La tragédie grecque version 93…Choeur des Enfers s’élevant de la terre, cymbales tranchantes, arrière-fond nocturne, sans étoile…Maldoror n’avait peut-être pas dit son dernier mot après tout, la terre n’avait pas encore vomi tout son mystère. Mais saviez-vous seulement que le shéol avait une porte débouchant sur la campagne anglaise ? Non ? Maintenant vous voilà prévenu(e)s. Basé sur deux cauchemars expérimentés par le pauvre David Tibet, ‘The stars on their horsies’ se présente comme une pièce de 39:39 minutes (toujours ce goût des symboles), une tapisserie nocturne, angoissante, dont les seuls instants de paix sont quelques courtes interludes au piano…Cet album pourrait servir de B.O. à la visite aux Enfers de Dante ou illustrer en musique les gravures de Doré sur le même thème. La noirceur est terrible car latente, tapie en permanence, sans véritable montée, sans la moindre sonorités claire ou chaude; même le piano sonne glacé, même la cymbale claque sèche comme un glas. L’imperceptible narration n’aide bien entendu pas à dissiper cette obscurité opaque, ni les bruissements que l’on perçoit après la vingtième minute qui pourrait aussi bien être une procession de spectres trainant les chaînes de leur malédiction sur les cailloux du sentier. Ce n’est qu’à partir de la vingt-cinquième minute que la voix enfin identifiable de Tibet agit presque comme un phare dans cette nuit sans fin. Je n’ai jamais très bien compris ce qu’évoquaient pour lui les étoiles et les chevaux mais cette symbolique revient de manière quasi obsessionnelle dans son oeuvre et pas de manière très joyeuse cette fois-ci. Après un mini climax, la noirceur retombe, calme, inéluctable, sans issue et les choeurs qui s’élèvent fugacement (anges ou démons ?) n’y peuvent rien, ni même les ultimes notes de piano, gouttes de pluie glacées dans un puits sans fond. Une promenade nocturne le long du Styx mis en musique, rien de moins…