Zothique › Zothique (EP)

Une batterie-galop, une voix de fond de gorge – du genre percluse de lésions et ganglions saignants mais qui tient ferme sa ligne hargneuse. Seulement deux titres. Une espèce de sludge, d'accord. Mais déjà… Cette drôle d’ambiance. Curieuses couleurs qui flottent et filent entre deux couches d’atmosphère. Particules qui piquent la plèvre, frottent les fosses nasales, rougissent les yeux et remontent en décharge – ou en charge – au cerveau. Elles y font cycle, strate, nouvelle économie dans les échanges chimiques. Zothique – sur ces deux plages trop vites passées pour qu’on se rende bien compte ; et où, de l’une à l’autre, la variation s’entend encore surtout dans les vitesses, l’une en pleine course, l’autre rampante – aiment déjà les lieux étranges, la nature en perpétuelle mutation, les ruines qu’elle envahit, les sites où elle feint de s’adapter pour mieux bouffer ces volumes de béton, de pierre, temples et usines, ces réservoirs à gaz et minerais enrichis qui étaient venus en intrus. Le lierre gagne. Elle recouvre. On entend déjà ces orgues psychédéliques qui déphasent la lourdeur des aciers, plombs, gravats – sludge, disais-je, doom, et emballement coreux, donc. Étrange biais. Zothique, au fait, tirent leur nom d’un cycle de romans et nouvelles, d’un monde imaginé par un certain Clark Ashton Smith, ami en sont temps, incidemment, d’Howard Phillips Lovecraft. Je n’en ai rien lu, de ce Smith ci, au plus quelques extraits. Il semble que tout ça renvoie à un curieux Antique, amalgames et noms secrets. Je préfères pour cette fois rester sur ce vague là. Elle me plaît, cette distorsion à peine ainsi entrevue d’un continent aux contours bizarrement familiers mais au grain autrement sali, reflet, dimension en réponse à la notre et qui serait comme criblée. Elle colle assez, de plus, avec cette pochette ; avec ces vidéos, aussi, qu’on télécharge en même temps que les pistes audio – et dont le son, malheureusement, est pour le coup hideusement encodé, alors que les plages seulement sonores sont parfaitement audibles, produites brut mais pas amoindri. Images de paysages désertés, friches industrielles à la fois calmes et inquiétantes, comme habitées d’une vie très ancienne ou simplement inconnue – latente ou bien qui, toute patiente quant au moment où elle éclatera, n’a cesse de rôder. Tout est là, donc, déjà. Mais pour l’instant un peu d’un bloc. Ça dispose à la suite. On attend, un peu indécis – car douze minutes, décidément, font peu pour ce qui s’y trame – que le sol veuille bien craquer pour qu’en jaillisse la bête ou la forme de feu de l’Esprit, de l’Autre Chose. De ce qui se tient – semblent-t-ils dire – autours, là, dans les brises, aux parois, et en-dessous enfoui.