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Gonzaguinha › Começaria Tudo Outra Vez...

  • 1976 • emi-odeon s.a EMCB-7014 • 1 copies • 1 LP 33 tours

lp vinyle • 10 titres • 42:14 min

  • 1Eu Nem Ligo3:35
  • 2Picadeiro / Tudo Pro Meu Próprio Bem5:29
  • 3Erva Rasteira3:21
  • 4Uma Vida Inteira / Senhor, Senhora5:38
  • 5Um Sabiá Contou4:17
  • face b
  • 6Espere, Por Mim, Morena3:28
  • 7Meu Segrêdo / Asa Branca8:02 [Asa Branca reprise d'un standard de Luiz Gonzaga]
  • 8Chão, Pó, Poeira5:04
  • 9Começaria Tudo Outra Vez...3:20
  • bonus track CD
  • 10Um Sorriso Nos Lábios4:13

informations

non renseigné

Le titre "Um Sorriso Nos Lábios", face A d'un 45-tours de 1972 (avec "Comportamento Geral" en face B), est l'unique bonus track de la seule édition CD de ce disque, sur EMI, année inconnue.

line up

Luiz Gonzaga Jr. (chant, violao), Gilson Peranzzetta (piano, piano electrique, orgue, choeurs, accordéon), Fred Barbosa (basse, choeurs), Ricardo Pontes (saxophone soprano, flûte, choeurs), João Cortez (batterie, percussions, choeurs), Wagner Tiso (arrangements)

Musiciens additionnels : Nelson Ângelo (guitare), Frederiko (guitare), Robertinho Silva (percussions), Copinha (flûte), Jorginho da Flauta (flûte), Mauro Senise (flûte), Nivaldo Ornelas (flûte), Everaldo Ferreira (percussions)

chronique

  • bulletin climatique ne répond plus

Imagine-toi qu’un matin, où un soir, ton réveil s’avère être une grosse cigale tropicale aux yeux jaunes orangés perchée sur une liane au-dessus de ta tête. Gueule de bois braisé à l’ayahuesca pour toi, réveil sans transition aucune au milieu de la forêt vierge, ne passez pas par la case avion, ne survolez pas l’atlantique. Sans rime ni raison, désorientation et tremblements. Et tu n’es pas seul dans cette étuve où les roseaux sifflent des tourbillons de notes insensées autour de toi… Un drôle de type osseux et aux airs de croque-mort joue les muezzin depuis un arbre voisin. Un peu clodo, un peu soulard, mais tu le penses pas trop fort car son regard d’inquisiteur vient chatouiller tes neurones reptiliens. Son chant se veut rassurant, mais quand un chœur invisible se met à accompagner ses hululements d’ivrogne (« Tudo Pro Meu Propio Bem »… « tout ça pour mon propre bien », qu’il dit, pendant qu’un nuage se prépare à t’assommer d’un typhon de tous les diables), tu crains qu’il fasse pleuvoir, le con. Ça ne loupe pas : le temps se déchaîne, la montée semble durer une éternité, et s’arrête brusquement, le temps d’un répit où l’eau goutte depuis une fougère, comme un tic tac dans le silence… Avant que ça ne reprenne, cette fois dans une transe sans issue. Te voilà euphorique, mais la nausée te tenaille… Si seulement cette forêt pouvait arrêter … de …. Tanguer ….. Trop tard pour s’échapper : ta boussole est devenue une girouette ivre elle aussi. Du chamane émane lampées de fumée et harangues désarticulées, et c’est la même chose pour le cadavre de locomotive depuis longtemps bouffé par les termites qui te sert de refuge, son ventre de feu s’est réveillé et recrache ses volutes épaisses. Chaque accalmie n’est que l’inspiration pour une nouvelle expiration, soufflerie des quatre vents dont l’air est chargé de cordes dissonantes, de rafales free jazz, de section rythmique déchaînée entre gigue militaire et forro psychédélique. D’ailleurs, tu crois bien entendre le chamane chanter « Asa Branca » vision brusquement limpide et familière au sein de cette étuve sinueuse et asphyxiante… Ailleurs, les cris de concert de l’assemblée, elle aussi emportée par cette cérémonie, semblent réclamer du sang. « L’air retentit de partout, et les flots cadencés qui arrivèrent à ma conscience étaient si entremêlés que je n’en discernai plus aucun : croa-croa des solistes enragés, sifflets stridents d’un ensemble à cordes, chants monotones de chœurs à l’unisson, timbre assourdi d’une étrange guimbarde, accords dominants de duettistes gonflant leur goitre blanc, coassements symphoniques d’un orchestre plus lointain. » (François Bizot, Le Portail, 2000). Les deux slows totalement incongrus qui jalonnent la face B, quoique eux aussi pris entre des courants contradictoires, ont le goût amer de l’alcoolo délirant qui profite de son quart d’heure de sobriété de la matinée pour jurer fidélité et amour à sa douce (« le Cuba-Libre me met du courage dans les mains », no comment), avant que la tempête intérieure n’ait à nouveau raison de ses sens, revenant progressivement comme le cauchemar tubulaire et steamjazz qu’est ce disque. On en doit les arrangements invraisemblables à Wagner Tiso, orfèvre attitré de Milton Nascimento, bien qu’on aurait juré Hermeto Pascoal seul capable d’un tel jeu d’apprenti sorcier avec les éléments. Peut-être que les suées de la maladie qui tenaillait Gonzaguinha l’année précédente expliquent une telle embardée... Quoi qu’il en soit, ce truc vient de mars, et visiblement la météo est du genre chargée là-haut.

note       Publiée le mercredi 23 décembre 2020

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chronique

Começaria Tudo Outra Vez est un paradoxe fait disque. C'est ici que l'on trouve les deux premiers grands succès de Gonzaguinha, celles qui se trouvent sur les best of qui allaient fleurir à partir de la deuxième moitié des années 80 et qui occultent la première partie d'une carrière peut-être trop sulfureuse ; je parle ici de « Espere por Mim, Morena » et du morceau titre. D'un autre côté, c'est son disque le plus radical, parfois jusqu'à l'écoeurement en ce qui me concerne.

Tout commence pourtant par un sympathique jazz typiquement gonzaguinien, « Eu Nem Ligo » (« Je ne m'inquiète pas »), toujours mordant en matière de sarcasme mais sagement swing. Le point de bascule est sur la deuxième piste, la suite « Picadeiro / Tudo Pro Meu Propirio Bem ». Une composition sans précédent dans sa discographie en matière de complexité, l'auditeur se retrouvant piégé dans une structure labyrinthique, pleine de chausse-trappes et surplombée par la voix d'un Gonzaguinha à la fois hargneux et en pleine errance. Un voyage oppressant, comme un rafiot naviguant dans une mer mentale déchaînée... Un cran a définitivement été passé depuis le torve mais plutôt tranquille Plano de Vôo, l'auteur-compositeur cherchant ici à réconcilier l'écriture tourmentée de ses deux premiers disques éponymes avec la liberté jazz permise par son nouveau groupe de tueurs, le même que sur sa sortie précédente. C'est aussi l'occasion de toucher pour la première fois au forró de son père, d'abord avec l'accordéon de « Um Sabia Contou », puis avec la reprise du standard du genre « Asa Branca », forcément significative. Un hommage équivoque, comme s'il avait fallu pervertir la musique de Luiz Gonzaga avant de pouvoir se réconcilier avec lui...

Le sommet du disque est ainsi la suite « Meu Segredo / Asa Branca », où le gloubiboulga prog/jazz du groupe semble soudain prendre tout son sens. Gonzaguinha y trouve un point d'équilibre entre feeling et pur expressionnisme, le tout aboutissant sur la reprise de Luiz Gonzaga déjà évoquée, l'une des plus belles malgré l'extraordinaire liste d'interprètes qui s'y sont frottés. Elle s'apparente à une marche en apesanteur au-dessus d'un abîme, un moment de grâce qui ne se départit pas de cette angoisse omniprésente, représentée par les petits motifs d'un groupe qui joue ici plus que jamais comme l'avatar de son leader. « Um Sorriso nos Labios », bonus track sur ma version, est presque une variation de « Pois é, Seu Zé » sur l'éponyme de 74 et si elle date en vérité de 1972, le retour au samba qu'elle opère offre un point final intéressant après un voyage quasiment métaphysique.

D'autres fragments ne ressemblent à rien de connu, comme l'hallucinogène et étouffante « Chão, Pó, Poeira ». Les deux ballades déjà évoquées échappent quant à elles au sirupeux dans lequel Gonzaguinha n'allait pas tarder à plonger, tête la première... « Espere por Mim Morena » et « Começaria Tudo Outra Vez » sont des chansons d'amour telles que l'auteur-compositeur n'en avait jamais écrites, simples et hautement sensibles ; la seconde allait bientôt devenir synonyme de Gonzaguinha aux yeux du public brésilien. Un écorché vif, hélas bientôt délesté de ses aspérités les plus subversives...

Le résultat n'a, dans sa globalité, aucun équivalent en termes d'ambition et d'explosion des structures traditionnelles de la musique brésilienne. Mais à force de mettre 50 idées par morceau, de livrer avec tant d'impudeur ses propres contradictions, Gonzaguinha a ici tendance à me perdre : les qualités de Começaria Tudo Outra Vez me sautent aux oreilles, mais je reste désespérément sur le seuil de sa porte. C'est un disque que j'écoute peu, et plutôt par fragments, lassé d'encore et toujours buter sur ses circonvolutions. Il mérite de toute évidence plus que la note que je lui ai donnée, et c'est avec soulagement que ma chronique accompagne celle de Dariev... Prenez-la comme une mise en garde respectueuse.

note       Publiée le mercredi 23 décembre 2020

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