Aujourd’hui, c’est lancer de mouton, sport national d’Islande, comme tout un chacun le sait… N’importe quoi, il est vrai que l’île aime à mettre certaines spécialités étranges en valeur pour effrayer les touristes idiots (tête de mouton grillée, requin faisandé dans le sable, brennivin, etc) mais personne ne lance ainsi les pauvres ovins. Purrkur Pillnik signent ici le premier album (enregistré dans le même studio que CRASS) de leur brève mais prolifique carrière, un opus où le groupe fait du post punk comme on fait du punk. Les musiciens ne cherchent pas à poser une ambiance où quoi que ce soit, on entre d’emblée dans le lard (de baleine) et on termine en fade out, pas question de structures alambiquées, on aime à faire tourner des boucles, privilégiant un jeu volontiers haché niveau guitare, souvent en gammes, avec une rythmique inlassable qui plâtre le fond. C’est impeccable, direct, sec, pas la moindre chaleur dans la production, même la basse se voit rabotée pour ne surtout pas dégager une quelconque effluve trop ronde. Nous ne sommes pas si loin de la démarche de The Fall mais en plus squelettique (‘Vaterland’) et urgente. Idem pour le chant. J’ai expliqué dans ma chronique de ‘Í augum úti’ les circonstances ayant conduit Einar Örn Benediktsson a empoigner le micro et accessoirement débuter une carrière artistique. Le jeune homme n’a jamais su réellement chanter et ça n’a pas eu la moindre importance, il développera une technique de récitation rythmée intense, vive, avec une voix aigüe, épileptique parfois, habitée toujours. Un bloc impeccable capable de derniers hoquets punky (‘Gluggagægir’), peu friand de morceaux trop longs (on dépasse rarement les deux ou trois minutes), exprimant pourtant beaucoup dans ce format concentré. La faute à un bon sens mélodique malgré tout, à des structures simples mais ultra précises, hypnotiques dans leur répétitions, cette voix jamais sereine qui a dû en agacer plus d’un mais que j’aime pour ma part. Il y a pas mal de The Fall dans la marche mais avec de la lave et de la passion dans les veines. Un truc qui se bonifie avec les ans et rappelle ce qu’est vraiment le post punk de qualité. Comme un verre de brennivin.