The Black Angels › Indigo Meadow

‘A slew of gypsy acid cats on their way off to Holland; with their witchy veiny claws, they're grabbing at your wallet.’. Moi, c’est mon coeur que ces chatons-là ont accroché. Bon sang, cette chanson, ‘Holland’, je peux me l’écouter en boucle encore et encore ! Le groove lent, l’orgue morose, les accords tristes et Alex Maas au mieux de sa forme avec son timbre de jeunot déprimé. Les Black Angels ont décidé de délaisser provisoirement les pochettes aux couleurs qui donnent mal à la tête au profit d'un visuel hipster; ils ont aussi abandonné pour de bon les explorations psychédéliques pour se consacrer à un format plus accessible inauguré avec le précédent opus (on dépasse rarement les quatre minutes). Alors que ce dernier m’avait fait douter légèrement, ‘Indigo Meadow’ m’a repoussé d’un coup dans les bras des Anges Noirs. Moins d’acide, plus de mélodie ? En tout cas, pas besoin d’aller loin loin pour se faire cueillir par les morceaux tueurs, les Américains nous balancent coup sur coup ‘Indigo meadow’, ‘Evil things’, ‘Don’t play with gun’, ‘Holland’ qui résument assez bien la nouvelle direction: des orientations plus groovy, moins prise de tête, mais toujours assaisonnées d’une grosse louche de fuzz, d’orgue tripé, de réverbération spectrale. Bien sûr, le combo ne peut s’empêcher de piller un peu les Doors (‘The day’, ‘Love me forever’, ‘Broken solider’) puisque ça a fonctionné de par le passé mais ils le font si bien que j’ai du mal à leur en tenir rigueur. N’étant moi-même pas un puriste du rock psychédélique, je suis assez friand des formations qui en reprennent le feeling en l’accordant au goût du jour dans la production; après, ce sont les émotions qui parlent. Il y a chez les Black Angels une forme de mélancolie tantôt apaisante tantôt presque menaçante (après tout, ils n’ont pas choisi leur nom au hasard) qui me ravit. Même sur l’hypnotique ‘Always maybe’ subsiste un doute nappé de réverb’ comme si le bad trip était toujours possible bien qu’il ne survienne que rarement. Les musiciens s’essaient même au dépouillement spectral (‘War on holiday’, ‘Always maybe’) et en ce qui me concerne, ça fonctionne. J’aime ces champignons pas trop forts mais toxiques sur les bords, les hallucinations qui ne te font recentrer ni Jésus ni Buddah mais se contentent de donner des formes bizarres aux choses. D’ailleurs, est-ce seulement moi mais quand j’écoute ‘Twisted light’, j’ai presque une impression d’Alice Cooper au micro sur le couplet (sans avoir rien pris, je précise). ‘Indigo meadow’ ne réconciliera sans doute pas ceux qui pensent que les Black Angels sont des imposteurs et que leur rock psychédélique est aussi édulcoré qu’un coca light; pour ma part, je l’adore. Je lui sens un halo torve qui confère à son groove une aura maladive, ‘Strawberry field’ mais avec un goût de canneberge. Comme l’exprime le groupe sur le génial final (celui-ci, on eût aimé qu’il débouche sur une bonne jam barrée): ‘Girl, when I see you, I think the world's ok. I don't know how you do it but be it as it may.’ L’obscurité a-t-il disparu ou s’est-elle juste teintée de reflets indigo ?