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Žen › Sunčani Ljudi

cd/lp • 8 titres • 42:14 min

  • 1A Gdje Su Staze?4:06
  • 2Pusti Me Da Hodam5:34
  • 3Jugomental4:21
  • 4Četiri Tri Pet Dva5:48
  • 5Opet Gange4:37
  • 6Sonična Taktika3:49
  • 7Tijelo Zna5:46
  • 8Lov Na Crne Tipke8:09

informations

Enregistré par Damjan Blažun, Filip Sertić et Gregor Bajc en mai et juin 2017, aux studios Depth, Friteza, ViBRa et Žen. Masterisé par Saša Rajković (Zarkoff). Produit par Žen.

Artwork/design : Ana Kovačić. Coproduction Moonlee/Unrecords/Vox Project. L’édition LP du disque (sorti également en 2017) porte les mêmes cotes que l’édition CD.

line up

Eva Badanjak (guitare, voix, synthé, sons), Sara Ercegović (batterie, voix, synthé, sons), Ivona Ivković (basse, voix, synthé, sons)

Musiciens additionnels : Jovana Lukić (voix sur Četiri Tri Pet Dva et Opet Gange), Lana Hosni (voix sur Četiri Tri Pet Dva et Opet Gange)

chronique

Le titre dit : « Gens Ensoleillés ». Et il y a toujours quelque chose de lumineux – de chaud et d’éclairé, rayonnant – en effet, chez les Croates de Žen. D’un soleil doux, caressant, presque, diffus – qui enveloppe les choses d’un halo liquide. Mais d’un soleil rasant, aussi – qui déforme les contours, allonge les ombres, les porte, par moments, change les contrastes des lignes et des volumes… Un soleil triste – parfois sali par les exhalaisons des chaussées, des moteurs, des bouffées bruitées, le sentiment qu’un truc cloche. Il y a encore là ce mélange d’une musique toute en scintillements, en touches colorées vives ou nuancées, en lignes claires – tout à coup ou sourdement envahie par des accès électriques qui floutent, percent, texturent le son, le paysage, les scènes. Des poussées shoegaze, post-rock, prises d’ailleurs, les bases « historiques », les histoires connues (et bien) mais ce qu’elles racontent d’autres temps et latitude, d’autres alentours. Leur musique – en dehors même des projections dont elles l’accompagnent en concert – a toujours ce quelque-chose de « visuel », de « cinématographique » qui pourtant ne donne pas dans l’emphase clichée que convoquent depuis longtemps ces termes… Ces images-là ne font pas aplats, objets de contemplation seulement – ce grain du son, cette liquidité pas toujours bien détourée des nappes, des effets, les rendent plus sensorielles, pas seulement extérieures ou alors spatialisées, et les autres sens induits (toucher des souffles, parfums dans l’air – qui parfois assaillent, surprennent, comme ce fumet un peu brûlé sur Opet Gange ; qui de plus alourdit la frappe, vers la fin, mêle des volutes « orientales » – mais l’orient, vu de cette presque-porte des Balakans… ce serait où ? quoi ?

A partir de là, d’ailleurs, sur le disque, quelque chose change, semble prendre corps – un autre, plus dense, moins flottant. L’électricité, justement, tend les compositions, bourdonne. Sunčani Ljudi continue cette veine particulière du groupe – elles chantent toujours en idiome local, jouent toujours cette musique d’un monde où les « grands centres » supposés, mythiques (de création, pour « la pop/le rock », les lieux où il faudrait absolument tourner pour que « ça ait du sens ») envahissent moins, où l’on peut se diffuser autrement dans un monde aux frontières redéfinies (pris « de là-bas », par elles qui ont grandi dans un pays en reconstruction, après les guerres internes dégueulasses dans les années quatre-vingt-dix ; à l’heure où d’autres réseaux existent, aussi) – sans se faire croire que tout est ouvert. (Et à l’heure – confinée pour cause de pandémie – où je l’écris… On voit que voyager n’est plus, n’est pas l’évidence qu’on avait cru, depuis des décennies). Ce n’est pas une déclinaison de plus, pourtant, identique, variation d’un objet au fond immuable. Sunčani Ljudi, avec cette deuxième moitié plus électrique, donc, plus « dure », se fait volontiers plus « terrestre » encore que le précédent, Jantar – malgré son titre. Le soleil et ses gens : on parle peut-être, alors, du point où il touche, sur ce satellite. Nous sommes sous lui, dans son orbite, son aura. Il dévoile où s’avancer (A Gdje Su Staze? : Où sont les chemins ; et juste après, Pusti Me Da Hodam : Laisse-moi marcher). Il peut aveugler, aussi, assommer, exposer. Plus on vit près de son influence, plus on apprend aussi à s’en cacher. Tactiques (Sonična Taktika), jeu avec l’obscurité, ce qui mate et rafraîchi, escamote les tons (Lov Na Crne Tipke : la Chasse aux clés noires – est-ce qu'il s'agit des touches noires bémols/dièses, sur les claviers, de chromatismes).

Ce troisième album joue encore d’une fausse discrétion – d’une simplicité de façade où loger des compositions à l’écriture parfois surprenante, parce que la cohérence s’en dévoile au même moment exactement que l’articulation non-symétrique, que l’harmonie quelquefois contrariée, curieusement altérée. Toujours ce confort piégé – parce que nimbé d’un inquiétude, du sentiment, disais-je, que quelque chose devrait, pourrait aller autrement, qu’on ne s’en sortira pas en faisant comme si tout était bien, accueillant, en dehors de la bulle. Ça prend toujours du temps – d’y entrer, de saisir un peu, de rester… d’en partir. Il y a encore cette impression familière – mais que rien n’est aménagé, en même temps, pour nous flatter si on y passe, pour se conformer à autre chose que ce qu’elles avaient à y mettre, à nous dire… à nous laisser entendre, ce moment où on se trouve, elles et nous, incidemment ou pas sous le même jour.

note       Publiée le samedi 18 avril 2020

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Ben... En réécoutant les trois albums (ou des bouts), on se rend compte que c'es un peu plus insaisissable que ça (le plus ou moins éthéré).

    Et y'a nettement, oui - je le dis dans la chro et j'avais eu l'impression comme toi à la première écoute - une sorte de basculement à partir d'Opet Gange, et même DANS le morceau, qui commence assez "léger", même assez "rêveur", puis une cassure, et le son qui s'alourdit, s'assombrit, je trouve, et cette couleur moins uniformément claire, lumineuse, qui demeure jusqu'au bout du disque. (Avec une plage finale, plus longue, que je trouve bien réussie dans l'optique, comme conclusion).

    Note donnée au disque :       
    Klarinetthor Envoyez un message privé àKlarinetthor

    à la première écoute, j'ai vraiment eu l'impression d'un changement assez radical à partir d'Opet Gange; pour tout dire rien ne m'avais fait dresser les oreilles avant, c'est ptet le coté plus éthéré que d'habitude.