Atrium Musicae de Madrid › Musique de la Grèce antique

La musique de la Grèce antique a ses spécialistes : Petros Tabouris, Christodoulos Halaris, Conrad Steinmann, Annie Bélis et Kérilos. Travaux organologiques, dissection d'annotations musicales complexes, étude approfondie des textes d'Aristoxène de Tarente et des particularités de la langue grecque, tout ça est analysé dans un grand puzzle fait de fragments de papyrus, de bouts de colonnes et de morceaux de fresques à reconstituer. Des tableaux sonores sont dressés par chaque ensemble comme autant d'ébauches, de possibilités explorées sans solution gravée pour de vrai dans le marbre. Parmi tous les enregistrements disponibles aux styles articulatoires propres, en voilà un absolument incontournable venu d'Espagne, cet autre carrefour d'influences méditerranéennes. L'Atrium Musicae de Madrid modifie toute installation audio pour en faire une platine à remonter le temps. Il y a de la vie là-dedans, on pense au Carmina Burana du Clemencic Consort. Des mélodies de langue morte paraissent renaître avec espièglerie grâce aux compadres Paniagua. C'est qu'ils ont la musicologie taquine ; leur archéologie de l'imaginaire avance des hypothèses théâtrales jusque dans des bourdons antédiluviens et des effets de cluster, avec des attaques de cordes dissonantes qui plairaient, dit-on, à ce diable d’Eugene Chadbourne. Les mélopées plaintives rappellent le chant grégorien, les messes païennes. Comme l'indique la céramique à figures rouges en illustration, la réflexion part aussi d'instruments recrées depuis les images qu’on trouve sur des vases d'un autre temps. Harpes, luths, lyres, percussions et cornemuses antiques (ascaules), l'Atrium Musicae insiste sur la résonance exotique de reconstructions expérimentales. Cette musique ancienne appartient au domaine de l'étrangeté, brouille les acquis soi-disant modernes, les font éclater en autant de fragments disparates. Alors, du coup : l’œuf ou la poule ?