Souvent à l’écoute de Kino, je songe aux Cure mais là, dès les premiers accords de ‘Saw the Night’, c’est aussi à The Smiths que je pense (remarquez, entre Smiths…). De manière générale, cet opus sonne plus ‘groovy’, moins froid que d’autres, sans que l’option new wave ne soit reniée pour autant. L’explication réside dans le fait que le groupe se structure en tant que tel, avec des invités, d’où l’impression d’une orchestration riche. Cependant, Victor Tsoi ne renonce pas à son goût d’une production dépouillée et fluide dans laquelle chaque instrument ressort pleinement. The Police me vient aussi à l’esprit pour cette capacité à faire sonner des partoches complexes comme de la pop fluide et toute facile à jouer (Lol !). Il faut dire que les musiciens ne sont pas des manches ; on ne présente plus Alexander Titov (membre de Aquarium) dont la fretless magique amène un peu de la classe de Japan dans certaines chansons (‘Dance’, ‘We Want to Dance'), ce mec a des doigts de velours et ses parties les plus ‘dansantes’ sont sexy as fuck (‘Last Hero') ; la guitare volontiers fraîche, apparemment plus discrète et retenue, assure pourtant et soutient merveilleusement dans cette trompeuse discrétion. J’aime ‘Noch’ mais il s’écoute comme un puzzle ; une première écoute pourrait donner une impression de manque de direction artistique tant les chansons varient dans les atmosphères : ‘Mother Anarchy’, c’est du post punk avec le mot ‘punk’ dedans, ‘Saw the night’ et ‘Last hero’ dégagent ce groove typique des Smiths, ‘Dance’ sonne plus retenu, idem pour ‘Game’ carrément chanson dans son écriture… Sans oublier quelque chose de typiquement soviétique dans certains choeurs (‘Saw the night’, ‘Life in the windows’). En même temps, Kino, c’est ça ; on a beau jeu de tirer des comparaisons avec les grands noms de la scène new wave de l’Ouest, ils ont leur patte à eux. Victor Tsoi est un musicien folk à la base, sa voix a un timbre bien spécifique, une gravité typiquement russe, et puis n’oublions pas que le contexte U.R.S.S. de l’époque joue un rôle historique et artistique certain. Du coup, les pièces du puzzle prennent une coloration différente et l’on réalise qu’elles sont bien part d’un même tout. Quatre bons bonus épicent cette réédition cd, lesquels cette fois me font bien songer aux Cure. Je commence à mieux saisir l’aura de ce groupe auprès du public russe…