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Dominique A › La Fossette

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cd • 13 titres • 38:22 min

  • 1Vivement dimanche3:56
  • 2Février1:51
  • 3Trombes d’eau1:16
  • 4Va t’en6:02
  • 5L’un dans l’autre1:57
  • 6Mes lapins2:08
  • 7Sous la neige3:06
  • 8Le courage des oiseaux2:34
  • 9Les habitudes se perdent2:56
  • 10Ce qui sépare2:33
  • 11Passé l’hiver3:09
  • 12La folie des hommes2:36
  • 13L’écho4:15

informations

Non renseigné.

Le CD1 de l’édition double EMI de 2012 est l’album ci-chroniqué ; le CD2 regroupe l’album Un Disque Sourd, sorti en 1991 en autoproduction et en vinyle par Dominique A lui-même (et désormais introuvable dans le commerce), ainsi que deux inédits et un titre précédemment disponible seulement sur le coffret Les Points Cardinaux. Cinq des titres sont commun à Un Disque Sourd et La Fossette.

line up

Dominique A (chant, instruments)

Musiciens additionnels : Erik Deleporte (arrangements sur 2 et 9)

chronique

Ce type m’a toujours fait un effet étrange ; cette drôle d’impression, contrariée, un peu double. Je l’ai bien aimé, tout de suite ; et du même mouvement je l’ai trouvé agaçant, irritant. Dès ce single qui tournait un peu, beaucoup, sur les radios locales, indépendantes ; et qui tranchait sur tout le reste, à vrai dire, comme une bouffée de froid, de condensation, d’air neigeux dans le flux des choses – rock, punk, cirques et vrais bruits et pop et core et ce qu’on voulait – qui se coulaient là. Ça n’entrait pas dans les tranches. "Single", oui – au sens propre, en traduction : une chanson foutrement isolée, sourire en coin et coton au cœur d’un qui ne savait la rupture que comme simple fin de répit. C’était triste et doux, cynique et fataliste. Discrètement meurtri et pas heureux mais pas mort et l’œil sec. "Si seulement nous avions/Le courage des oiseaux"… Tout le disque est comme ça, en fait : hivernal, au fond plutôt calfeutré dans son froid que gêné, endolori par lui.

J’ai découvert bien plus tard que La Fossette n’était pas son tout premier. Qu’avant il y avait eu Un Disque Sourd. Que celui-ci portait un peu trop bien son titre, pour ce que je pouvais en écouter. Je me suis rendu compte qu’ils en avaient en commun, des morceaux, du répertoire. Sans doute tout au plus à peine retouchés pour viser au diffusable - mêmes pistes peut-être un tout petit peu re-mixées, et encore... Sur le présent album, le son est toujours plat. Gris-blanc. Maigre. Mansarde. La voix souvent en filet rêche. J’ai eu d’emblée cette sensation d’entendre une Barbara en pleine crise d’extinction, les cordes asséchées et l’humeur aussi atone. Celle de me coltiner la parole de ce type crispé, pas à l’aise, la colère enfouie plutôt que simplement rentrée. Le mot juste, pourtant. Le gars même sans doute sympathique, même touchant dans son repli et cet élan contraire de trouver l’expression la plus exacte, économe, de son désarroi. Même, il y avait quelque chose de proche, qui me donnait envie d’écouter plus, de la lui serrer fraternellement, sa pogne désœuvrée. S’il n’y avait eu la crainte d’offusquer sa pudeur… Et puis voilà qu’il m’énervait encore. Avec ses L’Un Dans L’Autre qui m’annonçaient comment ça se passe, presque jubilant de sécréter son aigreur pas fière – parce que oui, je ne savais pas encore mais ça peut faire cet effet exactement, les coups pour rien tirés après la guerre voire l’armistice pour encore moins, en postscriptum sans chaleur. C’est une façon d’en tenir la charge dans le vide, de ne rien en vouloir de plus. Tranquillement salopard, le mec A. Ou bien honnête maladivement, trop lucide pour oser s’amuser.

Ça me fatiguait… Ça me causait, son côté modeste, pas ramenard – province, soupente (Provins, Nantes… ça m’évoquait des images comme – à propos d’autres – Angers ou Bordeaux, à moi qui grandissait à Lyon : grande ville mais pas Paris, et alors encore davantage séparée). On n’aime pas toujours reconnaître ça. On voudrait à certaines heures s’en rendre camarade, des quelques uns qui en trouvent le point, le poids. On se prendrait d’affection pour ces aplats, ce brumeux, ce confiné. En fait – ça non plus je n’aurais pas su l’énoncer alors nettement mais je pressentais qu’il y avait ce lien – tout s’entend aussi bien que "la chanson française", à textes, pour le moins – c’en est peut-être même la plus authentique substance – de la passion première de Dominique Ané pour ces musiques dites wave : cold, minimal… ; pour les secteurs à basse tension des greniers post-punk, pour la pop de squatt rudimentaire, finie à l’arrache à la chaux. Le chant de gens tristes et renfrognés, timides, pas adaptés, pour qui passer adulte n'aurait su être se conformer – alors plutôt tourner la clé.

Ce disque respire encore d’ici le fait-à-la-maison. Le non poli. Toutes les pièces pourtant méticuleusement, précisément découpées et assemblées. Le matériel pauvre – le chanteur lui-même avouera plus tard que jusqu’au disque suivant inclus (Si Je Connais Harry), le souci de sonner professionnel ne comptera pour rien ; qu’il avait peur même que pour ledit troisième, "ça s’entende", qu’on crie à la supercherie – mais la matière, à vrai dire, noble parce qu’absolument franche. Le parti pris têtu et la manière gauche – mais au vrai travaillée pour que tout ce qui se joue et se dit fasse touche et que rien en trop ne demeure. Voilà, j’aime encore bien La Fossette. Il me flanque encore le cafard ; et tout autant l’envie d’ouvrir, d’aérer, de partir pendant qu’il fait encore bon.

Je l'écoute, de loin en loin, presque jamais en compagnie ; comme on sort parfois en espérant qu’on n’y croisera personne de vraiment proche, de plus qu’un peu familier. J’apprécie ô combien qu’il ne joue pas le mystère, la cachoterie ; mais qu’il n’ait jamais rien à expliquer. J’en goûte un peu plus l’acidité crayeuse que sur le coup. Il me serait absurde d’y revenir trop souvent. J’y entends l’ici et l’alors. J’en savoure sans m’agiter le détachement, le contrecourant dans son époque ; l’absence de toute saturation cherchée, le vibrant des coques de plastique des synthés sur certaines fréquences, les parties de voix parfois si curieusement placées – sans qu’on puisse à coup sûr savoir s’il essayait, expérimentait, ou si tout simplement le micro était trop loin, l'un ou l'autre potentiomètre pas assez monté. En dehors de ces moments, ce type, ce disque, m’énervent toujours ; voire m'horripilent un poil en sourdine ; ou bien m’ennuient – mais l’ennui de toute façon fait partie de ce qu’on y cherche… Il me semble que sur l’une des stations, ces années, le morceau qui suivait Le Courage Des Oiseaux était immanquablement Start Choppin, de Dinosaur Jr. En fait de contraste, ça faisait une sorte de gouffre. Fossette, fossé… Je n’avais pas l’âge ou bien ce n’était pas l’heure de me poser la question. Je savais gré à ces deux bords – ces deux chansons – de tout bonnement exister.

note       Publiée le jeudi 2 octobre 2014

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    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Alors ! ... Apparemment la réédition de 2012 de La Fossette (2CD, EMI) inclut en disque "bonus" l'intégralité dudit Disque Sourd - et je vois que celui-là se trouve en revanche entre un peu plus de 9 et exactement 15 euros (+ frais de port) sur le même discogs. (Et sans vouloir inciter le moins du monde au piratage - ça, les labels et les spéculateurs sur ce genre d'objet s'en chargent très bien - il semble bien aussi que les 13 titres dudit objet se dénichent assez facilement, également, du côté d'un certain oiseau bleu bien connus de nos pairs(-à-pairs)).

    Rastignac Envoyez un message privé àRastignac
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    Etonnant : je viens de voir qu'il faut débourser entre 1000 et 2000 balles pour s'acheter le premier album cité dans la chronique, si on le trouve ("un disque sourd") Mais sinon, j'ai une affection particulière pour JL (le ténia pas "de Murat") : après avoir lu son journal, écouté ses chansons, entendus des témoignages effarés de son entourage. Et juste pour ça, après la bataille j'écouterai enfin Dominique A, vu les commentaires, un jour.

    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Eh ben sur celui-là (et sur Un Disque Sourd), c'est là que ça peut s'entendre un peu, ces goûts que peut/pouvait avoir le gars ! (Sur les suivants plus trop hein, je ne dis pas, sans doute même en le sachant/en tendant bien l'oreille).

    Shelleyan Envoyez un message privé àShelleyan
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    Je n'aime pas sa musique mais je viens de voir un mini reportage où le mec présente sa chambre de jeunesse: posters de Joy Division, Psychedelic Furs, The Cure...Disques de The Cure, Sapho...Bon goût, le type.

    Dioneo Envoyez un message privé àDioneo
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    Et merde, "en parlant de ça" : j'avais même pas capté qu'il avait calanché en 2011, le JL... (J'évoquais le gars tout à l'heure dans les com du premier Diabologum et je retombe sur le tien ici, (N°6). J'en profite pour "rebondir" là-dessus... même pas quatre mois plus tard). On est assez d'acc', on dirait, sur le "lien" entre leurs trucs... Même si Le Ténia - au départ en tout cas - jouait aussi sur une autre ambigüité, plutôt du type "euh, il déconne ou pas, là ?!" (avec des titres du genre "Le meilleur chanteur français du monde"). L'ayant croisé y'a longtemps à un endroit où je tafais - enfin pire, où j'étais stagiaire, bref - et où il venait jouer, j'avais trouvé le gars plutôt à la cool, comme ça. Après oui : je m'étais ensuite posé ladite question - de la part de déconnade ou pas du type - quand il s'était mis à chanter des trucs du style "J'ai cassé ma voiture en me garant trop vite/Et Bertrand Cantat se prend pour un poète" (chanson sortie un bon moment "avant Vilnius", hein - le mec n'a pas du tout "profité" du truc sordide pour écrire ça "sur le dos" de l'autre, précisons). Et puis à mesure que le concert avançait, plus il en faisait une de plus, plus j'étais entré dans le bidule - à trouver qu'en tout cas il avait l'air d'y croire. Et du coup à écouter sans insister sur la question. (Et à trouver qu'il faisait bien, finalement).