Xiu Xiu › Fabulous muscles

‘Miaou ? Tu sais comment on décapite les chatons en peluche avec un cure-dent en bois d’olivier ? Approche que je te l’explique avec mes incisives… Mais non, je plaisantais, mon minou à moi, tu es tout ce que j’aime et tout ce que j’ai au monde’… Fantasme d’un mix visuel-auditif entre cette pochette et ‘Bigmouth strikes again’ des Smiths… Un peu facile aussi pour esquiver la difficulté de démarrer une chronique de, voir de chroniquer tout court, la musique de Xiu Xiu d'halluciner sur l’état mental potentiel de Jamie Stewart donc on va retrousser les manches et y aller franco… Dans la mesure du possible puisque comme toujours ce skeud est un tel fourre-tout cohérent qu’on ne sait jamais trop par où y débuter; j’ai tellement de mal à imaginer notre Américain en train de composer, de répéter, avec autant de gens, tant il parait en transe et hors de son corps quand il enregistre. ‘Fabulous muscles’, c’est un sac dans lequel on nous balance en vrac de la minimal wave, de la cold wave, des sursauts indus, de la pop, de l’ambient, on secoue comme un sac de loto et on obtient une quine hallucinante au final. Chronique d’un quotidien comme disséqué heure après heure par un narrateur/acteur qui éructe des sentiments plus qu’il ne les met en musique entre terreur d’enfant violé (‘Little Panda McElroy’), froideur chimique du tueur expérimentant (‘Support our troops OH ! (Black angels OH !)’, collage glaçant aux limites du larsen), songwriting aléatoire low-fi du mec sous colle (‘Fabulous muscles’), tristesse absolue… ‘Fabulous muscles’ n’est pas un disque violent, c’est ce qui le rend terrifiant, comme si l’artiste avait cloné un avatar de lui-même dont il disséquait la cervelle en s’amusant à appuyer là, à ajouter une décharge électrique ici, pour voir si ça lui fait mal à lui aussi. Sonorités grinçantes, jamais vraiment inconfortables, jamais agréables, des pièces déstructurées, sans réelle construction identifiable, très peu de rythme, des instruments acoustiques en vrac à peine discernables (trombone, trompette, contrebasse…), la musique ne semble que prétexte à vêtir cette âme nue et écorchée beaucoup trop fragile pour exposer son épiderme à l’air pollué de notre société. Le glauque absolu dans la douceur ? On y est presque et pourtant, l’ensemble se tient comme un tas de baguettes de mikado avec des moments grandioses (‘Clowne Towne’ comme une boîte à musique en train de cramer dans un fourneau, 'Crank heart') et d’autres intenses (‘Mike’ ou comment fouiner dans une boîte à outils avec des gants d’armure rouillés). Extrêmement touchant de sincérité, extrêmement impossible à traduire par des mots humains, extrêmement trop près de l’os, extrême chat en peluche…