Marie dort seule… La pauvre ? Difficile de savoir avec Mary Goes Round qui aiment à naviguer entre deux eaux, situant entre la lumière filtrant à travers la surface et l’appel de l’obscurité plus en bas. Très bon morceau de départ en tous les cas, accords déchirants de guitare, rythmique dynamique, voix peu expressive circonvolant tranquillement dans la brume…Alors qu’il sort ce premier album sous forme d’un mini en 89 puis augmenté l’année suivante, le duo français se réclame d’un héritage new wave et post punk, de lui qui voulait produire de la pop exigeante et créative. Il joue volontiers sur l’aspect répétitif mais claquant de sa rythmique pour instaurer une forme de transe sur laquelle la guitare va s’enrouler et se dérouler telle un lierre noir. On songe en vrac à Echo and the Bunnymen, The Jesus and Mary Chain (‘Mary in the Sky’), New Order, probablement un zest de Cure aussi avec parfois quelques surprises plus corsées, ainsi ‘The nightmare’ nettement plus influencé par les Sisters of Mercy (laissant supposer un background plutôt goth des musiciens à la base), un départ de ‘Teardrops again’ rappelant ‘Spy in the cab’ de Bauhaus mais qui enchaîne plutôt sur une drôle de valse au ralenti comme si des somnambules dansaient ensemble entre des couleurs narcotiques. Ce n’est pas tout, ‘The great desire’ sonne carrément comme du disco funk mais joué par des cadavres. Assurément le combo n’aime pas trop se fixer des limites mais il a très bien digéré ses influences ce qui lui permet de tisser un univers musical cohérent et assez personnel, un univers sombre et rêveur, mélodiquement pop mais trop obscur pour s’y limiter. Jusque là tout va bien mais en ce qui me concerne il y a quand même un petit hic. Malgré les évidentes qualités intrinsèques de la musique, elle finit par manquer de relief, trop cool, trop détachée (encore que les pièces instrumentales soient fort plaisantes). La question aurait vite été résolue par un chant charismatique et investi mais celui de Jérôme Avril ne l’est pas (un problème trop récurrent dans les formations de l’Hexagone). L’aspect nuageux, désincarné, de son timbre colle très bien sur certaines pièces mais à la longue, il n’empêche pas une forme de torpeur pas loin de l’ennui de s’installer. Attention, ‘Sunset’ demeure un bel album avec des chansons de bonne facture mais je ne puis m’empêcher de lui trouver un léger manque d’épice malgré tout… 3,5/6