The Creatures › Anima Animus

Je ne me suis jamais senti très à l’aise pour parler de The Creatures, je suis trop fan de Siouxsie and the Banshees pour ça; j’avais adoré ‘Feast’ et ‘Wild things’ qui, à mon sens, perpétuaient la philosophie Banshee mais vue sous autre angle, plus épuré, plus essentiel, mais tout aussi mystique et sensuel. Les sonorités ensoleillées de ‘Boomerang’ m’avaient déconcerté puis rebuté, malgré la voix de la sorcière Susan, car après tout, je reste un indécrottable goth. Au fur et à mesure que la carrière des Banshees s’est mise à capoter, The Creatures ont gagné en identité et en liberté mais dans la mesure où il s’agissait encore d’un side-project, les sorties se trouvaient espacées dans le temps (10 ans entre ‘Boomerang’ et celui-ci !), d’où la difficulté de cerner les contours d’un électron libre qui se rit des contraintes. ‘Anima animus’ a cette qualité de faire le joint entre l’aspect rituel des débuts (‘Turn it on’) et les sonorités du temps, notamment en ce qui concerne l’usage de l’électronique (‘2nd floor’), tout en conservant une forme de noirceur séduisante ('Exterminating angel'). Le son s’est épaissi. Le travail percussif reste un axe essentiel mais quelques guitares, synthés, sont venus remplir les espaces et souffles entre les frappes; avec parcimonie, à bon escient, sans prendre le pas de manière démesurée. Car la Reine de la Cérémonie reste Lady Siouxsie dont la voix enchante, séduit, effraye presque (‘Take mine’) et ne pas lui laisser l’espace nécessaire serait lui faire outrage. A mon sens, aux côtés de ‘Feast’, ce disque est le plus solide des Creatures car il va au delà des envies de découverte et d’expérimentation de ses deux géniteurs pour développer un vrai climat cohérent dans la diversité (même l’acoustique ‘I was me’ a entièrement sa place ici). Un essai parfaitement réussi donc…Et pourtant, je peine à m’enthousiasmer à 100%. En terme de production, d’arrangements, d’interprétation, rien à reprocher, mais je dois bien avouer que je lui regrette une certaine spontanéité. Trop pro ? Peut-être, je le décortique comme j’étudierais un tableau de maître en y décelant qualité sur qualité mais sur l’échelle émotionnelle, l’aiguille, même si elle vibre, n’est pas au sommet. Malgré de fort bonnes chansons (‘Exterminating angel’, I was me’, ‘Turn it on’), je ne retrouve qu’une part de la magie que j’attendais. Je me souviens avoir éprouvé le même sentiment à leur concert. Super, un grand moment, mais pas le frisson comme avec les Banshees. Tout le problème. Difficile de ne pas juger le nouveau projet à l’aune de l’ancien…Pas question de se méprendre, ‘Anima animus’ est une réussite, un essentiel des Creatures avec ‘Feast’ et 'Hai !'(j’exclus l’indispensable ‘Bestiary of’ qui est une compilation) dont le mélancolique final ‘Don’t go to sleep without me’ aux sonorités pop féminines 60’s version 90’s justifierait l’achat à lui-seul. 4,5/6