Le Soleil frappe sans prévenir, et la chaleur met dans un drôle d'état, fait faire n'importe quoi. On se rappelle que le vin peut se boire à la paille... on se souvient que même les moches ont un petit quelque chose en paréo... et subitement des questions profondément existentielles elles aussi nous frappent sans prévenir... "est-ce vraiment un genre gutsien, le stoner ?"... c'est vrai qu'il y a toujours eu un petit tabou sur la question, en nos pages, depuis les nano-chroniques de l'ami Jean-Lucien sur Kyuss et affiliés. Nous autres ayant fait voeu de sombritude éternelle ne sommes pourtant pas grand chose devant la puissance du Soleil, autant que devant la suprématie pileuse de ce hard rock encagnardé, alors nous plions sous son joug comme des moines défroqués quand il nous soumet à son aura - et pour se rassurer on se dit "bah, tant pis... si c'est du stoner suédois, ça veut dire que c'est lié à Black Saabath". Le stoner est usuellement mad-maxien de l'autre côté de l'Atlantique. De ce côté-ci, c'est une musique-miel et une musique-ours... et c'est au minimum aussi bon : j'en veux pour preuve ce Mantra III - le seul Spiritual Beggars que j'ai et j'ai jamais ressenti le besoin d'en avoir un autre - qui est à peu près un mètre-étalon du genre. Sous leur nom qui pue la loose ces mecs envoient méchamment du taboulé, c'est un régal. Avec cette saveur métalleuse impossible à nier qui fait leur son, cette touche NWOBHM évidente, voire de ce petit côté gandalf-metal limite trad doom par moments, qui en font -paradoxalement?- un genre de panard intégral. Sur ma tracklist de réédition du moins, l'intro bossa ultra-décontractée (avec rappel encore plus crémeux sur l'over-crémeux "Inside Charmers" assez magique pour envoyer Odin au club med), fracturée avec une violence amicale par l'exquis "Homage to the Betrayed", suffit à convaincre illico que ça va être génial. Du stoner qui déboule scandinave, groovy et speed-metal en même temps, faut pas cracher dessus. Les suédois suent des doigts, à tricoter leurs riffs kyussprolls, à servir leur rosé-pamplekyuss, menés par ce chant de héros-bûcheron à la barbe grosse et aux cheveux fins qui articule merveilleusement les mots avec des intonations de Ronnie James Dio de deux mètres perché dans la voûte céleste, poursuivis de soli grenaches et par cet indispensable orgue qui fait aussi la saveur de leur son. Panard. Mantra III c'est LE stoner-metal d'artisans couillus, d'accélérations grisantes, avec LA saveur 70's. Imparable. Un album du soleil, venant d'un pays qui n'y fait pas vraiment penser - et c'est dans cette oxymauresque saveur que le vrai talent des Beggars montre son brillant museau. Ma conclusion descriptive et musicale à tout cela ? Les scandinaves sont plus chaudes que les méditérranéennes. Mais tout le monde le savait déjà.