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Spacemen 3 › Dreamweapon
- 1990 • Fierce Recordings Fright 040 • 1 CD
- 1990 • Fierce Recordings Fright 042 • 1 LP 33 tours
- 1993 • Sympathy for the record industry SFTRI 211 • 1 CD
- 1995 • Space Age Industry ORBIT 001 CD • 1 CD
- 1995 • Space Age Industry ORBIT 001 • 2 LP 33 tours
cd • 3 titres • 69:30 min
- 1An Evening of Contemporary Sitar Music44:21
- 2Ecstasy In Slow Motion9:27
- 3Spaceman Jam15:42
informations
An Evening of Contemporary Sitar Music: enregistré le 19 août 1988 au Watermans Art Centre, Brentford, Londres. Ecstasy In Slow Motion : enregistré au V.H.F. Studio ; Rugby, Angleterre, au printemps 1987. Spaceman Jam : enregistré « à un moment donné de 1987.
L'édition CD Fierce Recordings de 1990 ne contient que le titre An Evening of Contemporary Sitar Music. L'édition LP sortie la même année par le même label propose la même plage en face A, et le morceau studio Ecstasy In Slow Motion en face B. La réédition CD Sympathy for the Record Industry de 1993 – celle ici chroniquée – propose en plus le morceau Spaceman Jam. Les rééditions (CD et LP) Space Age Industry de 1995 reprennent les morceaux de l'édition Sympathy for the Record Industry, en ajoutant un Ecstasy Live Intro Theme de 8 '15'', avant Ecstasy In Slow Motion.
line up
Will Carruthers (basse [vibrations]), Jason Pierce (voix, guitare), Sonic Boom (voix, guitare, orgue), Steve Evans (guitare)
Musiciens additionnels : Pat Fish (roulage de joints)
chronique
Curieux live, cette première piste – la seule présente sur la première édition (CD) du disque. Une performance enregistrée dans un centre d'arts, avant la projection du film Les Ailes du Désir de Wim Wenders ; sans batteur mais avec un troisième guitariste, concitoyen (Rugby, Warwickshire) des membres du groupe eux-mêmes – Steve Evans, futur Spiritualized avec le ci-présent Jason Pierce. La pièce est censée être un hommage à La Monte Young, voire une reprise – mais on y reconnaît des riffs (ou leur amorce) présents sur le troisième album du groupe, Playing with Fire, encore à sortir au moment de ce concert. Les micros, au début, captent les voix de spectateurs qui bavardent, des bruits extérieurs semblent persister tout au long, parole encore, cri d'enfant, sons de couverts ou d'autres objets qui s'entrechoquent. À part ça... Une sorte de calme étal, de progression presque imperceptible, cycle qui prend le temps, tout son temps, tout le notre, très doucement, toute notre attention.
Je disais « riffs », on pourrait dire plutôt « cellules ». L'une qui commence à boucler – parce qu'un des trois guitaristes la joue ainsi ou parce qu'un des mêmes à enclenché le looper. L'autre qui la continue, la complète, tisse par-dessus, dessous, à travers, avec son dessin. Ça pourrait être ennuyeux, flou, mais non – ça habite à la place l'espace, l'investit, s'insinue dans la lumière de celui où nos sonos domestiques nous restituent la chose. Quelqu'un cause dans un micro, à la périphérie d'un de ces entrelacs de cercles dans l'eau, de volutes – et bien-sûr, que ça sonne comme l'annonce d'un steward, d'un commandant de bord de nef spatiale ! (Ladies and Gentlemen We Are Floating In Space?, comme dira plus tard un autre titre d'un des types ?). Les effets jouent au ping-pong avec les phases, les notes, pétrissent et étalent cette musique élastique, tendre et ferme, sans forme fixe mais toujours d'un seul tenant, dans l'enceinte du temps où ça se passe. C'est très limpide et très incernable, ravissant – au sens plein d'une acception très particulière du terme : « qui emporte, mais sans violence aucune ». Il semble que sur la version vinyle du disque, la lecture se fasse « à l'inverse » de l'habitude – du centre du disque vers sa circonférence. Facétie... Il pourrait n'y avoir que cette pièce, sur le disque... Mon plaisir d'écoute s'en contenterait. Parfaitement.
…
Il n'y a pas que cette pièce-là, sur la plupart des éditions de l'objet. Il y a ces deux autres probables improvisations – expérimentations qui annoncent quelque peu ce que feront plus tard les mêmes gars, ensemble ou chacun de leur côté (Jason Pierce avec Spiritualized, donc, entre autres ; Kember/Sonic Boom avec Spectrum ou Experimental Audio Research, entre... Pas moins d'autres). Ecstasy In Slow Motion – qui dit son idée dans son titre, qui drone en nappes, scintille et vortexe (oui... ça en fait un verbe, ce genre de processus – je vortexe et tu vortexes, nous vortexons, ça vortexe jusqu'à ce que la bonde se remette « naturellement » en place, qu'on se tienne entre deux eaux, dans un fond résiduel de liquide-cosmos à température corporelle...). Bien entendu, ça ne va nulle-part – pas besoin, puisque ça vibre déjà partout, sur toute la surface, dans toute la profondeur de la masse et aux contours enveloppants des vides. Sur la Spaceman Jam, ensuite, il y a du souffle – comme si c'était enregistré à la maison ou au studio de répète (rien ne nous dit d'ailleurs que ça n'est pas le cas). Du souffle et deux guitares – probablement, difficile d'en être certain, presque pas de crédit, pour celle-ci. Presque pas – ou pas du tout – d'effets, non-plus. Les filés, les canevas de notes dérivent, croisent, desserrent leurs mailles sur un riff monotone – au sens propre, une seule corde, il semble, frappée pas trop fort mais d'un geste sec, régulier, sur une seule case ou peu s'en faut. Et des friselis, qui s'ébattent et cherchent, reviennent, enroule et déroulent autour de ce simple fil. Le rendu, décidément, à quelque chose de « domestique » – pas d'échange volontaire ou non avec un public, cette fois, rien d'autre qui passe dans les, le micro, puisqu'ils sont deux, disais-je, au maximum.
À la fin, l'un des deux rit – une espèce de ponctuation à ce qu'ils viennent de jouer, d'essayer, une sorte de « wow, c'était cool » peut-être un peu incertain. Je ne suis pas sûr que l'autre, s'il existe, lui réponde, que l'écho en retour soit autre chose qu'un écho, justement. L'élocution – il y a des bouts de paroles indistincts, si – sent encore une fois la défonce. En faut-il, pour apprécier tout ce qu'on vient de s'envoyer, à la seconde ou s'arrête le son ? Je ne crois pas, ce n'est pas forcé... De toute façon rien ici ne force – et je vous l'écrit d'ailleurs très clair, abreuvée d'une eau de même non-mêlée. Reste que oui : cette fois encore, l’apesanteur de leur musique m'a gagné. Ça ne fait pas cher la fusée – et par comparaison, un très minime impact carbone.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Ça y est, j'ai lu l'article et en effet c'est "éclairant", on comprend mieux ce qui se passe dans cette partie "live" en milieu ouvert du disque, eh eh... Assez drôle, aussi - avec cette conclusion qui n'arrive pas à me faire trouver qu'il manque un truc à la perf, à la longue plage (alors que... Bon, je ne spoile pas non-plus, ça vaut le coup d'être lu en entier, le style est cool en plus).
- Note donnée au disque :
- Sartoris › Envoyez un message privé àSartoris
L'article de Carruthers donne effectivement une compréhension approfondie de cet événement de musique contemporaine sitarée. Et le livre (Playing bass with three left hands) vaut son pensant de mâchoire qui tombe, de sourcil qui se relève et de cacahuètes cosmiques. A noter que Carruthers a aussi joué avec Brian Jonestown Massacre (Aufheben), pas sûr que ce soit là qu'il puisse retrouve un nombre normal de mains.
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Et qui était aussi (McLise) le premier batteur du Velvet, avant qu'ils sortent quoi que ce soit... Barré du groupe, de mémoire, parce qu'il trouvait que ça prenait un tour trop pro, ce qui ne collait pas avec son éthique de clochard céleste... Et oui, j'avais lu quelque chose dans ce goût, pour l'histoire du texte/du titre mais je n'étais pas sûr du sens exact d'emboîtement des pièces, merci pour la précision ! Je vais aller voir ton lien tout à l'heure, suis curieux de cette "mise en contexte", tiens même si j'aime ce morceau tel-quel quoi qu'il en soit...
Message édité le 14-06-2023 à 09:55 par dioneo
- Note donnée au disque :
- Alfred le Pingouin › Envoyez un message privé àAlfred le Pingouin
Cet article du bassiste Will Caruthers extrait de son bouquin raconte l'expérience de ce live, une certaine idée du vide, je te divulgâche pas la fin, c'est tout simplement extraordinaire, et quelque part la meilleure musique du monde ça se joue entre soi et soi, en feedback. Je me demande si le rire qu'on entend ne vient pas de lui justement.
Par rapport à La Monte Young, c'est uniquement un texte recopié, y a pas de reprise en soi, ni grand chose à voir en termes de composition si ce n'est le bourdon et le temps dilaté. Le titre est une référence à du enregistrement du musicien Angus McLise, qui était aussi dans l'ensemble de Young, le Theatre of Eternal Music.
Message édité le 14-06-2023 à 09:28 par Alfred le Pingouin
- Note donnée au disque :