And Also The Trees › Born into the waves

Je suis né dans les vagues, des vagues de plume, d’épis de blé, de fougères, de feuilles qui bruissent, des vagues de vent qui agitent les bois, les landes, pour faire corps avec celles de la mer qui lèche les falaises, les plages de mon pays... Ces vagues, je les ai suivies, elles m’ont guidé durant toutes ces années, transformant cette colère sourde, cette rage noire qui me rongeait en une mélancolie plus apaisée qui m’a ouvert des horizons plus que fermé des frontières... Une signature unique identifiable dès les premières mesures de ‘Your guess’, les volûtes de guitare fraîches et ciselées de Justin, la récitation chantée de Simon... Entrer dans un disque de And Also the Trees n’est pas synonyme de surprise, plutôt une forme de retour au bercail après un voyage. Bien sûr, rien n’est complètement pareil, de petits détails ont changé au cours de cette absence mais on retrouve cette pulsion primaire, celle que dégage la terre où l’on est né. Franchir les frontières, c’est s’imprégner de nouveaux parfums, de nouveaux sons, ainsi ‘Naito-shinjuku’ qui, comme son titre l’indique, apporte de discrètes influences nippones dans le style du groupe mais pour l’essentiel, on s’enveloppe dans la beauté campagnarde de ‘The Sleepers’ et ses accents de valse automnale, un ‘Bridges’ qui paraît s’élever au bord de la falaise pour se perdre dans le ciel ; le dépouillé ‘The bells of St-Christopher’s’ perdu dans le brouillard pourrait même rappeler Nick Cave... Toujours ce jeu subtil de la batterie en roulements effleurés qui enflent sans jamais réellement éclater car il n’est nulle tension ici, juste un certain vague à l’âme. Il est assez incroyable de constater à quel point nos Anglais sont restés fidèles à un style propre qu’ils explorent sans cesse pour en tester chaque nuance sans provoquer de lassitude. Les vagues ont érodé les tensions, la rage s’est évanouie, la musique du combo est devenue plus apaisée, confiante, mais elle ne se départit pas pourtant d’une certaine tristesse existentielle. La production d’orfèvre donne l’impression de percevoir le son des gouttes de bruine et de rosée, de sentir le froid des brumes d’automne; on frissonne mais on se sent bien. 4,5/6