Ca ne loupe pas, quand approche l’été et la perspective de retourner en Islande, inconsciemment je me mets à dévorer les romans noirs d’Arnaldur Indridasson, le souvenirs des rues de Reykjavik m’envahit, me pince l’estomac et l’envie me prend de chronique un truc islandais. J’en ai déjà présenté pas mal mais il reste un peu de stock; le dernier Egò en date par exemple. Comme pas mal d’acteurs du punk ou du post punk, Bubbi semble avoir été piqué de nostalgie vingt-cinq ans après la production du dernier disque du groupe en 1984, au point de vouloir enregistrer à nouveau sous ce nom. Belle pochette à mon sens, au visuel aussi fort que celui des premiers U2; pour l’album lui-même, ça a pris plus de temps. Bubbi a toujours trop bien chanté pour sonner punk, travaille de manière trop classique pour se revendiquer réellement post punk…Et pourtant, ces défauts sont aussi les qualités qui finissent par me piéger. La musique de Egò (en dehors de ‘I mynd’, le meilleur opus à ce jour) est classique donc sécurisante, on s’y laisse envelopper comme dans un cocon. Bubbi chante trop juste, c’est agaçant, mais ce con glisse malgré tout des pointes de mélancolie douce dans son timbre qui font aussitôt effet si je suis d’humeur. Quand il entonne ‘6.Oktober’ (une référence probable à la débâcle de 2008) avec ses synthés hivernaux, sa batterie au son de boîte à rythme, je me sens bien d’emblée, une agréable tristesse me chatouille le ventre…La bande-son idéale pour une promenade de fin de journée au coeur de l’hiver quand il fait nuit dès 17h, que la fatigue de la journée pèse sur les épaules, que les lumières de la ville s’allument comme des étoiles…C’est un peu pareil sur ‘I hjarata mér’, la mélodie tristounette, les guitares plaintives du refrain, ça parle à mon coeur d’artichaut. Après, faut pas mentir, Bubbi s’est essayé à trop de styles pour qu’on le voit comme un punk mais il compte parmi les pionniers islandais malgré tout. Un truc plus agressif avec batterie roulante comme ‘Vonin er vinan mìn’, ça claque bien quand même. Globalement, du pop rock calibré 80’s mais avec production moderne, c’est le sel du truc, ça se présente comme tellement affreux qu’on cherche vite à découvrir où sont les qualités pour réaliser qu’il y en a plus qu’on croit. Même ‘Fllegi lùserinn minn’ avec son refrain plat ‘oooouh ooooouh’, son thème de clavier niais, a capté mon attention sur une simple petite intonation inquiète de la voix au refrain. Le talent de Bubbi, c’est ça aussi. Bien entendu, d’autres chansons ne dégagent pas la même magie, le trop rock ‘Hvenær Sem Er’ ou ‘Áður En Dagarnir Hverfa’ représentent l’aspect trop accessible que je n’aime pas chez le combo. ‘Aldan (Ég Gerði Mitt Besta)’ avec sa rythmique plus électronique demeure gâché par les soli de guitare qui ruinent le potentiel new wave promis par l’intro. Enfin, c’est toujours comme ça avec Egò, une formation assez moyenne à mon goût mais dont certaines compositions laissent des marques indélébiles dans mon esprit, parfaites si le moment s’y prête, les jours gris notamment.