Il y a la cold wave des celliers et celle de plein air; la musique des Pilgrims of Yearning appartient à la seconde. Dès les premières coups de ‘The visitor’, on se sent de chausser une bonne paire de godillots et de s’aventurer le long d’un sentier sous un ciel mitigé; la pochette résume donc plutôt bien le contenu de l’album. Pourquoi sortir dans le froid gris ? Parce qu'il y a quelque chose de tonique dans cette musique qui donne envie d’errer, de confronter le ciel, de poser des questions dérangeantes sur le destin, la situation sur terre, les mensonges qui nous entourent, demander des signes qui n’arriveront pas, on le sait déjà. Des rythmes pas trop rapides, pas si éloignés de ceux d’un(e) bonne marcheur(use) malgré quelques accélérations plus rock de temps à autre, ce chant féminin généreux sans en faire des kilos, des arrangements dépouillés mettant en valeur de très belles lignes de guitare… Parfois on se sent galvanisé(e) au point de courir (‘The besieged’), parfois les problèmes semblent s’estomper (‘The visitor’) avant que l’inquiétude, voir la colère ne gonflent à nouveau la poitrine (‘In God you trust’); par moment, on a juste envie de contempler en exorcisant le spleen (‘Withered’). Le groupe construit beaucoup, suggère, avec au final peu d’éléments mais une excellente complémentarité entre eux, un zeste de détails (un brin de synthé, deux ou trois éléments de percussions), des mélodies efficaces et cette production qui nous ouvre un ciel de fin d’hiver au dessus de la tête et de l’esprit. Derrière cette grisaille avec ses moments de doute et de trouble, on pressent pourtant que l’espoir n’est pas loin; tout est exprimé dans le nom, les ‘Pèlerins du désir’, ce désir de mordre la vie, d’aimer, de comprendre, trouver des réponses quoiqu’il en coûte. C’est l’ultime pièce, ‘8 § 1227’ qui offre le cadre pour l’accepter. Vous rêviez d’un combo capable de créer un lien entre les cold wave anglaises (Cure, Cocteau Twins) et françaises (Baroque Bordello, Avoid Catoblépone) avec un coup de pinceau noir gothique sur l’aquarelle ? Ne cherchez plus. 4,5/6