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Bästard › Radiant, Discharged, Crossed Off
- 1996 • Semantic 900401 • 1 LP 33 tours
- 1996 • Semantic 900402 • 1 CD
- 1996 • Ici d'ailleurs IDA 004 • 1 CD
- 2011 • Ici d'ailleurs IDA 020 • 3 CD
lp/cd • 10 titres • ??:?? min
- 1King Kong??:??
- 2Travelgum??:??
- 3200 Miles From Hanoï??:??
- 4From The Hillside??:??
- 5Chinatown??:??
- 6Hatching??:??
- 7It Ain’t No Funny At All??:??
- 86:45 PM??:??
- 9Growing Daisies??:??
- 10Locate Radiation??:??
extraits vidéo
informations
Enregistré et mixé au Idful Music Corp., Chicago, septembre 1996, par Andy Bryant.
L’édition 3CD Ici D’Ailleurs constitue en fait le coffret The Acoustic Machine. Le disque ici chroniqué – précédé des deux plages issues de File Under Music et suivi de remixes faits à la même période – occupe le dernier des trois disques du coffret.
line up
Éric Aldéa (guitare, basse, voix), Jean-Michel Berthier (sampler, bandes), François Cuilleron (violon, violoncelle, xylophone, percussion), Franck Laurino (batterie, percussion)
chronique
Celui là est subtil, à vrai dire. Il prend même un peu en traître. Parce qu’il arrive doucement, bruits d’eau remuée, de bulles, bruine de bandes à l’envers, harmonique de cymbale bouclée. Et qu’il la fait monter, la pression. Qu’il y a vraiment mouvement, au long de la plage. Et dans le disque, des zones pas claires encore – cachées mieux, attirantes et presque confortables, pour assurer leur piège. En fait je crois que j’ai enfin trouvé le mot – celui qui me bourdonne et m’échappe, depuis le temps que je les écoute, chaque fois que je leur découvre d’autres terrains – qui la définit bien, cette constante fantomatique dans leurs musiques changeantes, métamorphiques, à ces Lyonnais avec ou sans tréma (Deity Guns puis Bästard puis Zëro, donc… que j’avoue beaucoup moins bien connaître). Qu’elles luisent ou s’opacifient d’anxiété rentrée, explosent en défonçant leurs taules, se laissent couler dans de curieuses ivresses dérivantes, toujours, en fond, il y a… Parasitage. Au sens des ondes radios qui se brouillent, de la transmission qui soudain se trouble, se floute, grésille. Avec celui aussi – c’était déjà une hantise qui prenait au ventre dans Billy Dracks, sur Trans Line Appointment (l’unique album de Deity Guns, donc) – de la forme tapie au fond, qui attend son heure, se nourrit de la substance vive où elle se loge, invisible mais gène bientôt sensible ; part maligne dans l’hôte, qui marque peu à peu son apparence.
Subtilité, disais-je : ici tous les moyens s’affirment. Le malaise parfois, l’émotion inquiète, se dissimulent sous des moirées superbes, des reflets veloutés, des demies-teintes satinées. Jamais sans doute avant celui-là, ils n’auraient pu jouer si souple. Amener si sourdement les moments de cahots, les accès de tension électriques, vibrations dans les tempes et les dents. La batterie, parfois, part ici carrément jazz. Une sorte de. Les plages s’étendent, trouvent cette dimension vaste et nuageuse qu’ont souvent celles de groupes dits post-rock. Certains passages, même, dans les textures passées par des effets déformants, qui les masquent, les rendent étrangers à leurs sources, par un certain tour que prend le groove, on peut penser à une certaine musique électronique – électro, même, secteurs engourdis d’ambient au pouls perçu à travers les strates, les couches. Singulièrement, aussi, c’est une espèce de folk. Pas comme genre et forme – celle-là, ici, est bien trop travaillée, foisonnante, pour le dénuement qu’on prête en général à celui-ci. Mais au fond pour sa proximité ; sa propension – paradoxale, vue la complexité atteinte ici : du jeu, des compositions, dans la finesse même de l’agencement général, cette façon d’en habiter l’espace – à rendre palpable des vies, des épisodes, des milieux. Ce sont mieux que des atmosphères : ce sont des proportions de pièces, de rues, des distances entre les corps. Des charges – parasites, j’insiste – qu’ils font circuler, nous passent, nous transmettent. Qu’il nous faut, comme eux, tenter de dissoudre. Folk comme dans cette fausse plaisanterie dont usait FM Einheit pour tenter de définir Einsturzende Neubauten : folk parce qu’il n’y a pas de distance entre les existences de ceux qui jouent et ce qui émane de leurs instruments. Pas de métaphore – qu’il y ait ou non narration. Mais des images, oui, des impressions. Des assemblages artisanaux qui font jaillir le sentiment plutôt que le dire, le souligner. Il est notable d’ailleurs que la voix, sur Radiant, Discharged, Crossed Off se fait rare ; mais à chaque survenue d’une présence en consomption ; bien plus essentielle que les mots qu’elle porte, à vrai dire – et le timbre finalement assez unique malgré tout ce qu’il doit à son lieu, à son époque ; précisément unique par ce lieu, cette époque : parce qu’il ne les mime pas mais en est marqué… et les marque, les définit. Comme cette musique toute entière, en fait. Elles portent, l’une et l’autre, l’une dans l’autre, cette tristesse en lutte, active, qui est une réaction – presque allergique – à l’apathie d’un monde, d’une ère en train d’abandonner.
Cette musique-là tente de pousser hors de ce Rien en train de grandir. Se love aux quelques creux où le bonheur fuyant, la chaleur sont possibles. Avec le temps, avec les nuits, je me rends compte que j’aime ce disque, de plus en plus ; qu’il luit d’un autre éclat – plus couvé, plus insaisissable – que celui d’avant, l’éponyme ; que l’autre, à mes yeux, pâlit de moins en moins celui-là. Il faut prendre le temps de discerner en lui les symptômes et les voies d’expulsion. Ils sont là dès son titre. Et rien ici ne ment.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
En parlant du Tom Waits période Bone Machine/Black Rider, tiens, ça me frappe plus que jamais à quel point il peut y avoir des choses proches de ça sur ce Bästard là (la voix bien sûr, mais la façon de traiter le rythme, aussi, moins évidemment). Ça, et aussi pas mal le The Ex de la période où ils ont commencé à frayer avec des gens de l'expé/arty, en gros vers Mudbird Shivers et/ou sur les albums avec Tom Cora and Co. ... Ça j'avais pas forcément fait le rapprochement à l'époque des chros, mais là ça me paraît évident. (Et puis oui, ailleurs sur le disque ça part encore dans autre chose et de toute façon de bout en bout c'est références ou pas bien singulier, comme musique, ce qu'on entend ici).
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Ah oui, les deux rétros Deity Guns (A Recollection, donc) et Bästard (The Acoustic Machine) sont franchement impeccables, à vrai dire. Du chouette boulot - et en effet on les trouve à des prix pas exhorbitants (il me semble que je lavais chopée pour moins que ça, d'ailleurs, la Deity, à Souffle Continu, à Paris).
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- Raudus › Envoyez un message privé àRaudus
Oui, je me suis mal exprimé, "peu abouti" comme dans brut de décoffrage, un peu comme le premier Bästard dans un autre genre, pas comme dans "composé par un fion pour un orchestre d'orteils". Bon à savoir que ce coffret renferme un CD live, en plus des deux albums...de l'EP et de l'album...enfin, du reste quoi. 28€ sur Ici d'Ailleurs, ça se tente.
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- Dioneo › Envoyez un message privé àDioneo
Oui, je ne prenais pas ça comme du pinaillage hein ! Et c'est vrai qu'album ou EP, on sent là-dedans que le groupe n'a pas encore vraiment "trouvé"... Mais ceci dit j'aime bien ces morceaux, très, euh, fougueux, encore assez bruts dans le noisy/coreux démoli, comme à peu près tout ce qu'il y a sur le premier CD de la rétro, d'ailleurs. OK, pour le live... Ça ne m'étonne pas trop mais merci pour les précisions ! Sans doute pour ça d'ailleurs que ce disque n'est pas sur ledit coffret - alors qu'il y a d'autres prises live, tout le CD3, même, vient de deux concerts, enregistrés pour le coup avec un son plutôt bon.
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- Raudus › Envoyez un message privé àRaudus
Loin de moi l'idée de vouloir pinailler sur l'appellation de la galette, au demeurant assez peu aboutie à mon goût, et en ce sens certainement plus proche effectivement d'un EP. En ce qui concerne le live, il se trouve qu'on me l'avait vendu pas cher à l'époque. Pas réfléchi, j'ai sauté sur l'occase. J'ai compris par la suite, le son est assez crade et en-dehors de l'énergie qu'il dégage et de la surprise d'entendre une reprise de Killing Joke et une du Birthday Party sur la même face, y'a pas de quoi se taper le cul par terre. Trans Lines Appointment comme point d'orgue/référence donc.
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