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Jacno › Jacno
- 2011 • Celluloid records 006001/CELL027 • 1 CD
cd • 6 titres • 20:51 min
- 1Rectangle3:39
- 2Anne cherchait l'amour3:29
- 3Triangle3:26
- 4Losange3:23
- 5Cercle3:17
- 6Anne cherchait l'amour (Instrumental)3:37
informations
Enregistré en Juin 1979 au Studio d'Auteuil, Paris.
Musique du film "Copyright" d'Olivier Assayas.
line up
Jacno (production, instruments), Elli Medeiros (chant et paroles sur 2)
chronique
Nul n’est prophète en son pays. Surtout pas dans l’Hexagone, où règne une sorte de complexe perpétuel dans le monde pop qui fait que soit on se borne à une sorte d’acculturation (le fameux Johnny Frenchman chanté par Murat) soit on refuse tout bonnement de reconnaitre son génie propre. De toute façon notre plus grande figure de dandy statufié l’avait dit : la chanson, c’est de l’art mineur. Mineur, secondaire, sur la deuxième marche, toujours les Poulidor de la pop les frenchy, jusqu’à la revanche offerte par les Daft Punk. C’est bien via l’électro que l’Hexagone va rayonner sur le monde grâce à son soft power du dancefloor. Une électro qu’elle aura humblement contribué à façonner, mais là encore, à toute petites touches. N’est pas Kraftwerk qui veut, d’autres hommes-robots qui influençaient Bowie et Eno au temps d’une Europe encore tranchée en deux. Dans l’Hexagone, ça bidouille des figures plus simples. Des rectangles, des triangles, des losanges, des cercles. Il y a d’autres dandys plus jeunes, plus modernes, qui se lassent très vite des gesticulations punk (là encore, un truc d’Anglishes dans le fond). Notamment un autre fumeur de Gitanes qui en crame tellement qu’il leur doit son surnom (de l’illustrateur de la fameuse marque de cancer du poumon en tiges). Dans la France encore giscardienne où le futur, ce sont les tours du quartier Beaugrenelle, Jacno enregistre une ritournelle électronique à la simplicité entêtante, sur des arpèges quasi acid-house avant l’heure, empilant petit à petit des couches d’instruments vintage (mais si, batterie, guitare et même des cuivres), nourrissant la mélodie minimale du bruit et du fracas de la grande pop des sixties. Et si ce n’est pas une forme de génie, je ne sais pas ce que c’est.
Pour cette jeunesse qui a une énorme envie de modernité, cette construction musicale géométrique, à l’efficacité millimétrique, c’est l’avenir. Un avenir froid et désabusé certe, mais l’avenir de la pop musique, et d’une pop musique bien française. Suffit de rajouter une voix féminine plus que flirtant avec la fausseté sur des paroles qui fleurent bon la déprime amoureuse; sa punkette favorite Elli Medeiros joue donc le rôle d’une « chanteuse française », bien consciente qu’elle n’en est qu’un avatar trompeur. C’est « Anne cherchait l’amour », lancinante pop-song faussement naïve, modèle du genre pour tous les jeunes gens modernes. Jacno en écrira d’autres du même acabit, quitte à les faire passer pour des tubes pour lolita sexy, « Amoureux solitaires » de Lio en tête (où des paroles quasiment morbides sont expédiées avec une moue boudeuse sur une orchestration pétillante, histoire de faire comme si). Mais pour l’heure, Jacno bidouille d’autres figures minimales aux synthétiseurs, comme un peintre abstrait, de ceux que les vieux barbons n’aiment pas parce que « ça ne représente rien, c’est juste des lignes et des traits ». Oui, juste des lignes et des traits, et de pas grand chose, sans chercher de complexité inutile, juste ce qu’il faut pour se livrer à une hypnose sonore en forme de trompe-l’œil, faire croire qu’il y a plus qu’on en entend vraiment, charmer avec du peu qui revient sans cesse. Des décennies plus tard on dira « minimal wave » et ça sera la hype d’aller puiser dans cette esthétique. D’autres figures encore, plus guitaristiques (mais toujours sur ce fond d’aller-venus synthétiques acidifiés) évoquent une sorte de krautrock pointilliste en boucle, les séquences de « Cercle » pouvant presque passer pour des variations sur un thème à la Television (le groupe new-yorkais, pas le tube cathodique avec de la pub dedans). Avec une désinvolture bien française, Jacno a posé sa pierre pour la musique électronique à venir (celle qui finira par conquérir le monde avec à son sommet, deux autres frenchies discrets). Il lui reste à creuser cet autre sillon, en duo cette fois, inventer la french pop eighties que le monde va nous envier. L’air de pas y toucher, sinon c’est vulgaire.
Dans le même esprit, (N°6) vous recommande...
chronique
Si les Stinky Toys ont été catalogués ‘punk’ faute de mieux, les musiciens se sont vite lassés de cette étiquette ne leur correspondant pas réellement, surtout Jacno qui n’a jamais trop apprécié les chapelles… Le split des premiers ne l’atteint guère, il a déjà d’autres idées. 1979, le paysage pop français est un no man’s land, la première vague punk ultra s’essouffle déjà, le reste, c’est de la variété… Exception faite d’un ovni baptisé Taxi Girl dont personne ne sait trop quoi faire, eux les premiers… Keupons dans l’esprit mais froids et synthétiques dans le son, en studio du moins. Jacno va donc surprendre tout le monde artistiquement puisque les plus fins limiers le découvrent soudain dans un court métrage où il joue de tous les instruments en haut d’une tour moderne. Sapé en noir, dandy, impassible. Ce qui frappe, c’est le son où prédominent les synthés. Le Français propose une pop clinique, épurée, robotique, encore unique en France et inspirée des précurseurs comme Kraftwerk. L’album sobrement intitulé ‘Jacno’ est quasiment instrumental à l’exception d’une chanson, ‘Anne cherchait l’amour’ interprétée par Elli Medeiros préfigurant le travail de Elli & Jacno mais en nettement plus gris. Les autres compositions portent simplement le nom de formes géométriques, la plus célèbre d’entre elle étant l’énorme ‘Rectangle’ qui à lui seul servira d’étalon pour des décennies de pop française, de Etienne Daho à Daft Punk. Les autres titres eux-mêmes se calquent beaucoup sur le même schéma: tempi mi-lents à la boîte, mélodies synthétiques et robotiques en notes, exception faite de ‘Cercle’ où la guitare, froide, cold wave, prédomine. C’est simple, épuré, percutant, pas trop long. Avec ce petit disque, Jacno gagne d’un coup ses gallons de producteur reconnu, inspire des générations d’artistes qui s’engouffreront dans cette voie et obtient ses lauriers de pionnier du style dans l’Hexagone. J’ai toujours détesté son travail par la suite mais toujours eu beaucoup de sympathie pour le personnage, vrai voyou rebelle dans le fond plus que la forme parfois, je suis donc heureux de détenir un de ses disques dont je puis sans arrière-pensée chanter les louanges. Un opus charnière.
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- Alfred le Pingouin › Envoyez un message privé àAlfred le Pingouin
Et ben moi j'aime pareil Elli & Jacno, "Tout va sauter" est fait de ce même genre de mélodies chelou, faites de chromatismes, de modulations extrêmement abruptes, un peu bancales.
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- Pascalino › Envoyez un message privé àPascalino
Salut, pour l'anecdote, ce sont des Gauloises sans filtre. Et le fameux casque Gaulois dessiné par Jacno.
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- GrahamBondSwing › Envoyez un message privé àGrahamBondSwing
Big Up à Scissor ! Dinky Toys... La réf était là juste sous mon nez.
- Note donnée au disque :
- Rastignac › Envoyez un message privé àRastignac
Ferrari 250 gt ?
- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Une Panhard (genre la PL17) ?