Les portes de ce temple-là n’abritent nul calice, nul vitrail chatoyant, nulle paix mystique, une fois ouvertes, elles laissent s’écouler un flot tourbillonnant de guitares acérés, de vocaux caverneux, de rythmiques tribales. Du deathrock, quoi. Cette compilation groupe les deux premières cassettes d’un trio qui n’y va pas par quatre chemins dans son écriture inspiré en cela par l’énergie de la transition 70’s-80’s quand la première vague issue du punk rock en conservait l’énergie tout en s’orientant vers quelque chose de plus sombre au niveau des ambiances. On ressent quelque chose de cérémoniel au sens sauvage du terme avec une rythmique tribale à souhait, des guitares tendues, un chant caverneux (pas si éloigné d’une version souterraine de Ian Curtis) qui parait prêcher dans l’acoustique d’une arche en ruines envahie de végétation. Tout est bon ici mais c’est assez classique dans la composition, les plans utilisés sont connus pour qui est familier du genre; en même temps, c’est aussi ce qui en fait le charme. Temple ont pour eux un talent pour créer des atmosphères sombres, légèrement chaotiques au sens pur, avec des mélodies solides mais pas exceptionnelles en ce sens qu’aucun morceau ne sort spécialement du lot (un bon lot, il faut le préciser)… La compilation s’écoule toute seule dans des climats puissants, païens, opaques, compacts à l’image des titres mais peu évident d’extraire telle chanson plutôt qu’une autre. Autre avertissement, comme il s’agit de deux opus groupés, une légère différence qualitative se fait ressentir entre les pièces des deux cassettes niveau sonore même si rien de très gênant. On remarque qu’à leurs débuts, les Américains, consciemment ou non, se révèlent vraiment influencés par Joy Division dans sa version la plus torve et la plus deathrock avant d’accentuer la portée primale du son sur la deuxième. En un mot comme en cent, Temple jouent un deathrock brut aux atmosphères d’humus humide, d’acoustique de caveaux, pas foncièrement écorché, obscur plutôt, impénétrable comme une nuit sans lune. Une relecture délicieusement iconoclaste de la liturgie… 4,5/6