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2 x CD digipack
Quelle étrange scène que celle de la minimal wave, et quel étonnant label que Anna Logue Records, créé par Marc Schaffer (moitié de Solitude FX) peu de temps après le succès de sa compilation ‘Reminiscent’ sortie en 2004 sur Genetic Music qui rassemblait la crème de la crème du mouvement sur trois LPs et devenue introuvable depuis. L’engouement pour les musiques DIY et les synthétiseurs analogiques n’est plus à démontrer ni ici ni ailleurs, et parmi les nombreux labels s’attelant à refaire fondre du vinyle on peut même différencier des angles d’approches malgré une évidente similitude stylistique. Bien sûr il y a Minimal Wave (le label) qui doit son succès par son attitude et la qualité de ses rééditions, Vinyl-On-Demand pour les bidouilleurs, Enfant Terrible pour les excentriques, Dark Entries et Anna Logue pour les introuvables et les romantiques. Je simplifie bien évidemment. L’étonnant, chez Anna Logue, c’est que le passé et le présent se mélangent parfois : un groupe comme Camera Obscura (synthpop de York, pas le groupe de pop écossais) soudain dépoussiéré s’est surpris à vouloir non seulement réenregistrer ses anciens morceaux mais aussi jouer un live en 2005, soit vingt ans après la fin de leur carrière. Twins Natalia, dans le même genre, n’est autre qu’un supergroupe des membres de Poème Electronique jouant les compositions de Marc Schaffer. Un peu comme avec le principe physique selon lequel l’observateur influence la scène observée, rares sont les excavations qui n’affectent pas d’une manière ou d’une autre le cours de la musique elle-même. Ouvrons donc par ce qui procède de l’archéologie : chez Camera Obscura c’est vraiment l’aspect new-wave électronique qui est prononcé, à la John Foxx, OMD, and co. ; le succès ne fut pas au rendez-vous pour eux à la grande époque mais les retours sont aujourd’hui dithyrambiques, comme quoi, si cela ne marche pas, attendez vingt ans et la génération suivante saura vous retrouver. Il y a Cultural Amnesia, sorte de Fad Gadget noisy dont les origines remontent vraiment aux origines de la K7 culture et dont certains morceaux ont la particularité d’accompagner les textes d’un certain Geoff Rushton, aka John Balance. Voilà qui date. Pareil pour Design et Boys Du Severe, le genre de groupes sortis sur quelques compilations electro belges au début des années 80, puis qui réapparaissent ici après un gros boulot de détective. Plus sombre, la cold wave de Chains of Command est superbe et méritait bien cette seconde chance, tout comme le post-punk gothique de The Hands of Cain un peu plus loin, sorte de Sisters of Mercy grec. J’en arrive au diamant de cette compilation, le ‘Changing Colors’ de 1982 des New Shiny Things, ou comment terrasser l’auditeur avec trois fois rien. Pour moi ce titre est à placer tout là-haut, aux côtés de ‘Goodbye Horses’ de Q Lazzarus sorti neuf ans plus tard, et pour ajouter à la comparaison, le duo n’a pratiquement rien sorti d’autre. Son chanteur Billy Harrigan n’étant plus de ce monde, son "I’ll be coming back some day" clamé d’une voix tremblotante sonne d’autant plus tragique. "Changing history / Changing you and me…" Il faut bien revenir sur terre, et Sudeten Creche le fait très bien avec son electro-pop mélancolique de la même teneur. Pour en finir avec la new-wave, mentionnons encore la présence des italiens énergiques de Monuments et Carmody, un peu plus loin Chromagain et Intelligence Dept, ainsi que le Gary Numanesque Paul Chambers. Viennent les bizarreries. De France, avec le titre perché du faussement neuneu et merveilleusement retors ADN’Ckrystall à qui l’on doit aussi le logo du label. D’Italie encore, avec Lisfrank. De Nouvelle-Zélande, avec Car Crash Set et son réductionnisme mesmérisant. D’Angleterre, avec l’étrange Spöön Fäzer et sa minimal wave orientaliste puis Stranger Station avec lequel j‘ai un peu de mal (le côté déglingo à la Bakterielle Infektion, sans doute). D’Allemagne, avec Dilemma et sa corrosion proche de Portion Control. Et bien sûr d’Amérique, avec l’anti-héros Sleep Museum qui démonte tout le romantisme analogique pour mieux chanter sa poésie dérangée et un brin misanthrope. De là, on en arrive aux découvertes plus récentes, tel le danois Delayscape avec son IDM analogique qui fleure bon l’ambient nineties dont nous reparlerons par Sun Electric, le label Nova Zembla & consorts. Autre fer de lance du revival, The Silicon Scientist bien sûr, qui nous offre ici trois titres de space disco mélancolique (par manque de meilleur terme) de toute beauté ainsi que sa participation au trio Sonnenbrandt dont je vous ai déjà parlé ici. Mes derniers mots vont à Poème Electronique, auteurs du tube romantique ‘The Echoes Fade’ en 1982 et leur enfant hybride Twins Natalia, dont on retrouve les deux titres exubérants sur leur album The Destiny Room. Alors oui, cela fait du monde. Marc Schaffer est un type généreux, trop, qui privilégie le plus plutôt que le moins tant ses sorties regorgent de posters, cartes postales, 7’’ ou CDs supplémentaires. Cela se traduit aussi dans la vraie vie puisqu’il est en plus de tout cela en charge d’un refuge pour animaux au nord de l’Allemagne. Anna Logue est un label d’amoureux pour les amoureux, mariant passé et présent, style et passion sans trop se soucier du qu’en dira-t-on. C’est tout à son honneur, et avec la quantité et la variété de sorties depuis sa création, il y a de quoi faire.
note Publiée le jeudi 11 août 2016
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Ooooooh, ça sent l'achat à plein nez.