Nile › Vile Nilotic Rites

Les foules ont pleuré le départ de Dallas Toler-Wade mais Nile a plutôt bien choisi les remplaçants. Pour pallier cette absence, ils ont eu besoin de deux bonhommes. Sur scène, Brad Parris a repris le rôle de frontman, bassiste et vocaliste, comme aux riches heures de Jon Vesano et Chief Spires. L’apport de Brian Kingsland à la guitare est indéniable et les titres qu’il a composés sont facilement identifiables. Il se bride sur les solos même si, là encore, on les repère de suite à l’oreille et prouvent que, techniquement, le type se situe un bon cran au-dessus du standard Nilesque, all due respect.

Ce sang neuf a fait dériver Nile vers un death metal un brin plus classique. Pour le voir sous un meilleur angle, je dirais que le groupe a gagné en variété et, surtout, en efficacité avec des durées plus raisonnables sur les titres rapides. « The Oxford Handbook of Savage Genocidal Warfare » est le meilleur exemple : c’est tendu, avec des cassures rythmiques typiques du death technique et rudement satisfaisant. La production est d’ailleurs plus compacte et concentre la violence des riffs plutôt qu’elle ne la disperse. Quelques légères atmosphères black metal se ressentent même à certains moments. Karl Sanders est-il alors dépassé par les jeunes fennecs ? Un peu, oui. Le morceau le plus typiquement Nile de l’album frôle l’accident industriel. « Seven Horns of War » est un ratage complet dans le sens où j’ai ri de bon cœur au moment où Karl a sorti les grosses trompettes en plagiant le thème des Uruk-Hai de Howard Shore. Cette faute de goût couronne un morceau qui, avec les mêmes trompettes, débute sur le thème historique de Godzilla. Ce genre de reprises plus ou moins libres de droits n’est pas nouvelle chez Nile mais la ficelle est grosse et Karl oublie que ses auditeurs peuvent aussi aimer le rap. Ce serait bien cool de lancer un « Simon says : get the fuck up » au prochain concert. Entre les deux phases de trompettes, des riffs laborieux et un interlude à la Beetlejuice. Malheur ! Karl abuse aussi de la clochette sur ses compositions, façon Hells Bells en boucle alors que ce genre de gimmicks fonctionne bien mieux lorsqu’il est distillé avec précaution.

L’impression mitigée ne se relève pas vraiment à l’écoute de la fin de l’album qui traîne en longueur, mal récurrent des derniers Nile. La froideur technique de cette chronique est à l’image du disque : c’est un disque de death metal tout à fait convenable, avec une petite touche de chromatismes orientalisants mais le feu sacré semble éteint chez Karl Sanders dont le dilettantisme est ici patent. Mais qui peut lui en vouloir après tant d’années, d’albums audacieux et de dévotion à la gloire du death metal ?