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100 gecs › 1000 gecs

vinyl 33t • 10 titres • 23:00 min

  • 1745 Sticky2:21
  • 2Money Machine1:54
  • 3800dB Cloud2:20
  • 4I Need Help Immediately1:21
  • 5Stupid Horse2:01
  • 6xXXi_wud_nvrstøp_ÜXXx2:54
  • 7Ringtone2:23
  • 8Gecgecgec2:23
  • 9Hand Crushed by a Mallet2:06
  • 10Gec 2 Ü3:17

informations

https://100gecs.bandcamp.com/album/1000-gecs

line up

Dylan Brady, Laura Les

chronique

Avec Internet est arrivée la compression. La compression des données sous forme de 1 et de 0, permettant leur codage et leur circulation, entrainant une deuxième compression dans la foulée, celle de l’histoire musicale. Comme un trou noir, Internet a tout compressé en elle-même, rendant simultanées toutes les périodes, tous les genres. La musique post-Internet, c’est celle qui s’est construite sur un océan de données intraitables en une seule vie, un gouffre dont ne ressortent plus nécessairement les même échelles de valeurs construites par les générations précédentes. Sous couvert d’une ironie parfois trompeuse, des genres méprisés percutent les portes du bon goût, et se percutent entre eux. Ça n’est pas fondamentalement nouveau. Quand Naked City reprenait le thème de Batman, ou que Ween sortait un album de country, il y avait un véritable amour pour des musiques ou des genres mal-aimés, ou socialement dévalorisés (musique de comics pour gamins, musique de ringards sudistes), à peine dissimulé derrière une excentricité les rendant « acceptables ». Avec la musique post-Internet, le mur de l’inacceptable a été franchi, les vannes ouvertes à tout un chacun de se saisir du tout, d’aller piocher dans le gouffre. Avec 100 gecs, la musique post-Internet ressemble presque à un bug. Enfants naturels de la bubblegum-bass, le duo aux faux air de neveu/nièce de Kurt Cobain pousse le bouchon et les potards dans le rouge, en faisant fi de toute considération d’acceptabilité. Mais là où la bubblegum-bass avait cette inquiétante étrangeté, la musique des gecs (l’origine du nom reste indéterminée, comme leur musique) n’en garde que le côté extrême des sonorités tout en visant une formule pop, avec refrains qui défoncent. À ceci prêt que leur musique semble avoir été composée dans un mixeur.

D’ailleurs elle sonne comme un mixeur, les basses et les beats oscillent entre gros tabassage lo-fi bien saturés et clinquant métalloïde alien (SOPHIE est passée par là). Les genres ne cessent d’entrer en collision, passant du punk-à-roulette au post-dubstep (inspiré de Skrillex, pas de Burial), de la trap indus à de l’électro-pop à tendance expé (Charli XCX est passée par là), un peu de doom glaireux par-ci, un peu de mumble-rap par là. Avec des purs moment de collages sonores cartoonesques du genre library music 2.0 en mode randomizer. Et puis bien sûr il y a les voix de Dylan Brady et Laura Les, autotunées jusqu’à l’absurde, celle de Les en particulier souvent pitchée en style nightcore (dans des aigus qui n’ont plus rien d’humain), comme deux chipmunks emos balançant leur punchlines qu’on dirait copiée-collées de memes. Faut entendre ce "Hey you lil’ piss baby" sur l’intro de « Money Machine », premier single de hip-hop white trash hallucinatoire et sarcastique expédié en à peine une minute trente, s’explosant la tête contre un pur mur de noise. Car tout file à une vitesse exponentielle, pas seulement les genres entre eux, mais les morceaux eux-mêmes. Juste le temps de coller des refrains particulièrement infernaux en tête, impossible de se sortir le ska-punk de « Stupid Horse » de son disque dur mental; derrière la débilité de la chose (déjà les paroles "Bet my money on a stupid horse, I lost that") en forme de cavalcade ponctuée d’un "pick it up!", euh, stupide, avec gros riffs de guitare filtrée en roue libre, une totale efficacité mélodique (encore une fois, on peut tracer une ligne avec les géniaux faux frères Ween). Tout comme sur l’électro-pop de « Ringtone », qui finalement s’inscrit dans la lignée d’un « Computer Love » de Kraftwerk, où comment la chanson pop s’empare de la technologie pour évoquer le problème toujours renouvelé (mais toujours identique) de la communication amoureuse, aujourd’hui passant par l’alerte de DM sur un réseau social, thème qu’on retrouve sur « gec 2 Ü », la mélancolie affleure d’une petite chanson pop délicate où entrent en collision trance élégiaque, échos drum & bass et bubblegum-bass noisy. Alors, pop malgré toute son hyperactivité épuisante et son traitement sonore poussé à tous les extrêmes ? Plus que ça. Hyperpop.

note       Publiée le vendredi 11 novembre 2022

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    Damodafoca Envoyez un message privé àDamodafoca

    Pas grand chose à foutre de ce groupe, mais par contre Audimat est une superbe revue, c'est sur. Avec en effet des fanatiques de musiques et journalistes venant d'un peu partout. Notamment un des tauliers du truc qui gère la section musique de GQ à côté de ça, mais aussi des journalistes venus de Libé, The Wire etc...

    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
    avatar

    Ah bah en plus ça me donne l'occasion de lier les deux points, le côté transgenre et l'artifice vocal comme expression sincère, les voix pitchées à l'extrême dès les premiers trucs de bubblegum-bass faisaient partie de cette "confusion des genres" (sur le génial premier EP de Danny Harle par exemple, c'est en fait toujours sa propre voix cachée derrière des avatars féminins). D'ailleurs sur cet album, Laura Les (qui est une femme trans, comme l'était SOPHIE (snif)) utilise l'autotune à balle également pour contrer sa propre dysphorie vocale.

    Message édité le 22-11-2022 à 16:29 par (N°6)

    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
    avatar

    Ben franchement l'article est cool - elle développe beaucoup plus que ce que j'en dis, évidemment, aborde des points dont j'ai pas parlé sans mon post (dont le côté "en fait au moins aussi transgenres que méta" et pas au sens "strictement identités de genres" tel que l'entendent quand ils l'entendent la plupart des euh, media mainstream, disons...). Et l'article d'après, d'un autre auteur et à priori sans volonté d'établir une thématique dans le numéro, aborde aussi cette question de "l'artifice comme construction/expression sincère", en causant de la "voix sifflet", c'est à dire le registre des suraigus, à la Minnie Ripperton sur Loving You... Le mec part d'elle, développe sur Mariah Carrey devenue modèle du truc au sens "étalon à égaler/dépasser dans la compétition pop", puis embraye autant sur Arianna Grande que sur Björk et Arca, avec des observations assez fines sur les différences ET les points communs dans les démarches (C'est à dire sans la jouer "vilaine variét vs nobles musiques expé" mais sans dire non plus qu'au fond tout ce monde fait la même chose à quelques détails près).

    J'en suis là de ma lecture, pour le moment... Et l'article d'après cause de J. Dilla - que je connais plutôt mal, ça tombe bien).

    Message édité le 22-11-2022 à 17:01 par dioneo

    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
    avatar

    Merci de me rappeler que je ferais bien de lire cette revue, sur laquelle je lorgne depuis un bout de temps (sans doute depuis que j'en ai entendu parler via la "Dialectique de la pop" d'Agnès "La Féline" Gayraud). Ah bah oui je suis complètement d'accord avec ce que tu rapportes, ça me donne bien envie de lire l'article, d'autant que c'est écrit par quelqu'un qui était pile de cette génération; marrant d'ailleurs de voir comment elle vit à son tour cette "deuxième vague", qui est clairement différente (d'ailleurs le terme "hyperpop" n'est apparu que en 2019 il me semble), née de ce qui avait été posé par PC Music et SOPHIE dans les années 2010, et dont il est impossible de savoir ce qu'elle va devenir. D'ailleurs 100 gecs semblent déjà faire évoluer leur truc (très curieux de voir la gueule du deuxième album au vu du single "Doritos & Fritos", qui est une grosse tuerie).

    Sur l'accession à une forme d'authenticité et de sincérité en poussant tous les curseurs de l'artificialité dans le rouge (y compris via le pastiche ou ce qui tient du méta), oui je valide complètement, le single "Hi" de Hannah Diamond par exemple c'est totalement ça. Nick Currie (Momus) dit exactement le même chose d'ailleurs, qu'on peut tout à fait être plus réellement authentique ou profond en passant par le pastiche, voir le pastiche de pastiche, que par une supposée "authenticité" toujours ramenée à une sorte de forme mythifiée de la musique pop (on connait le refrain). C'est vraiment des questions qui me travaillent. Bon, sur la revue, faudrait que j'arrête d'être velléitaire (ou tout simplement une grosse flemmasse) avec les trucs qui potentiellement m'intéressent.

    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
    avatar

    Bref, et globalement c'est à lire, cette revue (ce numéro et d'autres d'avant). Je ne comprends pas toujours où veulent en venir les auteur.ice.s des articles, tout ne me passionne pas toujours mais je trouve la pluralité d'approche assez cool, ça ouvre le truc - c'est à dire qu'apparemment tout le monde là-dedans ne vient pas du même milieu/background et que ça basse des gens qui sont nettement "dans l'universitaires" et d'autres plus autodicactes, des écritures plus "DIY", sans clamer que l'une ou l'autre approche détiendrait une "cred" absolue, ne ferait de tel ou tel article un truc définitif sur le sujet qu'il aborde.