Gorod › The Orb

Le death metal technique, tu sais ce qu’on dit, faut que ça glisse et puis que ça transpire. Dans cet art subtil, Gorod compte parmi les meilleurs et il ne faut pas se fier au premier titre qui te verse un saut de doubles-croches sur la tête. Mais dis-donc, comment faire respirer un album de death metal ? en faisant des ponts à base de tapotage délicat du manche, par exemple, ou en faisant un morceau entier en mid-tempo et voix calme. Attention, on n’est pas chez Slipknot, pas question de poser du refrain de stade. Ici, le riff est roi et les solos colorés, précis et inventifs feront dire aux mauvaises langues que c’est du death de conservatoire. Les paroles vont aussi dans ce sens intellectualisant avec des réfs à Hegel ou à l’Ancien Testament. On y parle d’hybris, d’égoïsme, de croyances et sans doute de fin du monde. Ah, revoilà un peu de mort intercalée dans ces ponts qui font parfois vibrer ma corde d’amateur pas toujours assumé de metal instrumental virtuose. Je fixe la pochette qui s’anime alors, l’hypnose prend forme. Aie confiance. Oui, souvent, Gorod, c’est beau. Le tapping sur We Are the Sun Gods, c’est beau. La fin de Savitri, c’est beau. On ne sait plus si on nage dans le mineur ou le majeur mais que les billes en solfège se rassurent, chez Gorod il y a aussi du riff binaire œcuménique. Regarde Waltz of Shades là, c’est un condensé. Le chef vous propose : un riff syncopé accompagné de son espuma de dissonance, peu démonstratif mais cela met en valeur le produit du terroir. Puis on enchaîne sur une pluie de tapping servie bien fraîche, suivie de petites bouchées de solos relevés au piment d’Espelette. Il y a un je-ne-sais-quoi qui s’agite dans mes neurones à l’écoute de The Orb, comme un café avec un carreau de chocolat noir, suivi d’un shot de cognac. Et pourquoi pas une reprise de Strange Days en dessert, ma foi ? Du plaisir d’esthète, à réserver aux tympans forgés dans le metal le plus rare et délicat. Assume de faire partie de l’élite, écoute Gorod.