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Gevende › Sen Balık Değilsin ki

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Membre Note Date
stickgrozeil      jeudi 3 juin 2021 - 09:24
Darkanar      mardi 7 février 2017 - 21:13
Masca      lundi 23 janvier 2017 - 23:17
Klarinetthor      lundi 2 janvier 2017 - 13:11

cd • 9 titres • 58:33 min

  • 1Vigeland6:11
  • 2Esinti8:10
  • 3Akvaryum9:48
  • 4Igloo6:25
  • 5Kadıbostan7:11
  • 6Sanki5:37
  • 7Beboyi Yerkı6:00
  • 8Sustum7:33
  • 9Nayu (alternate version)2:24

informations

Produit par Sinan Sakızlı. Enregistré à Stüdyo Baykuş.

line up

Ahmet K. Bilgiç (chant, guitare), Gökçe Gürçay (batterie), Okan Kaya (basse, choeurs), Ömer Öztüyen (alto), Serkan Emre Çiftçi (trompette)

Musiciens additionnels : Eivind Aarset (guitare 7)

chronique

Ça se durcit chez Gevende. Dès l’entrée d’une rythmique entreprenante, de cuivre conquérant, des riffs métalliques et tranchants, ça tape fort. Gevende est allé assouvir sa soif de découvertes dans d’autres territoires, lui qui ne vient de nulle part de précis. Et en revient avec une puissance nouvelle qui tranche avec les festivités balkaniques d’alors. Le jazz d’avant-garde, puisé à des sources nordiques et glaciaires, baignant dans cette atmosphère d’anti-prog menaçant d’où d’Orient il faut bien tendre l’oreille pour entendre encore les scories, les percussions qui claquent et la glossolalie du chanteur Ahmet Bilgiç, incompréhensible et pourtant donnant sens au sons sans grammaire. Ce « Vigeland » (inspiré de l’artiste norvégien vitrailliste du même nom ?) marque le coup d’entrée, Gevende a pris une ampleur nouvelle, développant son jeu piégeux sur de longues plages pleines de chausse-trappes. Ne pas croire trop vite savoir où se dirige la quintette d’Eskişehir, lovée dans des atmosphères d’abord presque ouatées sur les bords pour mieux exploser plus tard, le temps d’une contre-allée rythmique. Prime aux solistes que sont l’alto et la trompette pour chacun de son bord faire rugir des plages de mélancolie mélodique ou déconstruite, chaque instrument aussi signant de ses propres accidents chaque plan sonore. D’un coup pizzicati, d’un coup longue dérive désolée, les musiciens de Gevende sont comme assis en tailleur face à la mer, invoquant des tempêtes terrifiantes entre accalmies grisâtres, donnent des coups de griffes instrumentales et d’un souffle, font gronder l’air de somptueuses et catastrophiques harmonies à provoquer des naufrages. De la profondeur dans les timbres de la trompette, des échos qui laissent résonner les pincements de guitares dans un silence de glacier, une tessiture humaine dont la langue impossible n’entame pas la chaleur et la sensualité. Moins que le feu sous la glace, Gevende brûle de sa froidure nouvelle, consume ses propres paysages hivernaux sous une énergie qui ne cesse pas de se réactiver à chaque détour de ces longs morceaux, comme un dragon incessamment en réveil. Regains de tension répétitive dans la fermeture instrumentale de « Akvaryum », zébrée de dissonances, ou dans le pont grandiose de « Kadıbostan », seule incursion jazz-balkanique déglinguée tranchée nette en deux par une faux genre boléro martial repoli dans du prog de tueur, après quoi, reste plus qu’à apaiser les esprits surchauffés avec solo de trompette blafard comme une pleine lune. Jamais à cours de décentrage, étrange groove électrique presque afro-beat sur un hypnotique « Igloo » bientôt drogué d’hallucinants phosphènes, drôle de folk countrysant de « Sanki », dérivant sur des clappements de mains et s’envolant vers le ciel comme sous l’effet d’une vapeur interlope, avec soufflage de cuivre comme pour viser les étoiles et riffage de guitare dérangé en notule de bas de partition. Gevende, ça s’écoute les yeux fermés, comme dans une sorte de rêve, en faisant fi de toute notion d’identité ou de point d’ancrage. Et même quand ils s’inspirent d’une mélodie traditionnelle arménienne, sublimement rendue par Ahmed Bilgiç, vocaliste décidément fascinant bien au-delà de son idiosyncrasie linguistique, ils y invitent l’expérimentateur et jazzman électronique norvégien, tiens, revoilà la Scandinavie, Eivind Aarset, pour un nouvel instant suspendu de magie orageuse. Bon, il reste encore un peu, je laisse ? Je laisse la surprise ? Parce que Gevende, c’est toujours de l’imprévu, c’est jamais de la formule. Ou alors de la formule magique. « Toi, tu n’es pas un poisson » dit en substance le titre. C’est vrai. Mais le deuxième album de Gevende est immense. Se laisser prendre dans ses filets, s’y noyer de bonheur, s’y noyer de jouissance.

note       Publiée le mercredi 28 décembre 2016

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    Si tu parles du live, je ne crois pas qu'il y ait eu de copie physique (au alors peut-être très limité au début). J'ai l'impression en effet que même les deux premiers albums sont plus difficilement trouvables en physique qu'il y a 5-6 ans (où c'était facile en import). Vu la dégradation du climat politique et social depuis quelques années, sans parler de la pandémie, je pense que l'underground turc a beaucoup souffert. Leur dernier album est paru en 2017, depuis Ahmet Kenan Bilgiç a apparemment fait pas mal de musique de film et également de la musique pour un spectacle de danse avec le trompettiste Serkan Emre Çiftçi (je n'ai pas écouté, mais j'imagine que c'est assez dans l'esprit du groupe).

    stickgrozeil Envoyez un message privé àstickgrozeil

    Tu parles! J'ai déjà regardé cette vidéo ce matin, le concert est magique. J'aimerai bien trouver des copies physiques de l'album, mais ça a l'air compliqué, le projet a l'air plus ou moins stoppé, non?

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    Comme quoi les liens dans le line-up ça sert ! Cool que la découverte te plaise. Si ce n'est pas déjà fait, je ne peux que te recommander chaudement le Live at Saint Autuan (qui est chroniqué et dont la vidéo, magique, est sur Youtube) et leur dernier album en date Kırınardı (pas (encore?) chroniqué), tous deux accessibles sur Bandcamp.

    stickgrozeil Envoyez un message privé àstickgrozeil

    Rooooh dis donc, quelle découverte... Je m'y intéresse à cause de la participation d'Eivind Aarset, mais clairement, le groupe n'a pas besoin de lui pour pondre ce qui apparait comme un chef d'oeuvre. Suis en train de bloquer sur le groupe bien comme il faut depuis hier.

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    Pour moi aussi ! Un nouvel album studio est le bienvenu, ils avaient juste sorti un live (magnifique) en 2015 après la BO de Monochroma. (hélas les caractères spéciaux ne sont pas reconnus dans les coms, on dira donc que ce nouvel album s'intitule "Kirinardi")