High Tide › Sea Shanties

Marée Haute, groupe inconnu au bataillon, nous arrive en cette année érotique d'une côte obscure de la perfide Albion, hirsute et les yeux injectés de sel, dans une drache de riffs certifiés "préhisto-baroque kiff". Il est également tout fier de nous annoncer qu'il a débauché pour son équipage un certain Jim Morrison (en réalité un matelot en haillons du nom de Tony Hill, ayant selon la légende des corsaires fait disparaître toute trace écrite de son second prénom Glande, et réputé pour être capable d'imiter à la perfection le plus beau fertilisant du Père Lachaise). Noble voix, plongée jusqu'au cou dans un brouhahard rock qui partira en testicule façon gigue psycheavy, avec une fougue à écailler Moby Dick... On a connu plus tiède, comme présentations. Et que dire de cette "Death warmed up", semblant inépuisable, débordant de cette énergie irrésistible, inarrêtable, à la hauteur du blase du groupe ! Après avoir noyé la cale et englouti le stock d'agrumes anti-scorbut, cette flotte de doux tarés monte sur le pont supérieur, et c'est un peu n'importe quoi... mais toujours de façon très fluide ce n'imp', avec plein de dégoulinures excitantes... Sans oublier de mentionner que la vigie, avide de cordes, carbure au violon... Un violon agressif, un des signes distinctifs de High Tide, qui souvent va suivre la guitare ou s'enrouler avec elle, par entrelacs singuliers telles deux anguilles (bourrées). Gros flux iodé dans tes conques ! High Tide ont sniffé des traits de sable, et la tempête électrique fait rage sur ce frêle esquif... Le Morrison clochard traîne comme une présence conteuse et annonciatrice pendant que les éléments s'enchaînent, souvent s'évanouit pendant de longues minutes jam-ram-dam, pour revenir par-ci par-là en esprit à plusieurs faces, discrétos, son chant se barre en nasillouille sur "Missing Out"... Pas trop le temps pour le hard blues de papy planplan ici : ça coule, ça gicle, ça déborde en permanence, dans le lupanar de ces hippocampes aux branchies en buvard, branchés sur ampli. Entre nausée et ensorcellement. High Tide navigue et tangue entre débauche, abordages exaltés et brefs moments d'introspection... On pourra certes souffler un peu des arpions à l'écoute de la proto (ouais)-crimsonienne "Pushed, but Not Forgotten" ... En savourant ce hard-psych-prog survitaminé du violon avant l'heure des symphonies rock/metal ridicules, on peut aussi se rappeler que Kansas et tant d'autres guignols à salopettes côtelées auraient dû être incarcérés avant de commettre l'irréparable. Ici on ne pense pas kitsch, mais "chiche". Même si quelque part, Poséidon se gratte sûrement le menton, maugréant un "not in my name guys" (il est anglais ouais, c'est une évidence). L'auteur de ces lignes précise que la description des morceaux s'est peut-être un peu emmêlé les pinceaux dans le pot de saumure, et que c'est juste la faute à l'onirisme. Ou à la mer, "qui prend l'homme". Puissent ces chants de marins hippies dégénérés, instables comme la houle et parfois épuisants comme un banc de sardines jouant du klezmer, mais toujours épatants, vous mener à leurs vivifiantes cimes d'écume.