Pissed Jeans › Honeys

Des Pipi Futes, j'en possède trois quand même, car j'ai de la tendresse pour ces couillons, mais j'avoue que je les ressors presque jamais. C'est mon côté élitiste, un peu fâché avec le noise rock d'employés. Et c'est un peu couillon aussi, car même s'ils sont pur second rôle dans la maison, ce sont loin d'être les moins sympathiques, très loin même. Et ce quatrième skeud, passant je crois comme inférieur aux deux d'avant, est en réalité tout aussi bon. Il est moins ostensiblement dégénéré, moins puissant et narcissique ; plus usé et crevard ; j'en veux pour preuve le slow "Cafeteria Food" avec son chant à la Nick Grenier et son blues de sous-fifre névrosé et frustré, dans laquelle je me plais à voir une marque du commencement de l'âge adulte. L'air de pas grand chose, c'est peut-être même le plus authentiquement lizardien, ce Honeys. Même si dans l'esprit, c'est carrément l'album de noise rock de Jean-Claude et Hervé ; j'sais pas si vous visualisez le truc, la Vévère & JC attitude, mais moi j'imagine bien le séminaire d'entreprise et ces cons de Pissed Jeans commencer à foutre le boxon, cravate de traviole et oeil dangereusement antisocial, avant de se faire recadrer avec sévérité par le DRH Henry Rollins qui les remet dans le droit chemin - alors que David Yow tel un diablotin de la mauvaise conscience les appelle à tout retourner, du paper-board à la machine à café, en passant par les secrétaires. "Vas-y, fais-le !" - "non, non, je peux pas aller plus loin, j'ai un contrat chez Sub Pop quand même, je peux pas faire tomber mes lunettes quand je vomis tu comprends ?" - "Pas vraiment... mais ça te passera, garçon". Et puis c'est vrai que bourré, la différence entre Maéva et Jeanne est très ténue, eheheh... Et c'est vrai qu'en y repensant le lascar qui m'a fait découvrir Pissed Jeans a des sourcils noise rock à rendre jaloux ceux d'Hervé Dumont, signe que le réel est pour ne pas changer assez raccord. Toujours cette sensation très Pissed Jeans d'entendre à l'oeuvre des coreux mauvais éléments de l'entreprise, ou des alcooliques encore trop timides. Statut "cul entre deux chaises" qui dure depuis 2005 et c'est un peu pénible, même si on les aime bien. De purs prolos, bien geeks sur les bords quand même hein, mais généreux (mot qui revient souvent avec Pissed Jeans) et fort divertissants. Parviendront-ils un jour à sortir une vraie tuerie intégrale d'album ? J'en doute ; ils sont encore trop scolaires pour ça. Il faut peut-être que ces gens entre deux âges boivent davantage tout simplement ; ils ont encore la cuite encore un peu trop mesquine pour espérer le statut de princes, de seigneurs. Sait-on jamais. Un statut de mec bourré mention A+, de toute façon ça se travaille en général sur plus de dix ans, c'est un labeur certain. Et ça restera toujours plus intéressant à suivre que l'évolution d'un compositeur, car l'alcool est une drogue à prendre très au sérieux, si la cirrhose n'est pas le fruit d'une carrière artistique on a raté le coche. Alors au travail, messieurs ! Que je puisse enfin vous appeller Shited Jeans...