‘Limon’, voilà un nom original pour changer… Sans vouloir jouer Tistou les Pouces Verts, c’est en tout cas un terreau fertile pour de la bonne musique: rock parfumé gothique ou goth parfumé rock selon les points de vue, avec un background metal à la Katatonia qui fait coucou de loin de derrière la haie. Pour un premier disque, le groupe maîtrise parfaitement son sujet, guitares acérées, tendues, jamais lourdingues, une énergie rock’n’roll mais complétée d’un sens de la mélodie affuté. Il faut dire que le chanteur est doué, avec un panel assez varié: tons graves (‘The hazmat game’), instant inquiets, menaçants (‘Diva and destruction’), urgence parfois (‘Mutiny’ évoquant de beaux échos de Love like Blood)… La rythmique n’est pas en reste niveau pouvoir, impeccable de précision tant dans les charges électriques que les passages plus lourds et lents, les roulements, permettant à la guitare de tisser des murs de riffs ultra catchy entre deathrock, metal, un zeste même de goth rock à l’ancienne. Ajoutons à la mixture quelques trouvailles bien senties tels que l’orgue (‘Diva of death and destruction’), des choeurs vaguement orientaux de très bon aloi (‘Under Will’) car il faut bien le dire, Silt maîtrise totalement ses climats qu’il sait varier, développer, avec un vrai doigté. Pas de surjeu, de faute de goût, rien n’est too much, l’ensemble sonne extrêmement fluide et pertinent de A à Z. Pas d’ennui non plus car le combo parvient à varier non seulement les structures à l’intérieur des chansons en dosant les attaques, le dépouillement, la lourdeur, les ponts, de même dans leur agencement malin tout au long du cd. Il y a un peu du noir de Soulages dans ce skeud, du brut apparent mais baigné d’une vraie sensibilité (le superbe ‘Devourer of souls’, ‘Under Will’, la mélancolie nue de l’intro de ‘Babylon’…) avec même une véritable esthétique tubesque étant donné la qualité des mélodies. Autre bon point et pas des moindres, une production impeccable, ni froide (Alléluia ! Une batterie qui sonne comme telle et non comme sortie d’une trousse de docteur) ni brutale, non dictée par des tics de l’époque, ce qui laisse présager un vrai avenir exempt de lassitude pour ce premier LP. Un noir empli de courbes, de recoins, de souffle, du beau travail ! 4,5/6