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Lingua Ignota › All Bitches Die

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Aplecraf      vendredi 14 octobre 2022 - 19:45
Int      mardi 2 mai 2023 - 16:50
Shelleyan      mardi 21 mars 2023 - 08:07
No background      lundi 24 octobre 2022 - 15:34
Klarinetthor      lundi 17 octobre 2022 - 14:55
cyprine      lundi 17 octobre 2022 - 14:53
kama      vendredi 14 octobre 2022 - 08:16
Tallis      jeudi 13 octobre 2022 - 18:14
Raven      jeudi 13 octobre 2022 - 17:42
born to gulo      lundi 17 octobre 2022 - 13:05

cd • 5 titres • 42:47 min

  • 1Woe to All (On the Day of My Wrath)15:01
  • 2God Gave Me No Name (Nothing Can Hide From My Flame)4:49
  • 3All Bitches Die (Bitches All Die Here)12:22
  • 4For I Am the Light (and Mine Is the Only Way Now)5:06
  • 5Holy Is the Name (of My Ruthless Axe)5:29

informations

La première version de l'album, auto-distribué par Lingua Ignota, n'avait que 4 pistes (piste 2 exclue) et cinq minutes de plus à la fin de For I Am the Light (And Mine Is the Only Way Now).

line up

Kristin Hayter

chronique

"Si je n’étais pas aussi velléitaire, je me spécialiserais dans le hurlement", dit plus ou moins l’aphorisme. Mais il y en a pour qui le hurlement n’est pas un choix, c’est une nécessité. Pas la seule chose qui leur reste, mais la seule chose à faire. Les victimes des murder ballads. Les victimes dépeintes à longueur de temps dans les production de musiques extrêmes, dans lesquelles la mythification de la misogynie est une esthétique. Tellement disruptif. En fait non. Banal. Ordinaire. Quotidien. Elle sait. Elle les a répertoriées, consciencieusement. Alors la victime de la murder ballad se met à hurler. Pas juste « Il suffit!», oh non. Elle en appelle à Dieu lui-même, elle qui a été élevée dans cette culture catholique, baignée dans la liturgie, les icônes, les chants d’Église; elle en appelle à un Dieu vengeur. Elle ne prie pas. Encore moins elle supplie, allons-donc, un peu de tenue. Non. ELLE DEMANDE. Elle donne des ordres. L’Enfer existe, et il est pour vous. Oui, là, VOUS. IL vous voit. Tous. Peut-être a-t-il créé un monde imparfait, où cette insupportable violence règne, mais il suffit. ELLE lui parle. ELLE va vous maudire, une bonne fois, et on en parlera plus. Enfin si, pardon, on va encore en parler, longtemps. Vous allez les entendre les sermons hurlés sur fond de cloches chaotiques, une marche industrielle venue des tréfonds des tripes de vos victimes, imaginaires ou non. Vous fantasmez un peu trop, et mal. Lingua Ignota remet les pendules à l’heure, remonte les horloges de la souffrance. L’heure du Jugement. « Woe to all who inhabit the earth For now I walk among you ». Malheur malheur malheur. Lingua Ignota habite ce monde. VOUS l’avez sali. De la fureur bruitiste et martiale au dénuement du piano, du growl métallique de la voix à son expressivité ondulant entre lied et folk, Lingua Ignota invite au voyage au Pays des Morts, les Morts qui vivent parmi nous. Les victimes de la violence omniprésente pour qui elle chante, à leur place, elle est l’une d’elles, elle chante avec elle-même en harmonies inquiétantes que nulle beauté mélodique baroque ne peut vraiment dompter. « Ma langue est une hache, et une épée, et une dague à cinq poinçons ».

"Terribilis est locust iste" (Genèse 28,17) Vous qui pénétrez dans la maison de Dieu où chante Lingua Ignota, lisez bien l’inscription sur le fronton. Vous y entendrez la complainte de l’assassin sans nom dans la nef, où l’orgue majestueux est bousculé par des fréquences électroniques brouillées, comme des zébrures horribles sur SA création. C’est une liturgie du la mort, la VOTRE, car il est un Dieu vengeur qui commande son bras mortifère, son infâme main rouge, ce sont les lied du massacre, de la pandémie. Et du headshot. Lingua Ignota, dans sa longue robe colorée, ressemble à ces prêcheurs ambulants, sous leurs chapiteaux, elle fascine totalement, mais surtout elle terrifie. Son Dieu n’est pas d’Amour. Même quand sa voix s’élève vers le Ciel, derrière-elle, derrière les tentures, les instruments d’une americana absolument religieuse grincent comme si l’apocalypse était déjà là, tout déjà déréglé. Le piano peut bien faire semblant de garder un semblant de tempo, d’ordre dans ce monde, mais cette messe est une menace, tout de violence contenue dans chaque crissement de violon. Il ne faudra que peu de temps, maintenant, avant que le ciel ne se grise et que les tempêtes industrielles ne soient déchainées, que le chant y soit emporté, avant la Révélation. La victime de la murder ballad raconte : il m’a trainée au sol, dans tous les sens, il m’a battue jusqu’à ce que mes dents soient éparpillées, comme des perles sur le sol rouge, si rouge. La Révélation, la seule de ce monde : « All bitches die ». Ce n’est pas le Gospel, mais c’est bien la Vérité révélée. Sans même plus de pathos. Alors la seule chose à faire, c’est hurler. Réclamer le sang. LE SANG POUR LE SANG. Voilà la demande de Lingua Ignota à Dieu. La justice par le sang. La catharsis ? Vous voulez rire ? Pourquoi pas la résilience tant que vous y êtes. Non. L’intercession divine sera « Console me with blood ». Souvenez-vous de ce que Woody Guthrie avait inscrit sur sa guitare pendant la seconde guerre mondiale, une formule restée célèbre : « This machine kills fascists ». Lingua Ignota aussi a des machines auprès d’elle. These machines kill rapists.

note       Publiée le jeudi 13 octobre 2022

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Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
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Comme le dit No Background, après s'être pris 'Woe to all' dans la gueule, le coeur, les couilles, l'intensité des suivants est légèrement diluée, légèrement... Putain, ce premier morceau, ce bloc de haine pure et jouissive. Je raffole de ce genre de truc viscéral que seule une femme peut exprimer ainsi (cf D.Galas, To end it all, etc)

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No background Envoyez un message privé àNo background

Merci pour la chronique. Woe to all est vraiment extraordinaire, du coup l'intensité sur les titres suivants est un peu moindre. A noter aussi que le premier, Let the evil of his own lips cover him, est pour moi de la même trempe que celui-ci (en enlevant la reprise Bad boys). Ce qui est admirable chez elle je trouve, c'est la dimension finalement universelle de l'expression du trauma. Sa musique ne s'adresse pas qu'aux femmes abusées, mais pour toute personne désireuse d'aller de l'avant après un traumatisme - elle appelle elle-même ses chansons "survivor anthems". Hildegard Von Bingen a créé sa propre langue, Lingua Ignota, pour communiquer avec le moins de biais possible la parole de Dieu. Kristin Hayter reprend le flambeau, pour nous emmener en Enfer, le vrai, le terrestre, le vécu - chacun à son niveau.

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cyprine Envoyez un message privé àcyprine

Halloween sera peut-être plus classe, avec cet album

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Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
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je le possède depuis deux ans mais j'ai encore pas vraiment pris le temps de l'écouter à fond. Cette chronique tombe à pic

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