Le temps apporte parfois la revanche à certain(e)s. Si U2 ont admirablement négocié l’entrée dans les 90’s grâce à des options de carrière audacieuses, ils ont eu plus de peine à retomber sur leurs pattes livrant aujourd’hui des disques convenus (ça, c’est pas tant le souci) mais surtout plats et sans saveurs. The Alarm auront vécu l’inverse, eux qui admiraient tant les Irlandais qu’ils se baptiseront comme un hommage ne résisteront pas aux bouleversements des années 90. C’était peut-être leur force après tout, ne pas se trahir, rester fidèles à leur son ? Je ne sais pas mais ils sont maintenant ce que U2 n’est plus, un groupe motivé et motivant. La discographie du groupe donne à écarquiller les yeux mais si l’on écrème des live, compilations, il n’en subsiste qu’une douzaine (encore qu’il n’est pas toujours clair quand c’est The Alarm, Mike Peters and the Alarm ou The Alarm MM+), ce qui est déjà très honnête. Surtout que depuis 2017, ça n’arrête plus. Il faut dire que Peters a frôlé la mort, lui qui s’est découvert une leucémie lymphoïde chronique en 2005. Mais l’homme est un battant, il en profitera pour monter une fondation de lutte contre le crabe et donnera même un concert au camp de base de l’Everest avec d’autres pour récolter des fonds. Est-ce cette proximité avec la faucheuse ? Notre Gallois n’a jamais été si motivé et franchement, le voir jouer est un plaisir (et il en donne des concerts !). Après avoir lâché le combo à l’orée des 90’s, j’étais curieux de franchir le grand saut et de voir comment ils sonnent de nos jours, en faisant l’impasse sur le milieu de carrière noyé dans les lives. Et franchement, il n’y a pas de quoi rougir: si U2 sont devenus fades, The Alarm n’ont jamais si bien fonctionné. Rien que ce premier titre, ‘Blood red, viral black’ (judicieusement choisi pour un clip), qui fait coucou à New Model Army version U2 donne envie de se plonger dans l’album. Pour autant, le groupe (en réalité Peters et ses zicos) n’ont en rien renié leur style, ajoutant de l’électricité en lieu et place d’un certain lyrisme ainsi qu’une discrète touche de clavier assurée par madame Peters. Franchement, les pépites s’enchaînent, servies notamment par le jeu de batterie tribal mais subtil (le fantastique ‘Brighter than the sun’ qui revendique un certain héritage glam dans sa rythmique, les ajouts de percussions de ‘Time’...) mais aussi par de belles parties de guitare (Bill Duffy est même invité sur le premier titre). Peters est plus fin et moins héroïque dans son écriture; du coup, les arrangements s’en ressentent, riches sans excès ou dépouillés selon les parties. Naturellement, on a droit à quelques chansons plus calmes mais elles ne sont pas si casse-bonbons car notre homme est au top niveau chant et quelques trouvailles (percussions, choeurs, notamment) équilibrent souvent. L’autre qualité de ce skeud est qu’il ne sonne pas du tout passéiste, électrique certes comme se doit d’être le rock mais il est moderne dans sa production. Un historien, Martin Johnes, affirmait que The Alarm appartiennent à l’histoire contemporaine du Pays de Galles… Comme U2 pour l’Irlande ? Absolument et c’est mérité.