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Screaming Trees › Clairvoyance
- 1986 • Velvetone Records VST 86002 • 1 LP 33 tours
- 2005 • Hall of Records HOR112 • 1 CD
lp/cd • 10 titres • 37:45 min
- 1Orange Airplane2:59
- 2You Tell Me All These Things2:11
- 3Standing on the Edge5:38
- 4Forever4:21
- 5Seeing and Believing3:32
- 6I See Stars4:31
- 7Lonely Girl3:06
- 8Strange Out There4:27
- 9The Turning2:42
- 10Clairvoyance4:05
informations
Produit par les Screaming Trees et Steve Fisk.
line up
Gary Lee Conner (guitare ; orgue sur You Tell Me All These Things), Van Conner (basse), Mark Lanegan (voix ; violon sur Strange Out There), Mark Pickerel (batterie)
Musiciens additionnels : Steve Fisk (piano sur Lonely Girl et Clairvoyance, orgue sur Turning), Joey Conner (voix sur Orange Airplane), Michael « Pete » Peterson (chœurs sur Lonely Gil)
chronique
Joli bordel, ce premier Screaming Trees ! Orange Airplane commence – et reste bruité tout au long – par d'insupportables cris de gosse. Lanegan ne chante guère mieux que le mioche qui s'égosille – un comble quand on sait ce que deviendra le mec, sa carrière à venir de crooner en bois rincé, patiné par les intempéries. (Et la bibine et le reste, OK... On sait). Ceci dit, Lanegan, au départ, était venu là pour faire le batteur – seulement le gars était, selon ses propres termes, « tellement merdique » à ce poste qu'ils l'ont foutu derrière le micro. Alors allez.
Alors allez : Clairvoyance, oui, part dans tous les sens. Le son pue le garage, les zigotos ont nettement bouffé de ça – la version sixties de la chose, compiles nuggets et compagnie – ça se ressent dans l'écriture, dans le jeu encore un peu ou beaucoup plus que ça raide, là-dessus. Tout est encore très brut – mais tout, aussi, est déjà bien tracé, dessiné, refrains/couplets/ponts, riffs et patterns au petit poil. On a l'impression, en fait, que les mecs n'ont pas encore tout à fait les moyens techniques de jouer comme ils voudraient ce qu'ils écrivent, composent. Pas le temps – on apprend les morceaux en même temps qu'on les enregistre, ou en tout cas c'est l'impression que ça donne. On dirait bien aussi – question de planning serré parce que de budget pas moins, encore ? – qu'ils ont systématiquement gardé la première ou deuxième prise, quelques soient les défauts restants, ce qui aurait pu être peaufiné, amélioré, pour la bonne raison qu'il n'y en a jamais eu de troisième... Et puis d'ailleurs : améliorer quoi – à quoi bon refaire du moment que tout y était ?
(De fait, si, tiens : il sait déjà chanter, le Mark, même très bien quand ça le prend – c'est seulement que d'autres fois c'est « bah non, pas sur celle-là, trop tard et puis tant pis »).
Par moments, on dirait une démo retrouvée du Mudhoney des débuts, ce disque – c'est dire si c'est cru et si ça va à l'essentiel. (Puis au fait, Touch Me I'm Sick ou Superfuzz Bigmuff, les « séminaux » singles desdits, comme on dit, ce ne sera que deux ans plus tard...). Parfois la batterie, le tempo s'emballe sans s'assouplir, et Lanegan a de nouveau du mal à suivre, son timbre frôle l'étranglement – et c'est magnifique de fraîcheur et de ferveur fofolle, ahurie, ce Lonely Girl, avec Gary Lee Conner qui fait s'exciter les arpèges acides... Parfois ça ralentit dans une espèce de ballade à la Doors débarrassée de tous les oripeaux, Lizard King etc. – et la voix de Lanegan comme le reste, cette coulée musicale qui s'étale, gagne l'espace, de sous la flanelle sale commence à s'exhaler ce parfum de miel sauvage et de cèdre mêlés de rouille, de cendre, de sciure... Et qu'est-ce qu'elle est COOL, cette Strange Out There, brise de crépuscule tranquille où vient enfin le froid – avec ce rire à la fin qui désamorce tout pesant mystère !
Clairvoyance sature de partout. Vraiment, par moments, on dirait presque des bandes sorties des sixties – on y croirait presque, si telle ou telle tournure ne nous mettait pas la puce à l'oreille, ne fleurait pas sous l'excitation cette note de... Clairvoyance (… oh oh oh …) désabusée qui fleurirait bientôt sur la scène locale, chez les pairs de ceux-ci, quand tous joueraient ensemble, avant que le truc n'explose, qu'on appelle ça un « phénomène », qu'on baptise ça « grunge » et que tout le monde comprenne, entendant ça, de quoi il s'agirait (Vraiment ? Malgré le vague ? Peut-être bien, surtout en vertu de ce vague, du relâché de cette cohérence !). Clairvoyance déborde, dérape, débarque les mains dans les poches, débloque, quand c'est leur humeur. Juvénile, à l'arrachée voire à l'arrache, à jamais imperméable aux déferlements d'une gloire même posthume, impropre au rangement dans l'une ou l'autre de ces boîtes étiquetée « classique du », « indispensables de »... Clairvoyance, à la place, reste à jamais campé dans sa fraîcheur instantanée, pas fait pour impressionner – peinturluré de ses teintes fluo barbouillées à la va-vite. La clé est sous la pierre descellée, juste à côté du seuil. On y vient quand on veut. Ça sent toujours un peu la clope et le pétard froid, les fonds de verres laissés là et les draps pas souvent changés, mais ça reste accueillant quelle que soit la saison, personne ne va venir casser l'ambiance. On s'y pose des questions cons mais sans lourdeur ni portée funèbre... Du genre « au fait, les Byrds, ils connaissaient déjà le fuzz, ou quoi ? ».
Et puis les harmonies, sur The Turning, infléchissent encore le cours de la pensée, et on se laisse porter, rouler dans cette espèce farfisa qui fait cascade et cette allure de leslie qui tortille la guitare.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
J'ai une préférence pour celui-là, de cette période, mais sans doute en partie parce que c'est celui avec lequel j'ai découvert ces débuts, longtemps après Sweet Oblivion, qui a été longtemps le seul que je connaissais... Suis un peu moins preneur de Even if and Especially When mais c'est à un poil (laissé dans la douche) près, et vu que je me replonge dans tout ça pour les chros (et avant pour le Twitch grunge qu'on a fait avant-hier), y'a moyen que certaines notes bougent quand j'aurai refait le tour de la disco un peu à fond ! (Oui, c'est empirique, le chronicage, ici... Et je pense que celui-là va tout de même garder son 5, avec son côté dépenaillé/ébouriffé façon poussin même pas encore sec...).
Message édité le 15-09-2023 à 18:26 par dioneo
- Note donnée au disque :
- torquemada › Envoyez un message privé àtorquemada
Cool de compléter les Trees. J’aime beaucoup certains album pré « Sweet Oblivion » mais si celui-ci a 5, je ne sais même pas combien noter les autres.