Thou, tout d’abord, c’est un mot. Un mot anglais désormais archaïque que les américains ne lisent plus que dans les pièces de Shakespeare, et, surtout (suspense) : dans la Bible. “Thou shalt not commit adultery”, “Thou shalt have no other gods”, “Thou shalt not kill”, “fais pas ci, fais pas ça”, thou par ci, thou par là, toi, toi, TOI là bouge pas, ne respire pas, ne fait pas ce que tu veux, coupe toi les parties et va te cacher dit le vieux au pauvre Moïse. Thou le groupe va reprendre toutes ces injonctions qu’on entend à longueur de journées et les REFUSER, la bouche pleine de bave, les yeux remplis de haine. Voilà le programme idéologique messieurs-dames. Ce groupe, originaire de Baton Rouge, en Louisiane peut être catalogué dans un style doom / death / sludge (à la louche). Les membres du groupe sont particulièrement actifs dans leur région, dans un esprit “enlève toi les doigts du fion yourself”, et je pus découvrir leur discographie sur leur site où tous leurs textes sont mis en ligne, ainsi que tous leurs morceaux écoutables et téléchargeables de la manière la plus libre possible, et pas via un MafiaUpload ou un bandcamp à la noix ! Le disque chroniqué ici est un EP sorti en 2009, et réédité par la suite au milieu d’une foultitude de splits que le groupe a sorti, notamment avec Salomé, Black September ou Moloch. Vous trouverez sur ce disque ce que vous trouverez un peu sur tous les disques de Thou : une voix écorchée très black metal, sans aucune variation tonale, comme une récitation en fait, des riffs super doom, très lents, avec des breaks parfois un peu ambient / post-rock / drone metal, et souvent des reprises de Nirvana, le groupe étant littéralement fanatique de la bande à Cobain et de la scène dite grunge de l’époque. Nous trouverons donc sur ce disque une cover de Sifting (crédité "Aberdeen, Washington" sur les vinyles) qui reste à mon goût la meilleure reprise de Nirvana que j’ai pu entendre - comme toutes leurs autres reprises de Nirvana en fait, ralentie, poncée, embellie. Le parallèle est fait par le groupe entre Aberdeen, le bled du Kurt, et celui de Baton Rouge, qui, si l’on comprend bien le titre du disque, est une véritable plaie béante, un peu moins froide qu’Aberdeen, mais tout aussi pluvieuse, ennuyeuse et pourrie par un ultra-libéralisme qui transforme ses habitants en zombies agressifs - je vous laisse regarder des séries comme Treme ou croiser le regard de Mike IX Williams pour vous faire une idée de l’ambiance qui règne dans ce cercle de l’enfer moite. En somme, Baton Rouge, tu es coupable, et maintenant va falloir t’expliquer ma grosse ! Manifeste désespéré de gus trop mûrs pour un monde trop fou, Thou ne perd cependant pas patience, et inlassablement tourne, jusqu’en France parfois, produit, édite, réédite ses albums… ce groupe me fascine de plus en plus, notamment par leur réutilisation de gravures "tombées dans le domaine public" très art nouveau ou symbolistes mais mises en forme sur toutes leurs œuvres comme sur des tracts révolutionnaires des années 30. Au bout du compte, après s'être pris dans la tronche cette traînée d’énormes riffs lents et tristes, je me retrouve toujours plein de haine, et je sais même plus pourquoi... peut-être me mets-je à l'unisson de leur discours, à savoir que la haine marchera toujours mieux que l'amitié ou l'amour, que le monde est une poubelle, qu'il faut parfois s'acheter un fusil et s'enfermer avec dans sa chambre pour trouver la clef... arf, voilà, Baton Rouge, c'est malin... allez, 5 BOULES!