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Drudkh › A Furrow Cut Short

cd • 7 titres • 58:50 min

  • 1Прокляті сини I09:20
  • 2Прокляті сини II07:05
  • 3Епосі нескорених поетів09:00
  • 4Тліючий попіл06:27
  • 5Безчестя I09:11
  • 6Безчестя II09:22
  • 7Поки не засиплють чужою землею очі08:25

informations

Enregistré entre aout et septembre 2014 au ViTeR Music, Kharkiv, Ukraine.

Le titre affiché ici, pour des raisons techniques, est la traduction en anglais du titre original Борозна обірвалася, bien écrit en cyrillique sur l'album. Sorti sous forme cassette, CD, vinyle et fichiers téléchargeables sur le bandcamp du label. Illustrations par Vasyl Lopata.

line up

Krechet (basse, claviers), Roman Saenko (guitare, basse), Thurios (voix, claviers), Vlad (batterie, claviers)

chronique

Voici le dernier Drudkh, et juste à regarder la pochette on conçoit rapidement que cet album est ancré dans une réalité politique bien actuelle malgré les bottines d’antan et les tuniques à pépé : si, par chance, vous n’avez lu aucune source d’information depuis des dizaines de mois je vous fais un résumé digestif en trois lignes. L’Ukraine est actuellement en proie à une division où intérêts géopolitiques et économiques, tourbillon idéologique et realpolitik comme on en fait plus font les choux gras des analystes, polémistes et autres savants de comptoir, d’ici à l’éternité comme dirait le Bruce. Je regarde encore la pochette : au loin un village brûle. Deux gars sous le regard d’un cheval de l’apocalypse semblent se contorsionner comme dans un jeu de foire ou une danse particulière et tout ça pour chopper une miette de territoire derrière une mince frontière, dans un ballet répétitif et vain, propos continuant le titre plus explicite encore de la compilation « Eastern Frontier In Flames » sortie en 2014… Ce premier a priori sur la thématique de l’album est renforcé par le contenu du livret. Tous les textes sont des extraits de personnalités ukrainiennes semblant emblématiques aux yeux du groupe, appelées à la rescousse au moment où leur pays au mieux se désintègre : Vasyl Stus poète dissident devenu héro national dont la vie et les travaux furent détruits par le KGB et le goulag, Sviatoslav Hordynsky peintre moderniste élève de Fernand Léger, Oleh Olzhych, militant nationaliste torturé à mort par les nazis au camp de Sachsenhausen, Nicholas Vingranovsky, cinéaste et poète itou, et enfin Mikail Sitnik dont le texte « Nuit » raconte en conclusion de l’album la traversée en aveugle d’un homme qui ne reconnait plus son environnement. En gros, voici un étalage au monde de la culture ukrainienne, une culture donc attaquée, opprimée mais se défendant comme elle peut malgré les affres de la division, dont Drudkh va utiliser des fragments de textes pour en faire un guide pour une vision pathétique de l’état actuel des choses… car tous les extraits ici réunis dévoilent un lieu qui sans cesse vit une espèce de fin du monde, ratiboisé par l’une ou l’autre puissance voisine, morcelé par les tiraillements, la répulsion et l’attraction de toutes ces frontières mouvantes… Je prends le temps de bien préciser tout cela car le parti-pris est net, tout est en ukrainien dans le livret et les citations comme les auteurs et leurs œuvres sont bien mis en évidence, faisant de ce disque une compilation à la sauce black metal de plus de 70 ans de déclarations éreintées par les mouvements politiques et les multiples atrocités qu’a connu ce pays au XXe siècle jusqu’à aujourd’hui. Donc black metal pour the lagarde and michards : un son hypnotique, avec riffs tristounes, voix gros buffle qui hurle, batterie qui bourrine non stop avec quelques ralentissements par ci par là… il faut quand même avoir une bonne dose de romantisme en soi pour se laisser aller à écouter ces ballades tristes et denses, où les pauses sont rares, avec un pic de désolation déprimée à partir de la moitié de l'album grâce au tour de passe-passe Тліючий попіл - Безчестя I et II. Il faut savoir aussi accepter sur cet album que Drudkh joue du Drudkh sans éléments dits « folk », quasi inexistants… ce disque est en fait une succession de balades comme on dit dans le hard rock, à savoir le morceau triste dans l’album bourrin, sauf que là, toutes les pistes sont de cet acabit… les riffs ne sont pas forcément très originaux et la répétition est reine ici mais je sais pas, il y a quelque chose de trop profondément cafardeux dans le propos pour que je détourne l’oreille de ces longues plages de guitares qui n’en finissent plus de se paraphraser ! Vous aurez compris, j’aime assez bien cet album, malgré l’apparente linéarité du propos, malgré mon intérêt limité aussi pour tout ce qui se passe dans ce monde, je me documente, je stocke et picétout, puis je regarde par la fenêtre, et à l’écoute de Борозна обірвалася, en scrutant les champs et vieilles pierres du coin on peut vite se souvenir que l’endroit même où l’on vit a été l’objet de multiples saccages, guerres et dévastations, et c’est peut-être quelque part salvateur qu’un gusse d’Ukraine nous rappelle ce propos de temps en temps, à savoir que les groupes, les territoires ou les entités se créent dans le sang, qu’il n’y a souvent pas d’existence de factions de gros sans écrabouillage des plus petits ou de ceux qui pensent de travers. Cet album plein de spleen, blasé, déprimé saura faire en tout cas cogiter s’il est pris comme il est, un ensemble de témoignages de temps mouvementés repris à la sauce Roman Saenko, à plus ou moins haut tempo, sachant ralentir la cadence pour ruminer, et en même temps très sérieux, aussi rigide qu’un bibliothécaire allant vous chercher un bouquin au magasin pour votre thèse sur les liens entre black metal et histoire culturelle.

note       Publiée le mardi 2 février 2016

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    Cinabre Envoyez un message privé àCinabre
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    En effet… les difficultés politiques de l’ukraine étaient déjà évidentes depuis la tentative d’assassinat du président machin y a 20 ans en arrière et ça n’a fait que s’empirer petit à petit.

    Le temps passe, les hommes meurent. On est peu de chose.

    Rastignac Envoyez un message privé àRastignac
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    C’était déjà bien le merdier à l’époque ! Une guerre de dix ans. Qui s’est intensifiée.

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    Cinabre Envoyez un message privé àCinabre
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    Ah bah tiens, tu l’as chro, celui-là? Et ce forshadowing… ça fait froid dans le dos avec le recul.

    Le riffing est pas mal du tout à part ça. Et y a une hargne palpable dans le jeu du chanteur. Beaucoup plus que sur ses prédécesseurs. Une histoire de mixage et de contexte socio-politique sans nul doute.

    J’essaierai d’y revenir.

    Demonaz Vikernes Envoyez un message privé àDemonaz Vikernes

    Et un album générique de plus ! Mais le groupe fera pire sur son split avec Hades... Bon allez, Cursed Son II s'en sort avec les honneurs. Le reste est fade.

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    vincenzo Envoyez un message privé àvincenzo

    Je l'aime bien... surtout le premier titre avec ses arrangements au loin, perdus... Un côté Marduk dans la voix je trouve...

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