Prince › Originals

Prince de son propre aveu en interview n’a jamais été friand de reprises, n’en voyant pas l’intérêt, et a toujours été réticent à être repris lui-même. Plus ambigu est son rapport à l’écriture pour autrui. Il a proposé des compositions à plusieurs artistes, principalement ses compagnes et ses protégés, inutile de le cacher (Vanity, Apollonia, Sheila E) dont certaines ont été de tels hits (‘Manic Monday’, ‘Nothing compares to you’) qu’on en a perdu de vue qui en était le géniteur. Cette compilation a eu la brillante idée de rassembler plusieurs de ces morceaux justement mais comme l’indique le titre interprétés par leur créateur. D’autant que certains ont été composés, enregistrées, plusieurs années avant d’être proposés aux interprètes (on se doute donc que la maison de disques est probablement derrière dans plusieurs cas), exclusivement durant les 80’s. Parmi les les exemples les plus marquants, on retiendra justement les deux tubes les plus massifs de la liste: ‘Manic Monday’, légèrement voilé par rapport à la version Bangles et plus en raccord avec les paroles et ‘Nothing compares 2 u’ tellement Prince qu’on réalise également le fantastique travail d’interprète de Sinéad O’Conor dont la voix si marquante lui a permis de s’approprier la chanson malgré une relation compliquée avec Prince. Pour d’autres telles que l’excellent ‘Sex shooter’, il suffit d’enlever le timbre feulant d’Apollonia et c’est tout, l’habillage funk sec si typique du Kid est entièrement en place. Il est stupéfiant d’ailleurs de constater à quel point ce dernier a bâti une carrière si internationale, reconnue commercialement, sans avoir pour autant lissé sa musique dans le sens du poil. Même si quelque chose s’est perdu au cours des 90’s à mon sens, l’homme n’a jamais cherché les sons confortables, les structures amicales. Voilà un mec capable de torcher des morceaux groovy, explicitement sensuels (voir sexuels) sans chercher à les habiller de manière chaleureuse. Lui privilégie une approche mécanique à la ‘Sex machine’ de James Brown mais contrairement à ce dernier équilibre par la beauté de son timbre pourtant plutôt ambigu dans son jeu entre aigu et une voix séduisante sans jamais sonner chaleureuse. Comparez la platitude de l’interprétation de Kenny Rogers sur ‘You’re my love’ et celle punchy de Prince; il n’en faut pas moins car ce titre n’est pas fantastique à la base mais le Kid fait passer la pilule. L’autre qualité de cette collection est tout bonnement de nous faire découvrir certains morceaux car, entre nous, à moins d’être fanatique qui a écouté The Time, Vanity 6 ou Sheila E en solo ? Je songe notamment au superbe ‘The glamorous Life’ pour cette dernière qui eût pu figurer sur ‘1999’ ou ‘Controversy’ sans problème ou à ‘Make-up’ (Vanity 6) parfaite chute de studio de ‘Purple rain’ bien que datant de 1982, robotique et new wave version Minneapolis. Une initiative très intéressante donc, pertinente et qui n’a rien d’une exploitation post-Mortem morbide. 4,5/6