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Nick Cave and The Bad Seeds › Skeleton Tree

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GuyLiguili      jeudi 20 février 2020 - 08:29
Kissthecatconcept      mercredi 24 février 2021 - 16:28
Chris      vendredi 3 janvier 2020 - 10:59
SEN      lundi 2 avril 2018 - 06:53
Saïmone      dimanche 1 avril 2018 - 21:40
Raven      dimanche 1 avril 2018 - 14:27
Shelleyan      lundi 14 décembre 2020 - 08:02

cd • 8 titres • 39:44 min

  • 1Jesus Alone
  • 2Rings Of Saturn
  • 3Girl In Amber
  • 4Magneto
  • 5Anthrocene
  • 6I Need You
  • 7Distant Sky
  • 8Skeleton Tree

informations

Enregistré à Brighton et La-Frette-Sur-Seine entre 2014 et 2016

line up

Martyn P. Casey (basse), Nick Cave (voix, piano, piano électrique, synthétiseur, vibraphone, chœurs), Warren Ellis (synthétiseur, loops, piano électrique, piano, guitare baryton, violon, alto, percussions, chœurs), Jim Sclavunos (percussion, vibraphone, cloches tubulaires, chœurs), Thomas Wydler (batterie), George Vjestica (guitare acoustique, chœurs)

Musiciens additionnels : Else Torp, (chant sur "Distant Sky"), Ellie Wyatt (violon), Charlotte Glason (alto), Joe Giddey (violoncelle)

chronique

Annoncé comme l'un des plus lénifiants de son auteur, dans la suite directe des gospels à tartes And no more ou Boatman's Call ou des berceuses penaudes de Push The Sky Away, Skeleton Tree s'annonçait dès le départ comme un four. Au final, c'en est bel et bien un. Éteint. Embaumant dès l'ouverture une singulière odeur de crevé. Presque chimique, l'odeur. Phosphorescente ou quasi. Froide. On est condamné à s'y enfermer ensuite pour une demie-heure de cafard aux contours bien nets, avec comme hôte un père en deuil. Qui a bien sûr pris la peine de se coiffer et d'enfiler son costume trois-pièces... "Mangez-en tous, ceci est ma larme, une larme qui j'ai soigneusement sculptée avec mes zicos, impliqués jusqu'à la soumission (Michael Gira et Son Orchestre peuvent se rhabiller)". J'aurais dû fuir. Mais non, j'ai été attiré par la petite lueur verdâtre radioactive de cette pochette. Malgré une mise en scène promotionnelle de son spleen - notamment à coups de "documentaires/making-of" à la Paris Match d'une suffisance et d'un narcissisme feutrés à souhait qui lui donnent cet air persistant de BHL des chanteurs gothiques, sur Skeleton Tree - et c'est bien tout ce qui nous intéresse en vérité - la réussite est aussi fragile que réelle. Nick Cave titube en équilibre entre l'obscène et le digne, complaisant dans le morbide et en même temps d'une pudeur écœurée, comme un bouclier contre l'empathie, la pitié... "Don't touch me".

Sa musique baigne dans un halo singulier. Elle fige et touche au cœur. Le vide laissé par les démissionnaires Bargeld et Harvey - dont les départs n'étaient pour rien dans la chiantise de la musique (elle l'était depuis un moment, depuis qu'on avait laissé Nick Cave aux olibrius barbus en taffetas) - est justifié non pas par une économie fainéante - malgré des passages objectivement quelconques (le final, "Magneto" ou "Anthrocene") - mais par ce qu'il suffit d'avoir pour tresser une ambiance : un synthétiseur, et des chœurs. Et c'est tout. Guère plus de protagonistes qu'il n'y en avait sur les meilleurs Leonard Cohen. Et ça fera un purgatoire de la taille d'un mouchoir de poche. Avec rien qu'un œil blanc à la place du cœur, et des signes qui ne trompent pas : si le code couleur choisi pour cette pochette en forme d'écran archaïque est le même que pour les albums de glace de feu Peter Steele, c'est que le thème central est bien le même. Qu'il nous a tous touché, et nous touchera tous. C'est en restant suspendu à cet Arbre Squelette, à ces moments dans sa musique qui nous font regarder dans le vide sans bouger, qu'il s'épanouira de son horreur tranquille, clinique. C'est là que se révéleront des moments d'éclaircie du coup aussi déchirants, presque des rayons de Soleil, même, "Rings of Saturn" ou "Distant Sky". Des titres du matin. Objectivement, ces passages-café sont bien des resucées du précédent album, avec juste un peu plus de gravité, rien de plus. Mais Skeleton Tree a quelque chose de pur et de beau, que Cave n'avait peut-être pas effleuré depuis "Stranger Than Kindness". Il y a dans ce disque auquel je ne croyais pas des manières de cuistre touché par la grâce, une mystique de dandy bellâtre à terre plus que jamais sincère et - plus encore - une possible volonté de mortification suprême, qui vous réconcilient presque instantanément avec ce gland ténébreux. Qui sonne comme il a toujours sonné ici, finalement, à un point troublant : comme s'il s'était entraîné au pire drame de son existence toute sa discographie, et qu'il était enfin mis en face et... rien. Rien qu'un vide béant qui lui inspire rien ou presque, que des chansons parfois guère plus qu'esquissées, simples, lentes, souvent magnétiques. RÉELLES. Au moins autant que la présence des anges, palpable aux échos d'horreur sourde dans l'ombre de ces synthétiseurs comme captés du fond du fion d'une ruelle de Prypiat. Les anges bougent à peine, mais assez pour qu'on sache qu'ils sont là. Et qu'ils ne nous aiment pas. En fait ils se font sentir dès les premières secondes de l'album...

Parce qu'un ange, ça pue ; ça a comme cette odeur de chez le dentiste - et sur "Jesus Alone", cette introduction au vilain museau de certitude, on les aura rarement tant sentis. Tentative d'omniscience du fond du funérarium. On ressent l'appel et cet absence d'horizon auquel s'agripper. Que la paroi lisse de la perte. On est pas loin de l'universelle envie de vomir après un enterrement, faite chanson. Du cliché, oui, mais en néons blafards, et ce qui restera peut-être comme son plus sinistre morceau (bien plus que ses murder-ballads hallucinées qui vocifèrent et grimacent tout ce qu'elles peuvent). Clinique. Tangible. Avec ce sifflement comme une douleur lancinante qui nous tient l'âme par les burnes et ne les lâchera pas. "With my voice, I'm calling you". Appel à toutes les victimes collatérales de Dieu. Le reste de l'album, moins menaçant - quoique - s'exprimera dans toutes les nuances de la fatalité au presqu'espoir. Du noir au vert froid. On ne saurait réduire Skeleton Tree à un album déprimant, mais les rayons de Soleil que Cave laisse filtrer par les stores dans sa musique en soulignent la lividité. Rappelant à qui l'avait encore oublié que la lumière est infiniment plus cruelle que l'obscurité. On croit bien dans ces instants plus lexomil ou earl grey, à une respiration... On croit pour tout dire à un apaisement de la tristesse. Mais elle est encore là, sous la peau... En fait elle n'était pas partie... Ne partira jamais... Il faudra vivre avec. Et chanter, si on en a la force, "I Need You".

note       Publiée le dimanche 1 avril 2018

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Kissthecatconcept Envoyez un message privé àKissthecatconcept

A écouter dans le noir, évidemment.

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Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
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ça y est, les écoutes en complet, en bossant le soir, ont débloqué le truc. Un Cave solide, beau pas aussi poignant que prévu mais quand même fort une fois qu'on s'est installé dedans...

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Raven Envoyez un message privé àRaven
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Il fait toujours son effet le ptit salaud... c'est sûrement ce qu'on appelle la demi-vie... Rien que pour "Girl in Amber" je lui foutrais bien la note maximale, tiens. Sur le dernier y a "Hollywood" qui semble taillée pour vieillir pareil, mais ça s'étale trop en comparaison, ou ça essaie d'aller plus loin que l'ambiance de celui-ci, son obscénité "captation du deuil en HD bien habillé" et sa hantise réelle, collante. Là il y a quelque chose, définitivement, quelque chose de très... anormal... et triste, même si c'est dit et redit ben ça le sera pour la énième fois, parce que ça l'est, crûment... Ces guindés ont capté une lumière, une matière, un son particulier, qu'il n'y a sur aucun de leurs disques précédents et sur lequel le dernier semble vouloir broder.

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Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
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Ce dernier sera le test pour moi parce que malgré de fort bons titres sur les derniers albums, je suis assez d'accord avec Nerval.

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Nerval Envoyez un message privé àNerval

Personnellement j'ai pas tenu très longtemps. Nick Cave je pense que je sature. C'est un peu comme Tom Waits maintenant, les albums se ressemblent tous, même ambiance, même façon de chanter, etc. Et ça dure plus d'une heure...