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Momus › The Poison Boyfriend

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cd • 11 titres • 59:01 min

  • 1Murderers, The Hope Of Women5:18
  • 2Eleven Executioners4:02
  • 3What Will Death Be Like?7:04
  • 4The Gatecrasher4:58
  • 5Violets4:56
  • 6Islington John5:15
  • 7Three Wars5:46
  • 8Flame Into Being5:22
  • 9Situation Comedy Blues3:48
  • 10Sex For The Disabled4:51
  • 11Closer To You7:32

informations

Les trois premiers titres sont l'EP "Murderers, the Hope of Women". Produit par Julian Standen (sauf 2, 3 produit par Momus). Nick Currie a mis à disposition l'album The Poison Boyfriend en téléchargement sur Ubu.web : https://ubu.com/sound/momus_poison.html

line up

Nick Currie (chant, guitare), Dean Klevatt (claviers), Fein O'Lochlainn (basse), Terry Neilson (batterie), Arun G. Shendurnikar (percussions), Paul Inder (quitare électrique 1)

chronique

  • folk/new-wave sarcastique

Il y avait dans les années quatre-vingt ce grand écossais blond qui pensait, sans doute à juste titre, que reprendre Jacques Brel et faire des adaptations tordues de récits bibliques était bien plus subversif que la ménagerie punk et ce qui en a découlé. Voilà donc que Nick Currie est signé par l’ambitieux label Creation Records, Alan McGee voyant en lui le potentiel d’un Morrissey plus pervers, un chanteur précieux pour freaks cultivés. Alors que son tout premier EP en solo avait pour thématique le sexe, à plusieurs qui plus est, son deuxième et néanmoins première sortie sur Creation sera naturellement consacré à la mort. La musique de Currie y est encore fortement folk, on l’imagine sur la scène d’un cabaret londonien, débarqué de son Écosse natale, avec tout juste sa guitare acoustique et ses chansons en apparence dépouillée, mais toujours avec la touche mélodique à l’élégance assurée, l’accord un peu étrange, le décrochage au moment inattendu. Et une voix gracieuse et expressive, par laquelle s’écoule une sorte de logorrhée chargée de références culturelles et de tournures malines. Tout ça pour raconter des histoires peu confortables. Le nom de l’EP donne le ton : « Murderer, the Hope of Women ». La chanson raconte comment le protagoniste conçoit le mariage comme un interminable meurtre à l’arme blanche, prenant sa place auprès de sa compagne dans la longue lignée des meurtriers de femmes du quotidien, la norme sociale étant pour elles une sentence à vie. Le récit se déroule avec une sorte de douceur placide, d’élégance morbide, culminant dans un étonnant solo de guitare électrique (interprété par le fils de Lemmy, en voilà du trivia). Le seconde chanson évoque clairement une ambiance de cabaret, l’influence d’un Brel sarcastique y est évidente, alors que Nicholas fait la liste de onze bourreaux, le dernier, le pire de tous, étant celui qui tue en nous la peur de la mort. Voilà un beau sens de l’absurde. Et puis le chanteur dans l’ombre reprend son sérieux pour une autre liste, une méditation sur de quoi elle sera faite, cette mort, sept minutes de folk au texte tendu ou amusant, quasiment métaphysique. Creation tient un truc, pour sûr. Mais pas quelque chose de très agréable.

D’ailleurs l’album en question, dont les titres suivent ceux de l’EP sur la seconde édition en CD, n’est pas une partie de plaisir non plus. Rien que le titre, « The Poison Boyfriend », y a de la masculinité toxique à la ronde. La production, qui échappe pour la seule et unique fois à Nick Currie, y est plus nourrie que sur l’EP, la palette sonore tendant du folk vers la synth-pop new-waveuse de l’époque. Pour la perversité et le malaise, l’écossais répond présent dès le premier titre, le très nauséeux « Gatecrasher » qui donne le ton. Un portrait suintant d’amertume de type s’incrustant dans une fête, le genre de personnage qu’on imaginerait volontiers dans un roman de Thomas Bernhard (ouais, moi aussi j’ai des ref, Nick), on sent quasiment le dégout dans l’élocution même si le morceau s’achève presque en rêverie (sur Hitler et sa maitresse, certe). Même si le singer/songwriter, comme on dit de ce côté-ci de la Manche, a de l’humour, il est définitivement du côté bileux de la chose, de celui des humeurs malignes. Du commentaire politique sarcastique (encore ce mot, mais il n’est pas replacé pour rien) pour dessiner l’Angleterre cramée de Thatcher sur un pastiche de slow langoureux, « Sex for the Disabled », en passant par le pseudo-reggae à l’orientalisme synthétique de « Islington John » dans lequel il balade son auditoire dans un quartier de la capitale à la recherche de conquêtes féminines, déjà prises de préférences (sinon quel intérêt ?), en multipliant les formules semblant assemblées comme au hasard, suivant la technique du cut-up, Nick Currie se dirige lentement vers surement vers ce qui sera son style dès l’album suivant, celui du tendre pervers qui se taille l’auto-portrait en se mouillant les lèvres, en vrai Prince de caveau.

Mais minute, car le noyau de « Poison Boyfriend », c’est encore du Nick Currie à l’ancienne, ce chanteur de folk au regard perçant. D’abord le récit des trois guerres de la vie d’un homme, qui grimpe en crescendo au fur et à mesure que la sexualité fait d’abord tomber sa griffe redoutable sur l’enfance et la tue, puis que la vie elle-même fait nourrir puis gentiment crever à la lumière blafarde du temps qui passe espoirs et ambitions, où anciennes identités et anciens amours se réincarnent en ennemis. Le tout pour nécessairement, comme un couperet, perdre la dernière guerre à laquelle, dit le chanteur, « personne ne survit ». Brel n’aurait pas fait mieux dans le sentiment d’inéluctabilité, et puis ça monte, ça monte, Currie chante avec cette grimace au coin des lèvres, des nappes de synthés venteuses viennent entrainer la guitare et la voix jusqu’à un sommet qui n’est qu’une impasse, la chanson s’y écroule d’un seul coup, à peine de son dernier souffle. « Flame into Being » semble reprendre le même thème, presque plus sinistre, le personnage se présente dès le début comme totalement blasé « Le poids des livres a écrasé mes doigts délicats, je n’essaye plus d’être Paganini, la seule chose à laquelle je rêve ces jours-ci, c’est de sexe avec des inconnues ». Il a le sens des mots, Nicholas, le sens des formules, des allitérations, du rythme, de la poésie en fait. D’ailleurs le titre est une référence à D.H. Lawrence. Le morceau lui, trouve un certain sens de l’épique dans un refrain new-wave qui abandonne un moment les rives folkeuses. Le portrait se poursuit inlassablement, un peu pathétique, mêlant haute culture et clichés sentimentaux, trivialité et lucidité (« Mais sous mes fanfaronnades, je ne sais pas qui je suis »), interprété à l’avenant, la voix ici visiblement cynique, là étonnamment fragile. Deux grandes chansons du Nick Currie première période, avant qu’il n’enfile une bonne fois le masque du Dieu de la Moquerie, le bien-nommé Momus.

note       Publiée le lundi 24 janvier 2022

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    dariev stands Envoyez un message privé àdariev stands
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    si y'en a que ça intéresse, je vais vendre le 33 tours original Creation (donc sans les 3 premiers titres).

    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
    avatar

    Ben déjà y a les albums de Momus sorti chez Creation ! Mais oui, y a plein d'autres trucs.

    nicola Envoyez un message privé ànicola

    Nom de d’là. C’est bourré de trucs intéressants, chez Ubu.