – que les riffs, la batterie, là où chez d'autres, ils n'existent, souvent, que comme enrobage, images sans épaisseur.
Si jamais vous doutiez, au fait : cette musique, aussi, libère de forts effluves psychotropes, psychédéliques. Pas seulement pour les effets – leslie et réverb franchement seventies – sur la voix, par exemple, de la plage finale, It Was Cold. Mais parce que, surtout, l'air de rien, elle refaçonne en direct, le temps de l'écoute, la perception – temporelle, chromatique... Elle s'en empare, nous plonge dans sa clarté soudain accrue, sa distorsion, ses déformations, nous avale dans les zones opaques. It Was Cold, tiens... Chaque fois je me fais la réflexion, vers les deux, trois dernières minutes, que ça pourrait être une reprise de The Cure, entreprise avec la sensibilité de gars de la région plus tôt évoquée – et qui se seraient aussi bouffé le Black Sabbath des cinq ou six premiers albums mais sans, pour une fois, en faire l'unique trauma, le seul horizon, indépassable. The Cure, oui, vraiment – période Disintegration. « Il faisait froid », dit le titre, mais là on se sent comme lové dans un cocon, la pluie est nourricière et les émanation de la terre en train de geler nous abreuvent, et l'on entend qui crépitent les radiations cosmique mais on sait que ce ne sont que nos sens qui s'agrandissent, poussent en sondes ; qu'on n'y sera jamais, nous, corps flottants, réellement, complètement exposés.
Je trouve ça beau, Caesarean, d'une beauté douloureuse, par moments – sans jamais rien de larmoyant, sans jamais rien, encore une fois, d'une lamentation molle, neurasthénique, au bord du monde ou de la fin des temps. Ça se traduit par « césarienne », au fait, si jamais vous vous demandiez, ce nom – comme dans ces accouchements où l'on doit aider l'enfant à sortir en ouvrant, au scalpel, l'abdomen et l'utérus de la mère... Je ne trouve pas non-plus, cependant, que la musique de ces types sonne comme une ode aux cicatrices que ça laisserait, ce genre d'opération, la supposée beauté dans la souffrance de celles qu'on incise ainsi. De la violence d'être au monde, oui, en revanche, ça me parle. De ce qui répare, aussi, des rayonnements et des trous noirs qui absorbent en leur oubli, des trous des vers qui nous permettent d'aller, de passer ailleurs. De l'indifférence, à tout ça, de ce qui nous surplombe et nous entoure. Et puis pourtant, des tentatives – je crois que ce disque en est une, modeste et démesurée, comme toutes celles-là – de nous y reconnecter. Localement, temporairement. « Non-attachés » (décidément) comme ils disent, mais à jamais part (minuscule) de tout ça, qui nous ignore ou nous aime ou nous déteste et devra, peut-être, à un moment ou l'autre, nous détruire. Magnifique, d'ailleurs, ce morceau – Untetherd, qui est celui par quoi j'ai découvert le groupe. Apaisant et tourmenté, étiré mais dense à l'en toucher, progressif et massif et aéré. Aérien et pesant, on y revient.
Aérolithe ? Peut-être bien, ou son empreinte, gravée en creux, en négatif dans le cratère. On en entame la lecture – et c'est nous, bientôt, qu'elle déchiffre.
Dans le même esprit, Dioneo vous recommande...




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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Oui, le synthé... Et comme dit dans la chro, je trouve que le contraste entre l'approche bien américaine du truc et ces sons électroniques "direct depuis Berlin circa '72/'76" fait que ça ne sonne pas du tout comme des trucs black-doom-death de l'espace faits en Allemagne, en Suisse ou ailleurs de notre côté de l'eau. C'est un des groupes - avec le Bell Witch/Aerial Ruin mis en reco et quelques autres - qui m'avait tapé dans l'oreille quand j'ai écouté le Weedian : Trip to Whashington. Très facile à écouter oui mais en effet pas vide, y'a vraiment de la substance dans cette musique.
Message édité le 13-10-2023 à 13:45 par dioneo
- Note donnée au disque :
- Raven › Envoyez un message privé àRaven
Pile-étoile ce qu'il me fallait après cette chaude journée d'octobre à traîner ensuqué, ça dérive tranquille avec la pointe de frisson, ultra-familier mais pas lisse-générique non plus, et le liseré de synthétiseur n'y est pas pour rien...