Clutch › Psychic Warfare

Pas si facile de parler de Clutch, si on sort des formules de pure satisfaction. Surtout avec un disque comme celui-ci, qui semble autant bâti d'évidences qu'on a rien de très constructif à en dire, sinon pointer une nuance avec le reste de l'œuvre. Psychic Warfare c'est un peu ce Clutch "Overdose de Clutch", qu'on s'est refourgué à soi-même en sachant bien qu'on en avait déjà de meilleures versions sur les étagères. Qu'on l'achèterait juste pour mieux le refourguer à un cousin - camionneur, ou militaire - quelques années après... Ou pas. Mais pourquoi on l'a acheté, hein, ce Clutch ? Juste parce que c'est un Clutch, et qu'il faut tous les posséder comme un sale complétiste de merde ? Juste parce qu'on aime collecter des possibilités de joie, vu qu'il y aura forcément un moment où on se dira "olala, mais... que je suis CONTENT d'avoir ce disque" ? Oui, c'est aussi aussi con que ça, Clutch. Et c'est vrai que Psychic Warfare, sous sa pochette Statue de Clutch indiquant une approche potentiellement plus froide et calibrée de la sauce maison, est un album très connement... Clutchien. Au sens non pas canin (même si la haute-fidélité est primordiale pour savourer le grain de ce son), mais totalitaire. Psychic Warfare me semble l'album au calibrage absolu, l'album impeccable de Clutch, total, maximal, ultra-homogène, sans temps mort tel un épisode parfait de Starsky et Clutch, celui qui satisfera à coup sûr n'importe quel amateur de rock ne possédant aucun autre Clutch. Du Clutch speed-rock à la Earth Rocker ("X-Ray Visions", "Sucker for the Witch", "Noble Savage" : régalade à tous les coups), du boogie-funk gaulé comme un tank à ressort ("A Quick death in Texas", "Your Love is Incarceration"), du hard blues sentencieux ("Decapitation Blues"), un intitulé d'instrumental qui donne parfaite idée du contenu ("Doom Saloon"). Le songwriting (ouh que je suis sérieux, mais oui, je suis très sérieux !) de cette sélection de clutchansons semble par moments fainéant, les riffs un peu trop dégagés derrière les oreilles, le son Clutch tellement aiguisé qu'il s'en dégage un rendu quelque peu... lisse ? Si on veut être moins chitchiteux, réécoutons les nobles "Our Lady of Electric Light" et "Son of Virginia"... OK, on a l'impression d'avoir déjà entendu la dernière mille fois, dans mille génériques de mille séries de merde dont on a oublié le nom, avec des chapeaux de cow-boy usés en sortie d'usine, des barmaids-prostituées à l'accent texan à chiquer du chewing-gum et des pick-ups avec une grosse rampe de phares qui éblouissent les coyotes... Mais putain, quel morceau de Papa, nom d'une grosse maison en bois ! Le sens du tragique chez Clutch, c'est pas rien. Alors pourquoi donc quatre boules et pas cinq, à ce très savoureux Clutch très américain très hollywoodien et très gaulé du chant, de la guitare, de la basse et de la batterie ? Parce qu'après décantation dans ma cabotche je lui préfère Book of Bad Decisions, Earth Rocker, Strange Cousins from The West, From Beale Street to Oblivion, Robot Hive/Exodus, Blast Tyrant, Pure Rock Fury, et l'album sans titre. Vous avez eu bien raison de poser la question.