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Acid Mothers Temple › Does the Cosmic Shepherd Dream of Electric Tapirs?

cd • 6 titres • 73:39 min

  • 1Daddy’s Bare Meat8:20
  • 2Suzie Sixteen4:36
  • 3Hello Good Child8:01
  • 4The Assassin’s Beautiful Daughter9:02
  • 5Dark Star Blues25:13
  • 6The Transmigration of Hop Heads18:25

informations

Enregistré et mixé par Makoto Kawabata, Atsushi Tsuyama et Tetsuya Kotani à l’Acid Mothers Temple et au studio Omega Sound, en 2002 et janvier 2003. Produit par Makoto Kawabata.

Le nom complet choisi par la formation pour ce disque est cette fois-ci Acid Mothers Temple and the Melting Paraiso U.F.O.

line up

Cotton Casino (voix ; bière, cigarettes), Hiroshi Higashi (synthétiseur ; Dancin’ King), Makoto Kawabata (guitare, sitar électrique, orgue hammond, électronique, voix ; Speed Guru), Hajime Koizumi (batterie ; Sleeping Monk), Atsushi Tsuyama (basse (monster bass), voix, guitare acoustique, guitare, flûte à bec ; Cosmic Joker), Magic Aum Gigi (guimbarde ; Erotic Underground)

chronique

Un Acid Mother’s Temple qui s’annonce bien SF loufoque, sauts façon jeu de plateformes à l’ancienne (en « 3D isométrique » ?) d’une dimension à l’autre – parallèles, dérives dans les circonvolutions du bobinage du plan astral…

Le titre, déjà – qui reprend façon farce celui du plus célèbre roman de Philip K. Dick (Les Androïdes rêvent-ils de Moutons électriques, celui que Ridley Scott adaptera, assez librement, quand il réalisera Blade Runner. Mais… Qui l’a vraiment lu ? (Ah, eh bien cette fois-ci, tiens, je peux répondre « moi » – il y a bien longtemps, mais je me rappelle : c’était BIEN… Bref !)). Et puis LES titres – ceux des plages. Du salace déglingué aux consonances Zappa/Beefheart (Daddy’s Bare Meat), des noms de groupies imaginaires (Susie Sixteen – amalgame de Suzie Cream Cheese (« entourage Zappa », encore) et de la Sweet Sixteen du standard blues, rock’n roll, rhythm’n blues ?)… D’autres citations – The Assassin’s Beautiful Daughter, très probablement en écho à The Hangman’s Beautiful Daughter de l’Incredible String Band de 1968 (et glisser du bourreau à l’assassin… je vous laisse délibérer avec vous-même si c’est un saut qualitatif, un retournement, un renvoi d’ascenseur en chanvre ou autre chose, ou pas…). On se dit qu’on est parti pour un peu de leur gaudriole particulière – mirlitons-buvards, tartes-à-la-crème-de-psilo (eurk), bariolages et voix à la Mothers of Invention (décidément) mâtinées Space Whispers à la Gong. Ça ne rate pas d’ailleurs, d’abord. Ça commence bien sur ce ton. Daddy’s Bare Meat, c’est un ahurissant foutoir (… eh) – machin tout glissant de guitares pas ébarbées, voix perchées grotesques qui se croisent, déconnage hébété/tripé, qui fait douter que l’ambiance soit saine, à force – parce qu’ils rigolent mais ça ne stabilise jamais, la plaisanterie, on se prend des horions contre les parois du sas (oui, du sas… SF, on disait, et ce truc me téléporte dans ce genre de structures – vaisseau, station spatiale, version Galaxie Aquarius (Aqua-rii-uuus…)). Et les plages suivantes – globalement plus folk mais pas franchement moins déglinguées dans le ton, la mesure pas trop fixée – ne font rien pour démentir. Précisons : c’en est un, aussi, des leurs partis dans cet esprit, où ça prend, l’affaire, la blague. Parce que pas que drôle – et réalisé avec la dose d'expressionnisme claudiquant qui colle au propos, à peine un peu plus loin que le « trop pour qu’on y croie », ce qui fait qu’on croit qu’eux y croient. Ce qui fait que même les miaou-miaou passent bien, n’agacent pas. (Encore un hommage à Gong, tiens, ça ? Je veux dire... : I Am Your Pussy, sur Flying Teapot… Non ? Peut-être). Oui, parce que miaous, aussi – caresses, titillation de libido, ici ; rien que cette pochette pinku/hippie-exploitation… ; et le dénommé Magic Aum Gigi (un certain Jérôme, dans d’autres secteurs de l’espace-temps), crédité « Erotic Underground » ; la voix de Cotton Casino, aussi, qui dans la glossolalie des autres souffle un truc plus suggestif – autant Gilli Smyth (Gong… encore, et dernière, après j’arrête, OK) que Rosi (Müller – celle qui susurre à l’oreille des Cheveux sur le Starring Rosie d’Ash Ra Tempel – de 1973). La voix. Cette voix. Qui tout à coup cesse de murmuer. Qui… Hullule.

Et soudain tout s’emballe.

Finie la farce : Dark Star Blues, là – c’est autre chose. Une sorte de déchaînement. La flambée – on se tient au milieu, immunisé, mithridatisé à ce feu, peut-être, par les doses grandissantes qu’ils avaient introduit, de la substance, dans les épisodes précédents (du disque, je veux dire – les chapitres décousus). Toujours ce coup des guitares folles – qui trouvent la résonance exacte – et des synthés qui nappent et rond-dans-l’eautent, la basse qui bulle. Et la voix, donc. L’afflux massif d’un yodle cosmique – qu’on n’avait pas vu venir, souriant à leurs lâchers de lucioles, béats qu’on était. On n’est pas loin – vraiment, de ce qu’on peut entendre, côté composantes, sur Minstrel in the Galaxy, par exemple, des mêmes (de presque les mêmes sous le même nom, disons), sorti d’ailleurs la même année, de sa plage éponyme. A ceci près que cet autre (le Minstrel), dans son déploiement, instille une profonde, immense sérénité, paradoxalement ou pas ; alors qu’à cette plage-ci (Darkstar), bien qu’on s’y tienne, j’insiste, qu’on entende tout clairement, ce sont bien les secousses qui nous traversent, les reliefs qu’ils sculptent au chaos qu’on se met à épouser, avec quoi on vrille (je dis « on » … c’est à moi que ça fait ça, hein, c’est un « on » personnel). Foutue ouverture qui bée sous la musique, où s’agite l’excitation des vagues énormes, des vagues-éons de particules.

Ensuite c’est là que tout... Retombe.

C’est là qu’il arrive, à son tour – l’apaisement. Sur ce dernier long titre – The Transmigration of Hop Heads. Le contraste est frappant : pas de ryhtme cogné, ici, de vortex anarchiques. Le mouvement n’est qu’une vibration – comme de verre, cristalline. Un drone aigu – qui s’étend en phases aux tuilages à peine perceptibles. Calme vivant, pourtant – très vif, dégageant, reculant les limites d’un panorama limpide. Non, je disais : « retombe »… Ce n’est pas ça. Plutôt : ça s’élève en rosée, ça condense, le grand brassage de la précédente s’étant dissipé. Ce qui fait… Ce qui fait que le disque achevé – je ne vous dis pas comment, ça se conclut – on se rend compte que cet Acid Mothers Temple ci nous a emmenés dans toutes leurs contrées, à peu près, amenés de leurs scènes de burlesque (qui veut dire aussi parfois « cabaret », si je ne me trompe pas, même strip-tease ; je dis ça… on y revient, quoi), à travers leur folk ergot-de-seigle (ici, plus qu’occitan-buvard ; attention de ne pas confondre, ça pourrait mal finir), du cœur du déchaînement jusqu’au presque-arrêté…

Et quel long, étrange voyage ce fut, comme chantaient d’autres hallucinés, dans un autre jadis encore. (Dire… Qu’à la station première, on se croyait embarqué seulement pour la poilade).

note       Publiée le mardi 19 mai 2020

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    "Kawabata t'as l'impression que chaque fois qu'il prend un instrument il t'enregistre un album dans la foulée"... Bah sincèrement j'ai l'impression que c'est à peu près ça oui. Ce qui, comme dit Alfred, est moins dans la logique/stratégie classique (ou devenue ou redevenue classique... bref) des groupes de rock que de la logique de flux et trace de groupes expés, pour qui la musique n'était souvent qu'un des aspects d'une vie communautaire, un truc important voire "central" (peut-être pas pour tous) mais pas fait du tout dans la logique "on écrit/on planifie/on enregistre/on produit/on finalise (mastering)/on emballe/on sort-fait-la-promo et hop, on remet la même dans douze ou dix-huit mois", ouais... Je pense autant à des groupes plus qu'à demi sectaires/guruisés genre Ya Ho Wa 13 (avec Fathre Yod) qu'à des artistes en roue libre comme Destroy all Monsters, des radicaux post-hippies-coreux façon Man Is the Bastard ou... Bah Sun Ra et ses Arkestra (etc.) qui étaient eux aussi bien au-delà de "juste un groupe de pros qui se voient pour faires des disques et des concerts". Gong, aussi, nettement, à un moment - pour le style de vie, eux n'ayant pas sorti tant de disques que ça, au fond, et les albums étant quand-même bien structurés je trouve, malgré la folie magnifique de cette musique, à la "grande époque" (j'aimes certains des trucs des différents Gong qui ont enregistré après You mais ça bouge autrement, quoi).

    Sinon oui, pour en revenir à cet AMT : bon album pour y tâter, en effet, y'a un peu tout eux sans diluer la substance, l'aspect que ça prend de plage en plage. Pas leur truc le plus incroyable sur la longueur mais - outre que les deux derniers trucs, voilà, sont assez fantastiques - bah... Si t'accroches à rien sur celui-là, pas sûr que ce groupe soit pour ta pomme. (Non exclusif et que ça n'empêhce personne d'aborder par un autre point, hein, évidemment et comme toujours).

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    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
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    Certe, mais pour celui qui veut juste écouter un excellent album des AMT, c'est compliqué... Après, vu ce qu'ils doivent vendre, vaut mieux faire des tonnes d'albums sans doute. Y a un truc un peu fétichiste de l'objet je pense aussi (surtout depuis le "retour du vinyle"), mais ça a certainement à voir avec l'économie dans laquelle ils opèrent.

    Alfred le Pingouin Envoyez un message privé àAlfred le Pingouin

    Ben en fait, ils ont pas le rapport à l'enregistrement du groupe de rock "standard" un album tous les deux-trois ans, solide, bien packagé, et tournée. Kawabata, et plus globalement les gens dans ces musiques expérimentales ou noise, issues de l'impro et du jazz, ils s'en battent les tofinelles, c'est en général juste une session de plus, juste y a des micros autour. Personne aura jamais le tableau complet et c'est aussi ça qui les intéresse.

    (N°6) Envoyez un message privé à(N°6)
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    Le problème avec les AMT et Kawabata en général, c'est qu'ils en font trop. Trop d'albums, trop d'albums trop longs, trop d'albums trop longs avec des morceaux trop longs. Kawabata t'as l'impression que chaque fois qu'il prend un instrument il t'enregistre un album dans la foulée, édité en vinyl chez Bam Balam Records (disquaire historique à ex-Juppé City). Celui-là à la mérite de balayer un peu le spectre du groupe, de leur côté le plus relou (Daddy's Bare Meat, bouillie informe, Assassin's Beautiful Daughter, probablement enregistré complètement bourré) au côté le plus sympatoche (Suzie Sixteen, une vraie chorale à la Miyazaki) au côté le plus cool (Hello Good Child, sorte de folk Hawkwindien sous Temesta avec un final spacy-as-fuck) au côté le plus qui défonce (Dark Star Blues, 25 minutes et pas une de trop, avec la guitare écorchée de Kawabata à travers une transe vraiment déglinguée, un peu le summum du style AMT) au côté le plus ambient (le très médicinal Transmigration of Hop Heads, dans le genre de Infinite Love, qui arrive à point nommé après la précédente et qui fait comme un massage cérébral de l'intérieur, la succession des deux titres est imparable). Donc un bon AMT pour se faire une idée.

    Nerval Envoyez un message privé àNerval

    Dark Star Blues en live, c'est quelque chose

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