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Sun City Girls › Torch of the Mystics

lp/cd • 11 titres • 38:00 min

  • 1Blue Mamba3:10
  • 2Tarmac 234:28
  • 3Esoterica of Abyssynia3:15
  • 4Space Prophet Dogon7:04
  • 5The Shining Path3:03
  • 6The Flower3:18
  • 7Cafe’ Batik2:46
  • 8Radar 19412:41
  • 9Papa Legba2:49
  • 10The Vinegar Stroke1:58
  • 11Burial in the Sky3:48

informations

Enregistré et mixé aux Cloaven Studio, Tempe, Arizona, en juillet 1988. Masterisé par Wade Olson aux studios Mission recordings, Phœnix, Arizona, en 1989. Remaster CD par Mark Gergis, février 2015.

Artwork : Mary Alice Clark. La liste des instruments mentionnés pour chaque musicien est trop longue pour que l’outil d’édition du site permette de la reporter entière, pour chacun des trois. Elle contient, outre les évidents basse/guitare/batterie, des instruments traditionnels africains, indonésiens « avérés »… et des propositions telles que, non exhaustivement donc : « corne d’appel de l’esprit du cerf », « vertèbres de serpent à sonnette », « feux d’alcools » ou « sang du luth de la lune ». L’édition originale (LP Majora) de 1990 a été pressée à 1000 exemplaires.

chronique

Tant qu’à jouer d'un folklore, autant l’inventer. Sans fabriquer toutefois au hasard, n’importe comment ; sans que ce soit une arnaque, une approximation mal mise d’entre-deux, trois, plus l’infini… À la question d’une quelconque authenticité Sun City Girls avaient opté, me semble-t-il, pour cette solution-ci. Brouiller la limite des de-toute-pièce et des répertoires repris, réadaptés, nourris nouvellement par les routes empruntées, les circonstances où ces bouts remis ailleurs seraient joués, devant quel public, dans quel état celui-là et les musicien eux-mêmes. Sans sous-titres, autant que possible, et les indices sibyllins. Avec un sens certain de la Légende, cependant ; ou comme on préférera, selon, en poussant au devant : l’aura, l’esprit, la présence unique d’une entité musicale, d’un groupe de quelques humains en train de s’ouvrir ce chemin.

C’est bien cette Cité du Soleil (on se rappellera au passage, on en tirera ou pas des conclusions quant aux intentions premières des trois types, que Sun City est à l’origine le nom d’une ville d’Arizona entièrement peuplée de retraitée, "réservée" à eux, entourée de vigiles) qui se transporterait partout avec eux, transformerait les places de passage plutôt que de s’y déléguer… Tout l’inverse à vrai dire – ou mieux : un en-dehors-de-ça – d’une logique de "marché-world-music" – qui livrerait clé en main des rencontres parfois hasardeuses, des nouveautés assemblées sur des gammes neutralisées, terrain de rencontre artificiel, platement formel, produits finis tellement soucieux de justifier chaque trait que tout ce qui pourrait y entrer s’y verrait réduit finalement en "typique" ou pire ou plus sacralisé – article de musée mis en vitrine de son vivant, arrêté. Saisie par des musiciens aussi versatiles, de tels individus – aussi instinctifs, aussi débordants, lucides et radicaux ; il faut se rappeler aussi qu’au départ, que ces trois ci occupaient les scène de leurs bleds au côté de gens aussi tranquillement cramés et sans complexes que Meat Puppets et consorts – la démarche avait toutes les chances de s’incarner en pièces sauvages, parti-pris décochés à la brut, pièces et performances de toute-étrangeté mais aux motifs fermement déterminés, affirmés.

En accès instillés, délivrés – familiarités piégées, déjà-vu tordu, tourné pour qu’on ne puisse jamais mettre avec certitude le doigt sur un quand ou un où. En une musique brillante, aussi, à l’occasion ou mieux. En voici une… Plus que d’autres disques – sans exclusive mais certainement pas au hasard : le fameux dédale des 330,003 Crossdressers from Beyond the Rig Veda ; le très inhospitalier Dante’s Disneyland Inferno ; la somme quelque peu effrayante, intimidante, de leur Box of Chameleons… – Torch of the Mystics est tenu d’une confondante cohérence. Assez miraculeuse, au vrai, vue la disparité pourtant des matériaux brassés, balancés ici. Question de séquençage, peut-être aussi – audacieux mais au fond parfait. L’entrée en matière si incisive, rock instrumental – travaillé par autre chose… une espèce d’Afrique ? – si direct, frappeur, si prompt à jeter sa danse, son balancement spécial. Le même continent non-dit continué sur d’autres plages – motifs, modes obstinés, mélodies loin-perchées au dessin très net, timbres, à attaques décidés et acrobates. Les voix, par dessus, qui vocifèrent ou psalmodient, jaculent en dialecte, entendu seulement là où ceux-là auront décidé de le proférer. Dialectique sans entrée, saga d’onomatopées, blague frôlée qui tourne à la place belle et vraie énigme. Pays qui culmine sur le haut-juché Space Prophet Dogon – celui-là, au vrai sonne bel et bien Mali Trouvé, rives d’un Niger, affluent en voie jusqu’alors inconnue. Aucun des mots dits, répétons-le, n’est répertorié - consigné dans nulle étude indigène. Cette mélodie si purement tracée – si magnifique quand le chant et la guitare les prennent à l’unisson – sortie d’aucun canon, d’aucune collection. À moins que la ruse, ici, soit que si : il y ait bien emprunt, retaille d’une souche, littéralement appropriation ? Si vous pensiez qu’ils allaient lever le doute… Ensuite ça part encore à travers d’autres friches, ça se cale dans d’autres espaces – enclavés, sous-terrain, trouées. Les gars se permettent de reprendre… Eh bien la Lambada. Oui. Tube de l’été 1989, chanté alors en portugais-brésilien par Kaoma (groupe par ailleurs implanté en France). Ou si l’on préfère, Llorando se Fue, chanson écrite huit ans plus tôt – en espagnol – par les Boliviens Los Kjarcas, que ceux-là déclareraient pillée par les premiers cités. À moins qu’eux l’aient auparavant prise sans la déclarer à quelque trouvère de village qui la baladait depuis ailleurs encore… Toujours est-il qu’on la reconnaît bien, l’ici nommée The Shining Path. Elle n’est pas pareille, là. Rendue bien rude. Je ne suis pas sûr, si je l’avais ouïe d’abord sans lire les noms, que je ne l’aurais pas crue issue véritablement de quelque volume de collectage andin. Après ils nous égarent encore. Dans cet Orient douteux, plein de connexions en trous de ver qui vous aspirent d’un bord de continent à sa frontière de l’autre bout – entre Bali et Bornéo via d’autres fumeries au repli d’un Absurdistan transitoire. Même quand ça glisse blues, on n’est plus trop certain si c’est Hawaii ou le Mékong, une Las Vegas Autonome soudain poussée aux portes d’Oulan-Bator ou à l’orée d’un bois Baka ou Dayak.

L’électricité tient tout ça. Ici souvent fulgurante mais pas comme ailleurs éclatée – qui exulte et ravit plutôt que de torturer les enveloppes et tordre les lignes-guides. On entendrait une sorte de John Fahey qui se serait mis à la bibine pour oublier Jésus plutôt que de prétendre qu’il s’agirait de l’inverse. Ou bien on arrête d’y penser trop, aux moments inadéquats. On s’engouffre. Trente-huit minutes plus tard, on n’a pas vu filer grand chose. Fuser beaucoup, oui, en revanche. Ça nous siffle encore aux tympans. Ça fait comme un vide – qui de toute façon est lui aussi là où on les a suivis, inimitable, inimité, mobile voir amovible, escamoté mais pas factice.

note       Publiée le samedi 25 juin 2016

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Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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C'est mal me connaître, complètement STRAIGHT EDGE que je suis...

J'ai recalculé/rétabli la bonne durée sinon, merci WZX de m'avoir signalée l'erreur.

Message édité le 29-06-2022 à 11:01 par dioneo

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nicola Envoyez un message privé ànicola

C’est un des effets du LSD.

Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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Ah oui tiens. En fait je pense qu'il faut juste inverser les deux chiffres des minutes, 37 plutôt que 73.

Note donnée au disque :       
WZX Envoyez un message privé àWZX

@Dioneo je ne sais pas où tu avais pêché ton minutage ou si tu étais tombé dans une faille spatio-temporelle ce jour-là, mais en soixante treize minutes tu peux passer presque deux fois le disque normalement. En tout cas chez moi il dure plutôt trente-huit minutes.

Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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Oui, bien d'accord là-dessus, parfait pour entrer dans leur disco... Pas hirsute-barbelé comme d'autres, même très "fluide" mais pas pour autant un bobard sur "la marchandise" - c'est à dire qu'on ne va pas crier à la trahison en posant après l'oreille sur d'autres disques plus ostensiblement touffus et/ou âpres ou simplement bizarres en première bouche. (Faut que je vous cause de celui qui parle de l'Espionne, tiens... Pas doudou celui-là, vindiou !).

Petit bonus : version live de Space Prophet Dogon avec Eyvind Kang (et peut-être bien quelques litrons éclusés mais avec eux allez savoir... Je vais m'envoyer bientôt le film dont c'est tiré d'ailleurs. Pas impossible du tout qu'on en reparle aussi, ça, si je me fie aux quelques extraits pour l'instant survolés).

(Je veux bien te croire, pour le choc transit-RATP, sinon).

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