L’histoire avait tout d’une blague que la vie se chargera de tourner en tragédie; forcément vu les ingrédients de départ…Débutons avec le plus drôle: un groupe punk fondé en 1989 par Jean-Paul et Jamie Toulon, âgés respectivement de…dix et neuf ans ! Sauf que papa (Vern Toulon) qui les encourage pleinement est lui même issu de la scène punk et a tenu la guitare pour le collectif industriel Missing Foundation. Il enseigne à ses rejetons quelques rudiments et leur programme une boîte à rythmes, laquelle est finalement remplacée par un vrai batteur guère plus âgé que les frérots (dix printemps lui-aussi et un beau-père keupon). Leur démo est écoutée par l’acteur/chanteur/humoriste Mojo Nixon qui convainc son label de les signer. Le premier album sort donc la même année. Evidemment, vu les thèmes abordés (le sida, les sans-abris, la religion) aux côté de sujets plus anodins (le skate, les hot-dogs), de fort soupçons quant à l’écriture des titres par le paternel n’ont pas manqué de planer, ce qui n’enlève rien au ‘charme’ de l’histoire. Car il faut bien l’admettre, musicalement, ce disque est un sacré chaos. La batterie n’est pas toujours juste, paraît lancer son tempo dans son coin sans que la guitare et le clavier (qu’on n’entend pratiquement pas) ne se greffent réellement dessus, ça crisse, ça grince, il y a des larsens, les textes ne sont pas très fouillés…L’intérêt réside ailleurs. Si Zéro de Conduite optait pour le punk 77, avec Old Skull, c’est vers le hardcore qu’on tire. Même si c’est papa qui a composé le tout, la rage que ces gamins mettent dans leur musique est impressionnante, voir flippante. Qu’il pige ou non la portée de ce qu’il raconte n’empêche nullement le jeune Jean-Paul d’y mettre tout son coeur, ses hurlements de gosse dament même le pion à certaines formations adultes (écoutez-le sur ‘Let’s go kill that man’ ‘James’, ou ‘Jesus died on the cross’, que de rage chez un si jeune enfant, ça fait limite peur). Heureusement, les chansons ne sont pas trop longues car elles ont tout d’un enchaînement de bouillies sonores, ce qui se révèle un peu lassant; je dois cependant confesser qu’elles ne manquent pas d’intensité et compensent en atmosphère ce qu’elles n’ont pas en mélodie. Ce côté hardcore, limite punk indus involontaire, parvient à nous tenir en haleine et si on sourit au départ, c’est en grimace qu’on termine…La suite est moins drôle; après un premier split, les frangins reforment le groupe, enregistrent un second album mieux ‘maîtrisé’, alors qu’ils n’ont toujours pas fêté leurs seize ans. Jusque là tout va bien. En 2001, papa clamse à l’âge de 46 ans après des années dans la rue, maman (divorcée) meurt dans un accident de train. Jean-Paul parti sur New-York où il jouera dans diverses formations crust tombera dans la drogue, fera de la prison, s’en sortira pour mourir en 2010 le jour de l’anniversaire de son frérot. Ce dernier suivra une voie similaire en jouant dans quelques groupes keupon, finira dans la rue en proie à une addiction toujours plus marquée et se suicidera sept mois après la mort de son frère. Des gosses atteints du virus de la rage si jeunes ne pouvaient que mal finir, les bonnes fées, ça n'existe pas au royaume du punk...