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Deftones › Ohms

  • 2020 • Reprise 093624892137 • 1 CD

cd • 10 titres • 46:16 min

  • 1Genesis
  • 2Ceremony
  • 3Urantia
  • 4Error
  • 5The Spell Of Mathematics
  • 6Pompeji
  • 7This Link Is Dead
  • 8Radiant City
  • 9Headless
  • 10Ohms

informations

Produit par Terry Date

line up

Stephen Carpenter (guitare), Abe Cunningham (batterie), Frank Delgado (claviers, samples), Chino Moreno (chant, guitare), Sergio Vega (basse)

chronique

Réémergence des mutilés obstinés Deftones, l'année de la grosse grippe. Diagnostic ? Grip certain. RDV au skatepark à minuit, sous le grand pont, parfum de mort et de tension. Def cernés, mais épais. Trapus, vigoureux. Leur spleen moite souligné par un sinistre halo de synthétiseurs, Delgado-Rimmel sous le regard désabusé. Après avoir grand ouvert les fenêtres de la piaule et laissé son spleen respirer au large, avec le mal-aimé Gore, Deftones switche en mode vision nocturne et tabasse ta race ... Enfin ça, c'est l'effet de la torve "Genesis", qui avec ces airs racailles, balaie direct mes histoires d'envol un peu nunuches sur la chro du précédent (même si on entend des mouettes plus loin dans le disque), en replongeant Deftones au cœur de la ville froide.

Ohms est urbain, ouais. Deftones arpente ce qu'il reste de l'avenue Nineties avec les yeux désolés du survivant, noyés dans l'albédo du béton invasif. Il est aussi la saveur un peu "futuriste" d'un "cyber-Deftones", et celle de ces graffitis délavés, de quand il y avait plein de groupes qui faisaient de l'"indus", et des gros pixels, qui font des serpents à angles droits sur les cellulaires... Des pixels froids qui éclairent d'une lueur familière et singulière le mammifère nocturne Deftones, cette grosse bête suave qui rumine encore ses angoisses... Celles de Chino L'Amoroso, blotti dans la doudoune en rocaille de ce gros son heavy-groove archi-rôdé, maraudeur. Du charpentier Stephen faisant feu de tout métal, jusqu'à flinguer l'ambiance sur le final en se permettant la coquetterie douteuse d'évoquer du trivial Baroness (on peut arrêter l'album avant, sauf si on aime vraiment le surf). Ohms est "cold", Ohms est "core", Ohms est "neo", "gaze", "hip-hop", il pogote sans se faire prier (Chino bondit dans la stéréo comme le jeune qu'il n'est plus), Ohms est même un peu meshuggien ici ou là, et Ohms rêve en digital... Et son effet aux premières écoutes a pour moi été comparable à Koi No Yokan autant qu'au sans titre de 2003. Frais, mais aussi... Massif. Dense. Intense. Et puis comme chaque Deftones parle à un autre dans cette discographie ultra-cohérente, et que chacun a sa teinte : celle de Ohms est lugubre. Je la perçois en bleu-de-gris. Autant le son de ses guitares, que son joli interlude au synthétiseur ambiance Heat ou Blade Runner. Tout ça fait sens, et d'ailleurs il y a comme une odeur de kérosène dans l'air vicié... Ohms est Deftones zonant dans les débris du passé, comme un être mi-Kaneda mi-Tetsuo rôdant dans l'agglomération aux géométriques écrasantes. Revenant, dans ce tapage des souvenirs bouillonnants, aux ambiances de presque tous leurs albums... Respirant, quand il se l'autorise, en regardant la skyline clignotante, avant de re-sombrer dans sa carcasse chromée-rouillée. Ressassant ses mélodies, encore, évidentes, autant que floues, dégoulinant du Chino et du Stephen, qui semblent n'être toutes que des resucées de ce qu'ils ont fait ici ou là, compactée dans le riffing au gel "fixation extra forte", la sensation d'un Around the Fur plus mûr... Trop facile ?.. Et puis non, mieux que ça... Plus coriace... Ohms fait du pur Deftones. Mais tout en reformulant de façon subtile le code Deftones. Donnant un Deftones compact, tangible, à la mélancolie plus hivernale. "Ceremony", "Urantia", "The Spell of Mathematics", "Pompeji" et "Headless" : toutes celles-ci sont à compter dans l'élite du répertoire deftonesien. Et pourtant malgré ma bonne première impression, j'ai lutté, entre l'incertitude de tenir un vrai Deftones de garde, et le magnétisme vénéneux de ses échos. Même cru tenir un Diamond Eyes II, c'est à dire un Deftones qui passe au contrôle technique mais sortira à peu près jamais du garage... Deftones fan-service, finition carbone à jantes hallu ? "It's just an illusion". Tout n'est pas aussi simple, nous parlons de Deftones, pas d'un banal groupe FM. Plutôt FNM, d'ailleurs. N'oublions pas le vieux tropisme Faith No More, dans la génération neo, et celui-ci infuse encore profond, jusque dans le emceeing au talkie-walkie post-pattonien ("Radiant City" ou "Headless") dont Chino use mais n'abuse pas, avec distinction, tout comme il vous balance à la gueule des tympans ces défigurations à l'acide de sa voix laiteuse, jusqu'aux cris de chat cramé. Enlaidissements crispés contrebalançant toujours sa féminité écœurante, mais tellement plus fine que bien des miauleuses du beau sexe...

Et là, arrivé au point d'abrutissement aux miaou-miaous du Chouino, après je ne sais pas combien de réécoutes maladives à minuit, un constat à l'arrière-goût de paradoxe et d'immuable me saute à la gorge du neurone critique : Ohms aurait pu sortir tel quel en 2000, en se fondant parfaitement dans leur discographie... Et pourtant, ce disque colle tellement avec le feeling 2020, blême, à ressasser encore sa morosité devant l'écran jusqu'à avoir l'impression d'être ce robot pourrissant, mais qui cherche toujours à grailler sa part de beauté.
Ohms en regorge, autant que de malaise.

note       Publiée le mardi 16 février 2021

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(à un moment sur "The Link is dead", Chino imite Domenico)

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Note moyenne        12 votes

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born to gulo Envoyez un message privé àborn to gulo

Clair que Chino sait s'imprimer dans ton cerveau.

Note donnée au disque :       
Raven Envoyez un message privé àRaven  Raven est en ligne !
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"It's aaan illuuuuuuuuuuuuuusioan"

Note donnée au disque :       
Aladdin_Sane Envoyez un message privé àAladdin_Sane

Jamais été fan de ce groupe (j'avoue ne pas avoir creusé plus que ça) mais je reconnais que cet album me fait un petit effet

surimi-sans-mayo Envoyez un message privé àsurimi-sans-mayo

Ouais, celui-là en particulier il est extrêmement difficile à cerner et justement c'est ça qui est bon. À chaque écoute il m'a laissé une impression différente, jusqu'à ce que je finisse par le considérer comme un de mes préférés. Pourtant c'était mal parti, au début j'y trouvais un goût d'autoparodie presque répulsif, alors même que je reconnaissais la qualité des morceaux pris individuellement. Maintenant je dirais que c'est Koi No Yokan qui me fait plus cet effet-là de bon album (voire très bon) mais qui ne me donne pas envie de dire plus que "Deftones font du Deftones" et que je ne réécoute plus trop en conséquence.

dariev stands Envoyez un message privé àdariev stands
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Deftones en live en 2022, grosse ambiance, plein de djeunz qui crient les paroles et s'éclatent. C'est n'imp. Et rien à faire de chez rien à faire, y'a une aura autour de White Pony (et des 3 morceaux joués) que je trouve indépassable (ouais j'aime être pas constructif). (et sinon ce disque a l'air pas mal, en vrai, mais ça s'apprivoise, les albums des Deftones.)

Message édité le 15-06-2022 à 02:00 par dariev stands