John Zorn › Chimeras

Sur ce nouveau disque de musique de chambre, John Zorn ne fait pas dans la simplicité. Il nous propose toute une série de petites compositions assez techniques, inspirée par le "Pierrot lunaire" d'Arnold Schönberg, alliant piano, violons, flûte et percussions, surmontés la plupart du temps par une chanteuse réalisant des vocalises plus souvent exaspérantes qu'autre chose. Et c'est bien là le souci. Autant la partie purement instrumentale apporte de bonnes atmosphères, des tensions, des montées calmes, puis des explosions plutôt bien maîtrisées, autant les vocalises arrivent le plus souvent comme un cheveu sur la soupe. Et ça gâche toute la tension créée par les instruments. Les deux parties ne s'allient pas bien et quand la chanteuse Ilana Davidson arrive, je sens comme un malaise. Pas qu'elle chante mal, simplement je ne trouve pas que l'ensemble fonctionne. Déjà que l'album est assez décousu et parfois difficile à bien cerner, alors quand elle commence, c'est totalement à côté. Vraiment, j'aimerais pouvoir faire abstraction de cette partie vocale car musicalement, il y a de bonnes idées. Les percussions et autres bruitages de William Winant sont pour moi les éléments centraux des morceaux. Ce sont eux qui donnent toute la tension et la texture éthérée du disque. J'aurais vraiment préféré un disque purement instrumental, avec des éléments issus de la musique de cartoon, des à-coups, des violons longs puis stridents, avec des cassures ultra-rapides repartant ensuite sur une atmosphère méditative (aidée en cela par des timbales douces mais primordiales). On aurait eu selon moi un album plus puissant, varié, et bien plus réussi. Parce que là, avec le chant, j'ai beaucoup de mal à accrocher. Dommage, il y avait matière à faire de ce petit album, une pièce intéressante dans la catégorie des compositions classiques de Zorn. A noter que l'album a été réédité en 2010 dans une version différente de la version originale, chose très rare chez Tzadik. Cette deuxième version a été complètement revue et corrigée avec un redécoupage complet et l'ajout d'un postlude d'une quinzaine de secondes. On peut presque considérer cette deuxième édition comme un album à part entière complètement différent. En ce qui concerne cette édition de 2003, je la trouve frustrante car mal exploitée.