Afin de booster le moral des troupes pendant la deuxième guerre mondiale, trois milles pianos furent déployés avec succès par les américains sur les champs de batailles. Vous imaginez? Plusieurs milliers de Steinway conçus spécifiquement pour être parachutés directement sur le terrain. Ils auront parfois fini encastrés dans les toitures… ou perdus, oubliés dans de sombres maquis... mais bien souvent aussi, récupérés, ré-accordés puis joués par civils et soldats comme autant d’étendards du monde libre.

Ce que Tim Hecker nous propose avec ce sombre mais reposant “Dropped Pianos”, c’est de revivre l’espace d’une petite heure, ce moment irréel où ces pianos oscillent entre ciel et terre.

Le temps se fige. Il ne sait plus vraiment dans quelle direction continuer son flux éternel. Les samplers ont été bien affutés… Et de quelques accords échantillonnés, le canadien nous emporte dans ces neuf fragments qui tombent lentement avec beaucoup d’élégance et d'onirisme. Et quand tombe enfin le glas final, l’on se surprend à avoir peur. Peur du dénouement. Peur de l’éphémère vitalité qui nous aura lentement mais sûrement secoué au fil de ces quelques esquisses éthérées d’une beauté simple et froide. Vitalité qui nous fut dérobée alors que les cordes tendues du clavier se muent en basses vrombissantes dans un final de plus en plus cauchemardesque.

Efficace et sans prise de tête pour peu que l'on ne cherche pas une écoute trop active. Parfait pour un rêve éveillé sans histoire... ou un dimanche pluvieux.

Une sérénade sombrex qui se joue en solitaire et qui se marie merveilleusement bien avec l’ennui des jours trop longs.

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