Hante. › Morning tsunami

37, 2 le matin, ce n’est pas Hélène de Thoury… Les éléments météorologiques semblent jouer un rôle symbolique important dans son travail mais ils ne sont pas là pour refléter de la demi-mesure, plutôt un miroir d’émotions passionnées tout sauf manichéennes: brouillard, feu, tsunami… Malgré un agenda rempli avec Minuit Machine, la jeune femme ne semble pas prête à jeter l’éponge avec Hante., bien au contraire. Ce quatrième album démarre très fort avec un morceau audacieux, sombre et étouffant dans ses sonorités qui se rythme, se déroule instrumentalement le 3/4 du temps avant que le chant n’intervienne de manière voilée vers la fin. Si l’opus précédent pouvait sonner davantage comme un laboratoire où expérimenter (collaborations, sonorités, ambiances) ce qui était moins possible en duo, ce dernier sonne plus cohérent et davantage marqué par l’essence de la techno. Le beat claque (présence accrue de la grosse caisse), occupe l’avant-plan au mixage, prétexte à créer des volutes, à jouer avec, restreindre leur écho, le démultiplier au contraire, resserrer sa portée avant de lâcher la bride aux nappe, tout en y ajoutant quelques bidouilles. Le chant lui-même devient souffle, murmure parfois, ne s’affirmant jamais trop longtemps, comme par pudeur, de crainte de ne pas se mêler aux éléments. En vrac, on décèle les influences EBM, techno, parfaitement digérées, quelques trucs plus anciens (Giorgio Moroder). Plus froide de manière assumée, la musique n’éteint pas l’élément humain, c’est le doigté de la fée/sorcière de Thoury, capable d’injecter une brise de fragilité au bon moment (‘Wasting time’). Apte à surprendre aussi, avec l’interlude ‘Transparent’ dans lequel on pourrait déceler un léger clin d’oeil moderne à Vangelis (je songe presque à une version balnéaire de ‘Blade runner’), en vaguelettes synthétiques salées. Le soleil ne se lève pas pour autant et les déçus de Kirlian Camera pourraient retourner des émotions semblables à la grande époque sur ‘Two faced-angel’ et il aurait été aisé à la Française de jouer cette carte. Au contraire, elle va nuancer encore, jouer au jeu du lâcher/relâcher, suggérant au lieu de livrer tout cuit. C’est l’un des charmes certains de ce disque, cette capacité de nuancer sans empêcher la danse ni l’atmosphère. Cette dernière a toujours été primordiale dans son travail mais en terme de recherche de sonorités, elle marque un cap nouveau, légèrement moins mystique, volontairement plus froid, clinique, sans jamais en retirer l’émotion et la 'chaleur' en émanant. La musicienne se fond littéralement dedans, n’imposant pas vraiment son chant, le laissant flotter entre deux eaux, sortant fugacement la tête de l’eau, avant de s’ y dissoudre à nouveau comme une étrange sirène. On applaudit des deux mains, figé(e). 4,5/6