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Gonzaguinha › Moleque Gonzaguinha

lp vinyle • 9 titres • 44:53 min

  • face a
  • 1Dias De Santos E Silvas4:17
  • 2Teatro De Revistas3:25
  • 3Festa e solidão6:00
  • 4Frutos4:08
  • 5Caminho Da Roça4:18
  • face b
  • 6O Que Importa?3:10
  • 7Por Aí1:05
  • 8Quintais / Meu Aboio10:00
  • 9Festa / Moleque8:30

informations

Producteur exécutif : Renato Corrêa - Directeur musical : Gilson Peranzzetta

Artwork par J.C. Mello et Milton Montenegro

line up

Gonzaguinha (chant), Grupo Modo Livre : Fred Barbosa (basse), João Cortez (batterie, percussions), Gilson Perranzzetta (claviers)

chronique

Moleque est le disque-synthèse par excellence ; sa seule présence dans la discographie de Gonzaguinha fait ressembler sa période dorée, les 5 premiers LPs, à une pentalogie...
Musicalement, l'apaisement est net : l'introspection torturée de Começaria Tudo Outra Vez laisse place à une sensibilité pop déployée comme jamais.

« Dias de Santos e Silvas », qui ouvre le disque, est tout simplement l'un de mes sambas préférés du petit Gonzaga, la perfection de sa composition douce-amère me faisant pardonner une production qui commence à sentir le plastique. Le contraste saisissant avec la progressive et théâtrale à l'excès « Teatro de Revistas » donne la tendance d'une face A incohérente mais délicieuse... La musique de Gonzaguinha n'a jamais été aussi lumineuse et tendre, mais pour l'heure, l'auteur-compositeur et son groupe marchent sur un fil : par un miracle permanent, tout fonctionne encore bien, jusqu'à l'orgie de synthés de « Festa e solidão » qui avait tout pour faire sombrer la chanson dans le ridicule. Il me faut évoquer le virage opéré par la musique brésilienne aux alentours de 1977 : il semble qu'un maléfice s'est abattu sur le pays, expurgeant une partie non négligeable de sa pop de sa magie, sans doute à cause d'une importation toujours plus grande de tics de production des Etats-Unis. Seuls quelques uns y résisteront, et Gonzaguinha est encore de ceux-là, grâce à des compositions toujours aussi créatives, à l'image de la fusion samba-rock de « Caminho da Roça », un exercice réalisé par plein d'autres depuis que le Brésil a plongé dans le rock au début des années 70, mais jamais sous cet angle bien particulier : les percussions sont à la limite de la batucada, la guitare en retrait, laissant la place aux vocaux d'un Gonzaguinha déchaîné mais sans fil directeur, comme piégé au milieu d'un ressac.

Malgré les qualités de la face A, c'est bien la face B qui fait de Moleque un classique. Tout commence pourtant par un « O Que Importa ? » typique, peut-être trop... Rien ne laisse encore présager le plongeon qui va être opéré lors des deux suites finales. Le groupe prend enfin son temps, esquissant une atmosphère crépusculaire, qui aboutit en la captivante a cappella « O Meu Aboio » ; puis construit le groove irrésistible et inclassable de « Festa », entre samba, funk et jazz fusion, pour déboucher sur la rageuse, cathartique et jouissive auto-reprise de « Moleque », à n'en pas douter le climax du disque. Une rencontre hautement symbolique avec le « morveux » de son premier album... Gonzaguinha ne renie rien de sa période la plus sulfureuse, regarde derrière lui mais ne s'arrête pas (encore).

Moleque est un assemblage complexe et hautement inspiré ; et j'ai le regret d'annoncer que c'est la dernière fois que Gonzaguinha allait réunir ces deux qualités sur le même disque... La suite ne sera qu'une lente chute déprimante jusqu'à la variété inoffensive des années 80, qui allait pourtant rencontrer un succès sans précédent, faisant du fils de Gonzaguinha une star dans son pays. Pas de quoi annuler l'état de grâce de ces premiers albums, dont Moleque est peut-être le moins bon intrinsèquement, mais le plus généreux.

note       Publiée le mercredi 23 décembre 2020

chronique

Comme sa pochette le révèle, Moleque Gonzaguinha jette une lumière crue sur tout ce qui peut se passer d'injuste, de moche et de cruel sur l'incontrôlable territoire qu'est le Brésil, immense terrain de jeu qui n'en est pas moins un petit cirque de mesquineries, comme le sait trop bien le ci-devant compositeur. Le ciel bleu, impénétrable et magnanime, et sous lui, la cohorte des favelas, la sarabande des intempéries, et la parade des riches encostumés, qu'ils soient épouvantails (généraux décorés, nouveaux friqués insolents, touristes aux intentions troubles) ou bien idoles désirables (toutes les stars de la MPB et la musique non-brésilienne mais de plus en plus populaire...). Tout ceci est comme comprimé dans l'espace pourtant si clair et aéré (on y respire, enfin, après 4 albums souvent menaçants) de ces arrangements tranchants, qui évoquent un je-ne-sais-quoi de Japonais dans leur raffinement, comme si les audaces de Wagner Tiso sur le précédent avaient tiré l'artiste vers les vents contraires de la lande Gismontienne, si cosmopolite mais si nippone dans son goût d'échapper à toutes les mimiques de la mélodie facile. Admirablement mené, "Festa E Solidao" est un morro parcouru de pianos-doublés en escalier évoquant le pianiste jazz Akira Sakata (débrouillez-vous, ici, seuls les rats du coin vous servent la soupe au sourire, et de de guide), et puis il y a le faussement télénovelesque Teatro de Revistas, remonté à bloc derrière ses guitares synthétiques qui évoquent un générique de vieux manga dramatique. Et même le folk découpé "Frutos", aux accents traditionnels, mais d'outre-orient... Ailleurs, il faut que concéder que Moleque est un disque un petit cran moins inspiré que les précédents, moins original dans ses choix esthétiques, adepte de trajectoires plus rapides, sans chicanes ni poussière collante. Enfin, si : la poussière soulevée par un char du carnaval sur Caminho da Roça, qui répète un exercice bien plus réussi ailleurs ou sur les LP’s précédents.

Pour la première fois, Gonzaguinha « cède » au classicisme des influences choro, présentes sur le troisième mais surtout le premier titre, il donne à l’ensemble une couleur samba ou tout simplement MPB « normale », de son temps, pas si loin du Chico Buarque de 77. Mais toujours l’homme hache le portugais comme si c’était de l’allemand, langue faite pour engueuler ou déclamer un réquisitoire plus que pour la poésie et l’amour. Ce serait mentir de dire qu’on ne s’ennuie pas parfois un peu ici, entre deux moments où l’attente sourde et tendue des albums précédent refait surface, nous rappelant qu’ici tout sourire n’est que fataliste. Pour l’auteur de ces lignes, l’album ne décolle franchement qu’après le volontairement léthargique « Quintas – Aboio », avec l’ultime « Festa – Moleque », resplendissant de hargne narquoise, montrant que la course-poursuite avec les censeurs et les intimidateurs n’a pas cessé depuis le premier album, elle s’est au contraire durcie. Un titre toutes griffes dehors, à l’emballement paroxystique, mais qui ne suffit pas à faire pencher la balance du côté de ses grands disques. D’ailleurs, le « morveux Gonzaguinha » choisit de conclure sur Pobreza por Pobreza, chanson apaisée annonçant des jours plus clairs, qui arriveront dès le disque suivant. Un apaisement mental tout relatif, à scruter les paroles du chanteur, qui se tournera plus volontiers vers les tourments amoureux. "Il me semble que la misère… » chantait plein d’espoir un certain arménien… « Au soleil n’est pas plus facile à supporter...." lui répondrait 25 ans plus tard un rappeur italo-phocéen musulman.

note       Publiée le mercredi 23 décembre 2020

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